vendredi 26 avril 2013
N’y a-t-il pas en ce moment de quoi se lamenter ? Alors, pourquoi parler de la joie et la présenter comme un devoir ?
Ce titre ne manquera pas de vous surprendre, voire de vous incommoder. N’y a-t-il pas en ce moment de quoi se lamenter ?
Le terrorisme vient à nouveau de frapper des innocents à Boston. La menace nucléaire est brandie par un dictateur fou. Le fanatisme islamiste est au pouvoir dans de nombreux pays, et veut s’étendre encore. La conjoncture économique est au plus bas en France et ailleurs, il y a des centaines de faillites, des millions de chômeurs, des milliards de dettes. Chez nous, nous avons en prime une attaque en règle contre la famille, contre l’enfance, contre le droit naturel. Chez nous, nous avons en prime la corruption politique, le mépris du gouvernement pour le peuple, l’arrogance des oligarques. Tout va très bien, Madame la Marquise…
Alors, pourquoi parler de la joie et la présenter comme un devoir ?
Parce que la joie est la seule façon de changer les comportements et d’aller vers la terre promise d’une société de libertés. « Pourquoi pleurer comme une femme sur un royaume que tu n’as pas su défendre comme un homme ? » (propos tenu en 1472, dit-on, par Aixa Fatima à son fils le roi Boabdil qui venait d’être chassé de Grenade par Isabelle la Catholique).
Il me semble que trop de gens aujourd’hui se complaisent dans la complainte, eût-elle des arguments sérieux à faire valoir. Pour ceux qui veulent réellement que la France se libère de ses vieux démons de l’étatisme, du jacobinisme, du laïcisme, du nationalisme, ils ne peuvent se satisfaire de hurler avec les loups.
Je l’ai déjà dit : les hommes politiques et la presse d’opposition croient assumer leur mission en multipliant les critiques et les attaques contre la gauche au pouvoir, contre les idées dominantes. C’est facile, c’est sans doute à terme électoralement parlant, encore que la répartition des bénéfices entre l’UMP et le Front National ne soit pas encore connue. Mais dans leur démarche, il n’y a aucun entrain, aucune innovation. Simplement, ils attendent le moment venu de l’alternance, alors qu’ils devraient travailler à la rupture, brûler eux-mêmes leurs vieux démons, s’affranchir de la pensée unique.
Mais en qui et en quoi mettre son espoir ?
En qui ? En la société civile. Elle ose maintenant défier le pouvoir. La manif est pour tous. Elle est dans la rue, elle ne s’exprime pas en brandissant les drapeaux rouges de la haine et de la lutte des classes, mais les étendards de la famille : un homme, une femme et des enfants. Elle est calme et déterminée, elle oppose la sérénité à la duperie, au scandale, voire même à la violence des forces de l’ordre qui ont reçu consigne de les traiter chaque jour comme des criminels. Peu à peu, inexorablement, la société civile va s’organiser. J’ai lancé le principe des « Forums des libertés », de rencontres informelles de citoyens désireux de s’unir et se conforter en préparant la rupture. L’expérience démarre avec lenteur, mais avec détermination, et les forums vont se multiplier pour peu que vous y croyiez, et que vous en preniez vous-mêmes l’initiative.
En quoi espérer ? En des projets, en des programmes qui ont permis à de nombreux peuples de sortir des ténèbres en retrouvant les lumières de la liberté. J’évoquais la semaine dernière le miracle anglais des années 1980, porté par Margaret Thatcher, elle-même portée par sa foi libérale. Mais peu après, l’Amérique était de retour avec Reagan. Puis les révolutions de velours ont abattu le communisme en Europe Centrale et de l’Est. Plus près de nous encore, le Canada, l’Australie, la Nouvelle Zélande rompaient avec l’État providence. Et ces toutes dernières années la Suède et l’Allemagne les imitaient.
Tous ces peuples étaient devenus tristes. Tous ces gens n’avaient plus la possibilité ni l’envie de mener leur vie. Puis soudain, un désir de joie les a saisis, ils ont pris leur destin en mains, brisé les chaînes politiques, bureaucratiques, pour affirmer leur droit à la liberté.
C’est à notre tour de retrouver la joie. Nous ne rassurerons ni n’entraînerons les Français, et notamment les jeunes, en pleurant sur le déclin du pays et les malheurs qui nous attendent. Les jeunes fuient déjà vers l’étranger ou s’enfoncent dans le néant. Spectateurs critiques ou acteurs responsables ? Bonne question de Christian Saint-Étienne.
Pour agir, pour préparer l’avenir, il nous faut de la joie. « La vérité vaincra » : j’ai fait mien ce slogan des Polonais écrasés par la dictature soviétique. L’espérance se nourrit dans la joie. Potion magique : écoutez Charles Trenet, ou des dialogues d’Audiard, ou des disques du Splendid : Y a d’la joie, qu’est-ce qu’on attend pour être heureux, Madame la Marquise…
Ce n’est pas facile, comme le rappelait Péguy qui traitait des trois vertus théologales : foi, espérance et charité. « C’est la foi qui est facile et de ne pas croire qui serait impossible. C’est la charité qui est facile et de ne pas aimer qui serait impossible. Mais c’est d’espérer qui est difficile. Et le facile et la pente est de désespérer et c’est la grande tentation. »
Ne cédons pas à la tentation. Assumons notre devoir de joie.
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