mercredi 28 novembre 2012
UMP : Sarkozy en anesthésiste réanimateur ?
UMP : Sarkozy en anesthésiste réanimateur ?
Pour la troisième fois, Jean-François Copé, s’appuyant sur le
recomptage de la Commission nationale des recours – celle que les
internautes appellent la « Conar » – s’est autoproclamé vainqueur de
l’élection du 18 novembre dernier, avec 952 voix d’avance sur son adversaire.
Résultat aussitôt contesté par François Fillon qui parle d’un nouveau
« coup de force » tandis qu’Alain Juppé estime, en haussant les épaules,
que « rien n’est réglé ». Au sein du mouvement des voix de plus
en plus nombreuses s’élèvent pour réclamer l’annulation du scrutin
litigieux. Dont celle de Nicolas Sarkozy.
Après l’échec du parrain de Bordeaux, et alors que Fillon confirmait
lundi matin son intention de porter l’affaire devant la justice, les
sympathisants de l’UMP n’espèrent plus, en
dernier recours, qu’en l’intervention du parrain des parrains : Nicolas
Sarkozy. Celui-ci, vu l’état calamiteux dans lequel se trouve
aujourd’hui l’appareil qui le porta au pouvoir en 2007, apparaît plutôt
comme une sorte d’anesthésiste réanimateur de la dernière chance.
D’abord anesthésier les deux frappadingues déchaînés qui cassent tout
autour d’eux. Panser ensuite les blessures et soigner les traumatismes.
Puis sortir doucement de son coma politique un parti multifracturé en
évitant qu’il ne claque sur le billard. Opération délicate. Le docteur
Sarkozy hésite semble-t-il à entrer dans le bloc chirurgical. Il a
néanmoins déjeuné lundi avec François Fillon. Déjeuner paraît-il prévu
de longue date, au cours duquel chef de l’Etat a essayé de dissuader son
ex-Premier ministre d’en appeler à ces juges que lui exècre. Nicolas
Sarkozy s’est aussi fait le porte-parole, entre la poire et le fromage,
de ceux qui réclament une nouvelle « votation », comme disent nos
voisins suisses.
Que restera-t-il de l’UMP ?
En attendant, le pandémonium électoral dans lequel se trouve l’UMP
continue de flamber. Pendant que l’ex-président de la République et son
ancien Premier cassaient la croûte, l’huissier que l’avocat de François
Fillon avait cru bon d’envoyer au siège de l’UMP pour saisir des documents se faisait virer comme un malpropre par les partisans du président autoproclamé. « Qui veut être modéré parmi les furieux s’expose à leur furie. »
Ce n’est pas Juppé qui dira le contraire. La fureur qui anime Fillon et
Copé semble être en outre aussi contagieuse que dévastatrice. A côté de
la vendetta des deux jusqu’au-boutistes de l’UMP,
le clan des bergers-braqueurs de Venzolasca ou le gang de la Brise de
mer font figure d’organisations de babas cool un peu querelleurs…
Un hebdomadaire, daté de jeudi dernier, titrait : « Et le vainqueur est… Nicolas Sarkozy ». Avec cette explication en sous-titre : « Copé l’a emporté sur le fil mais le chaos à l’UMP renforce l’ex président… ». Il y a huit jours on pouvait effectivement penser cela. Mais depuis, à l’UMP,
le tohu-bohu, en s’amplifiant, a quasiment saccagé le parti. Dans
l’hypothèse où Nicolas Sarkozy envisagerait un retour en politique,
actuellement bien trop prématuré, il faudrait qu’il puisse s’appuyer sur
un appareil en bon état de marche. Ce n’est plus le cas aujourd’hui,
surtout si l’UMP poursuit son auto-destruction. Celle-ci, pour l’instant, ne fait qu’un seul vainqueur : François Hollande.
Selon certains de ses proches, Sarkozy prévoit qu’en 2014, aux
prochaines élections municipales, le Front national va « faire un
tabac ». Battus et démoralisés, les responsables de l’UMP
feraient alors appel à lui. Donc, que les électeurs nostalgiques de
Nicolas Sarkozy votent massivement pour le FN. Après, comme disait hier
François Fillon, on verra bien.
Au-dessus de la mêlée
Un correspondant, dont je respecte l’anonymat qu’il souhaite conserver, m’écrit : « Lecteur de Présent et abonné depuis le numéro un, je suis sidéré par votre article “Et maintenant ?” (Présent du jeudi 22 novembre). » Sidéré
parce que j’évoquais quelques magouilles du camp Copé. Sans cacher du
reste celles du camp d’en face. Ce lecteur mécontent cite dans sa lettre
un exemple d’irrégularité flagrante commise par une élue fillonniste.
« Alors s’il vous plaît, ne soyez pas partisan dans cette affaire… »
Je me garderai bien de l’être. En tant qu’électeur de la droite
nationale, je me sens au-dessus de cette mêlée pleine de confusion où la
droite libérale se discrédite. J’observe avec désolation, mais sans
surprise aucune (les connaissant depuis longtemps), ce que sont dans la
réalité les mœurs délétères d’un grand parti politique dont les leaders
se plaisent, en temps ordinaire, à stigmatiser, et sur quel ton de
mépris, les électeurs nationaux, leur donnant à chaque occasion des
leçons de « morale républicaine » et de « démocratie ». Alors que ces
tartufes, dans leurs formations politiques, outragent la première et
ridiculisent la seconde. C’est donc avec impartialité, mais non sans
ironie, que j’observe le spectacle affligeant que nous donne cette
droite tordue dont la « morale » est en quelque sorte : faites ce que je
vous dis, surtout pas ce que je fais.
Fillon : un homme dans tous ses états
Néanmoins j’ai aussi souligné le dynamisme de la campagne de
Jean-François Copé. Sa « droite décomplexée » a marché auprès des
militants, au point de le mettre à égalité avec François Fillon,
pourtant « nimbé de son aura de Premier ministre » et donné archi-favori
par les sondages. Une militante UMP, favorable à Copé, estimait d’ailleurs dans Le Monde
daté de lundi : « On a besoin d’un guerrier comme Copé pour mener la
campagne en 2014, puis en 2017. Lui seul me donne envie de me lever tôt
pour aller tracter sur les marchés. Fillon n’est pas solide. (…) Avoir
été durant cinq ans à Matignon et venir pleurer à la télé parce qu’il a
perdu, pour sûr ce n’est pas digne ! Fillon n’est pas un homme d’Etat.
C’est un homme dans tous ses états. »
Ce jugement sévère reflète sans doute un courant en train de se développer chez les militants de l’UMP. Comme le constatait justement Guillaume Roquette dans son éditorial du Figaro-magazine : « Copé
a misé toute sa campagne sur des prises de position tranchées, en
particulier sur l’immigration : c’est sur elles qu’il a gagné. Les
adhérents du principal parti de droite ont des convictions de droite :
quelle surprise ! Qui s’étonne que depuis François Mitterrand le PS ait
toujours été conquis par la gauche ? »
Sans illusion sur les positions de Copé qui relèvent de la posture,
sachant très bien que ses discours sont construits sur des « éléments de
langage » plus que sur ses propres convictions, je n’en reconnais pas
moins sa performance. Il a employé, contre les ukases en vigueur, des
mots que nos compatriotes ont aujourd’hui envie d’entendre…
Personnellement je m’en réjouis.
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