TOUT EST DIT

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lundi 26 octobre 2009

Le Crédit agricole veut s'allier à la Société générale

Six ans après le rachat du Crédit lyonnais, le Crédit agricole nourrit à nouveau des rêves de croissance alors que l'on entrevoit la sortie de la crise financière. Selon nos informations, les dirigeants du groupe bancaire coopératif, son président, René Carron, et son directeur général, Georges Pauget, ont mis à l'étude, dans le plus grand secret, un projet de rapprochement à trois qui associerait la banque verte, l'assureur mutualiste Groupama et la Société générale.
Ce projet tenu secret se déroulerait en deux étapes : dans un premier temps, le Crédit agricole se rapprocherait du groupe mutualiste Groupama à travers la mise en commun de leurs activités d'assurance ; dans un second temps, les deux groupes opéreraient un rapprochement avec la Société générale, dont l'assureur mutualiste détient déjà 4 % du capital.

Selon le scénario envisagé, le Crédit agricole et Groupama, agissant de concert, monteraient en puissance dans le capital de la banque en échange de l'apport d'actifs jusqu'à en devenir ensemble l'actionnaire de référence avec un objectif de participation d'environ 30 %. Ainsi associés, le Crédit agricole, Groupama et la Société générale détiendraient une place de numéro un dans la banque et l'assurance en France et rattraperaient le retard pris sur BNP Paribas pendant la crise financière.

NI GROUPAMA NI LA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE NE SEMBLENT SÉDUITS PAR L'OPÉRATION

Engagé il y a plusieurs mois – sans banque conseil mais avec l'aide d'experts du monde des affaires –, ce plan aux contours complexes n'a, à ce jour, fait l'objet d'aucune communication officielle au conseil d'administration du Crédit agricole. Il a cependant a été présenté, dans ses grandes lignes, par M. Carron et M. Pauget, au directeur général de Groupama, Jean Azéma, lors d'une réunion discrète il y a environ un mois.

De son côté, Frédéric Oudéa, le successeur de Daniel Bouton à la tête de la Société générale, aurait été approché de manière très informelle par M. Pauget lors de réunions entre les deux groupes sur leurs partenariats communs. Le Crédit agricole et la Société générale travaillent déjà ensemble. Ils ont créé des filiales communes dans des métiers techniques (courtage, gestion d'actifs).

Or, c'est précisément là que l'affaire se complique. Car ni Groupama ni la Société générale ne semblent séduits par une opération qui, selon les dirigeants du Crédit agricole, présenterait pourtant l'avantage de résoudre les problèmes de cotation en Bourse de Groupama et de sécurisation du capital de la Société générale.

Une source proche des discussions indique au "Monde" que ni M. Azéma ni M. Oudéa ne se sentiraient impliqués par ce projet, qui, souligne-t-elle, reste celui du Crédit agricole et n'a pas donné lieu, à ce jour, à de réelles négociations.

Echaudé par un premier projet de mariage raté avec la banque verte, il y a quelques années, qui a failli lui coûter son poste en raison de l'opposition des patrons de caisses régionales, M. Azéma, lui-même farouche défenseur de l'indépendance de Groupama, serait de même circonspect face à cette nouvelle proposition d'alliance. Il aurait cependant poliment écouté les dirigeants du Crédit agricole et promis de regarder l'éventuel projet écrit qu'on lui soumettrait.

Quant à M. Oudéa, il serait opposé au projet. De son point de vue, il serait ainsi inacceptable, pour la Société générale, d'avoir un bloc d'actionnaires autour de 30 % dans son capital. Cela serait contraire à la politique d'indépendance à laquelle il se tient – un héritage laissé par M. Bouton. Le PDG de la Générale souhaiterait s'en tenir à des partenariats techniques avec le Crédit agricole, sur le modèle de ceux déjà formés.

Très mal engagé, ce schéma de rapprochement rencontre, de surcroît, l'opposition des caisses régionales du Crédit agricole, les principaux actionnaires du groupe. Et sans eux, rien ne pourra se faire. Quelques-uns de leurs représentants à la Fédération nationale ont, en effet, été consultés, mardi 20 octobre. Ils ont exprimé leurs réticences face à cet attelage à trois compliqué à gérer.

Déçu par le mauvais accueil réservé à un projet dont il pense qu'il assurera l'avenir à long terme du Crédit agricole, M. Carron – dont le mandat expire en 2011 – veut croire que la partie n'est pas jouée. Convaincu que les caisses régionales vont manquer là une occasion en or de prendre un tournant stratégique, il aurait l'intention de solliciter l'avis de son conseil d'administration le 10 novembre.
Anne Michel

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