TOUT EST DIT

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samedi 21 septembre 2013

Angela Merkel vers un troisième mandat aux allures de casse-tête


La rupture de confiance entre Angela Merkel et Sigmar Gabriel remonte à juin 2010, le jour où le chef du parti social-démocrate (SPD) a transmis au magazine Der Spiegel un courrier confidentiel que la chancelière allemande lui avait adressé.
Furieuse de cette indiscrétion, à propos des tractations sur le choix du nouveau président fédéral, la chef de file du parti chrétien-démocrate (CDU) a rompu sur le champ toute relation avec son rival de l'opposition.
Après plusieurs mois de froid, les deux dirigeants ont renoué le dialogue, mais cet accroc a laissé des traces dans l'entourage d'Angela Merkel, où l'on est désormais convaincu que Sigmar Gabriel n'est pas totalement fiable.
Si elle semble assurée d'obtenir dimanche un troisième mandat à la tête du gouvernement - performance que seuls Konrad Adenauer et Helmut Kohl ont réalisé avant elle -, la chancelière pourrait pourtant se retrouver obligée de composer avec le SPD au sein d'une "grande coalition".
La faute à la perte de vitesse de ses alliés libéraux du FDP, auxquels les sondages promettent environ 5% des voix, le seuil critique pour se maintenir au Bundestag.
La coalition entre conservateurs et sociaux-démocrates avait plutôt bien fonctionné lors du premier mandat d'Angela Merkel, de 2005 à 2009. Mais rien n'indique qu'une nouvelle expérience serait aussi fructueuse.
Pas seulement à cause de sa brouille avec Sigmar Gabriel. Au sein même du SPD, beaucoup sont réticents à l'idée d'une alliance avec la CDU, qui avait coûté cher aux sociaux-démocrates sur le plan électoral en 2009.
"Il serait beaucoup plus difficile pour Merkel de gouverner avec le SPD cette fois", prévient Frank Decker, professeur en sciences politiques à l'Université de Bonn. "Dès le début, le SPD pensera aux élections de 2017. Ça risque de peser sur la coalition."
DÉFIS DE TAILLE
Angela Merkel est populaire auprès de ses compatriotes, qui ont apprécié sa gestion de la crise de la dette de la zone euro et aiment sa personnalité discrète, mais la chancelière n'en sera pas moins confrontée à des défis de taille si son parti remporte les élections dimanche.
Elle devra accompagner la transition coûteuse et complexe du nucléaire vers les énergies renouvelables, stabiliser la zone euro et réformer une économie qui a plutôt bien résisté à la crise financière mais sur laquelle pèse la double hypothèque démographique d'un vieillissement de la population et d'un faible taux de natalité.
Pendant ses deux premiers mandats, Angela Merkel a tiré un bénéfice maximum des controversées réformes du marché du travail lancées par son prédécesseur social-démocrate Gerhard Schröder, mais aussi de l'engagement du président de la Banque centrale européenne (BCE), Mario Draghi, à faire "tout ce qu'il faut" pour sauver l'euro, petite phrase qui a suffi, au coeur de l'été 2012, à calmer les marchés financiers.
Angela Merkel n'aura cependant peut-être pas toujours autant de réussite.
Quant bien même parviendrait-elle à reconduire sa coalition de centre droit, elle ne pourra vraisemblablement s'appuyer que sur une courte majorité au Bundestag et verra sa marge de manoeuvre encore réduite par un Bundesrat - chambre haute - qui devrait passer aux mains de l'opposition.
"Si Merkel obtient une majorité de centre droit, elle sera sûrement beaucoup moins confortable qu'avant", juge Elga Bartsch, analyste chez Morgan Stanley. "Il y aura des dissidents sur les questions européennes. Elle devra composer avec l'opposition au Bundesrat mais peut-être aussi au Bundestag."
L'actuelle coalition au pouvoir est aussi menacée par la percée du parti anti-euro Alternative für Deutschland (AfD), qui pourrait entrer pour la première fois au Parlement, selon les derniers sondages.
LE SPD EN EMBUSCADE
La montée des eurosceptiques ne pouvait pas plus mal tomber pour Angela Merkel.
Elle intervient au moment où la Cour constitutionnelle de Karlsruhe doit se prononcer sur la légalité du programme de rachat d'obligations de la BCE, où la Grèce et le Portugal pourraient avoir besoin d'un nouveau plan d'aide et où l'union bancaire voulue par Bruxelles et Berlin va faire peser de nouvelles obligations sur les contribuables allemands.
"Si l'AfD entre au Parlement, cela affectera le débat sur l'euro en Allemagne. Il va devenir plus tendu", reconnaît sous le sceau de l'anonymat un conseiller de la chancelière.
La perspective d'une "grande coalition" avec les sociaux-démocrates est cependant l'hypothèse qui inquiète le plus les conservateurs.
Entre 2005 et 2009, les figures de proue du SPD - Frank-Walter Steinmeier, Peer Steinbrück et Franz Müntefering - étaient membres du gouvernement, garantissant une discipline de parti qui avait permis à la coalition de fonctionner.
Mais si le scénario se répète cette année, la situation sera différente. Sigmar Gabriel devrait prendre des responsabilités ministérielles, mais les autres dirigeants du SPD, à commencer par Peer Steinbrück, candidat à la chancellerie face à Merkel, ont prévenu qu'ils n'entreraient pas au gouvernement.
"Sigmar Gabriel a l'image d'un homme qui change brutalement d'avis, sans consulter ses partenaires politiques ni même son propre parti", souligne Elga Bartsch. "Ce pourrait être beaucoup plus difficile de travailler avec lui."
Angela Merkel pourrait aussi se heurter aux ambitions de Hannelore Kraft, figure montante du SPD et probable candidate du parti à la chancellerie en 2017.
La ministre-présidente de Rhénanie du Nord-Westphalie a elle aussi exclu de participer à un gouvernement de coalition et en tant que chef du groupe social-démocrate au Bundesrat, elle pourrait donner du fil à retordre à la chancelière en bloquant les lois sur la fiscalité, les retraites ou l'énergie.
Certains imaginent même le SPD saborder la grande coalition pour s'allier aux Verts et, à l'extrême gauche, à Die Linke. "Le SPD aura toujours l'option et la tentation d'essayer de trouver une majorité sans Merkel", admet le proche de la chancelière.

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