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jeudi 1 avril 2010

Le bouclier fiscal, une efficacité difficile à mesurer

Critiqué par la gauche comme un « cadeau fait aux riches », ce dispositif vise à retenir les contribuables en France, avec un succès contrasté

«Ne pas payer d’impôts supérieurs à la moitié de ses revenus. » En campagne pour la présidentielle, Nicolas Sarkozy s’engage, s’il est élu, à renforcer le bouclier fiscal créé par Dominique de Villepin en 2006. La promesse est tenue, à l’été 2007, par la loi Tepa (travail, emploi et pouvoir d’achat) : la CSG et la CRDS sont intégrées dans le calcul du bouclier, dont le plafond est ramené de 60 % à 50 %. Outre l’idée de ne pas travailler plus de six mois par an pour l’État, le bouclier fiscal vise aussi à lutter contre l’évasion fiscale.

Trois ans après son adoption, ce dispositif a-t-il fait ses preuves ? Ou est-il, comme la gauche le dénonce, un « cadeau fait aux riches » qui échapperaient ainsi à toute hausse d’impôts ? Il y a un an, Bercy a publié le bilan pour 2008, première année pleine du bouclier version Sarkozy. Près de 14 000 ménages en ont bénéficié, dont deux tiers touchent des revenus « modestes », souligne le ministère de l’économie.

Ce sont des personnes qui, loin d’être assujetties à l’ISF, perçoivent par exemple soit des minima sociaux, soit le smic, tout en étant propriétaires de leur logement : le bouclier fiscal leur a permis de ne pas s’acquitter de la taxe foncière (580 € en moyenne). En réalité, nuançait le député UMP Gilles Carrez (Val-de-Marne) en juillet 2009, les 1 000 plus gros bénéficiaires ont touché à eux seuls 337,2 millions d’euros. Et au total, le dispositif a coûté à l’État 458 millions.

843 départs de contribuables redevables de l’ISF
Ce chiffre ne déplaît pas forcément à Bercy. « Il faut cesser de stigmatiser les personnes aisées qui bénéficient du bouclier fiscal, écrivait Luc Chatel, alors secrétaire d’État de Christine Lagarde, il y a un an. Ce sont des personnes qui contribuent largement à la prospérité de notre pays. (…) Nos entreprises ont besoin de capitaux, et il faut bien des gens pour investir. »

D’après le gouvernement, « le nombre de Français qui ont quitté le pays à cause des impôts a diminué de 15 % en 2007 et celui des retours d’expatriés a augmenté de 9 %. » En février 2007, le sénateur Philippe Marini (UMP, Oise) avait évalué à 130 millions d’euros le produit de l’ISF perdu pour cause d’exil fiscal, de 1997 à 2007. Le Conseil des prélèvements obligatoires, lui, a calculé que les 843 départs de France de contribuables redevables de l’ISF en 2006 avaient généré une perte de 17,6 millions.

« Le bouclier a eu un effet psychologique favorable »
Pour les opposants au bouclier, la cause est entendue : à quoi bon dépenser 450 millions d’euros pour en récupérer une vingtaine ? Il faut regarder les « bases taxables », rétorquent certains, c’est-à-dire les pertes de recettes provoquées par l’exil fiscal en impôt sur le revenu, impositions sur les plus-values, droit de mutation… Des montants que le fisc chiffre à 18,6 milliards d’euros, entre 1997 et 2005.

« En réalité, souligne François Ecalle, professeur d’économie à Paris I, le bouclier fiscal a été créé pour contrer l’ISF que la droite n’a pas voulu supprimer, pour ne pas être accusée de favoriser les riches. » Pour Arlette Darmon, notaire au sein du groupe Monassier, « il est clair que l’ISF a fait fuir beaucoup de gens. Après la création du bouclier en 2006, beaucoup de mes clients ont songé à revenir en France. Ils ne l’ont pas fait de peur que la législation soit à nouveau modifiée. Mais depuis 2006, les gens n’ont pas quitté la France après avoir cédé leurs actifs, contrairement aux années précédentes. Le bouclier a eu un effet psychologique favorable. »

Mercredi 31 mars, Nicolas Sarkozy a convoqué les parlementaires UMP à l’Élysée pour tenter d’apaiser leurs critiques.
Marie DANCER

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