vendredi 12 octobre 2012
Traité budgétaire et règle d’or
Traité budgétaire et règle d’or
C’est donc par une majorité écrasante que l’Assemblée nationale a
adopté aussi bien le traité budgétaire européen ou Pacte de stabilité –
c’était mardi – que, mercredi, la loi organique qui confie aux lois de
programmation pluriannuelle le soin de mettre en œuvre la « règle d’or »
que le traité impose : limiter le plus vite possible le déficit public
« structurel » à 0,5 % du PIB. Par la même
occasion on met en place une nouvelle structure – pas gratuite,
forcément –, un Haut conseil des finances publiques.
Le traité a été adopté par 477 voix pour, 70 contre et 21
abstentions, 9 députés n’ayant pas pris part au vote, ce qui veut dire
que l’écrasante majorité des élus PS et UMP
ont été d’accord pour signer ce texte lourd de conséquences pour le
pouvoir de décision de la France et sa souveraineté budgétaire et
économique. Cela ne fait pas disparaître les différences d’approche ni
la capacité de nuisance, mais montre une convergence de fond.
La règle d’or a rencontré encore moins de résistance : 490 voix pour, 34 contre et 18 abstentions.
François Hollande a salué l’approbation massive d’un traité qui
« permet à la fois d’avoir de la stabilité, de la discipline, du sérieux
mais aussi de la croissance », ajoutant que « cette majorité ample
donnera à la France une capacité supplémentaire de faire entendre sa
voix, c’est-à-dire nous permettra d’avancer sur la réorientation de
l’Europe qu’(il a) engagée » depuis son élection. Rendons-lui au moins
la justice de ne pas croire qu’il croit ce qu’il dit…
Dès mercredi, le traité était présenté au Sénat et devait être
adopté ce jeudi avec l’apport des voix de droite. François Rebsamen,
chef de file des sénateurs socialistes, a soutenu que « nous sommes dans
une autre démarche, une approche nouvelle de l’avenir européen », car,
dit-il, le traité « ne comporte aucune contrainte sur le niveau de la
dépense publique, autre que celui que la France s’est fixée à elle-même
pour redresser notre pays ». Traduisez : l’Europe n’empêchera pas les
Etats de dépenser toujours plus, ne mettra pas fin à l’intolérable poids
des prélèvements obligatoires qui, sous Hollande, est en train de
s’envoler alors qu’il était déjà arrivé à des niveaux « insoutenables »,
pour reprendre un mot à la mode. Les divers prélèvements obligatoires
représentent chaque année près de la moitié de la richesse créée…
A ce niveau-là – en admettant pour un instant l’hypothèse que le
contrôle européen là-dessus soit acceptable – rien ne sera donc changé.
L’incantation, elle, aura été le maître mot des débats. On nous
annonçait la catastrophe, le cataclysme, l’apocalypse en cas de rejet du
traité – même Laurent Fabius qui avait été le chef de file des
« nonistes » PS lors du référendum sur la constitution européenne à un
moment où d’autres se chargeaient de dire que le « non » à l’Europe
serait catastrophique, cataclysmique, apocalyptique.
Le traité lui-même rappelle furieusement les promesses qui avaient accompagné la mise en place de l’euro.
« Par le présent traité, les parties contractantes conviennent,
en tant qu’Etat membres de l’Union européenne, de renforcer le pilier
économique de l’Union économique et monétaire en adoptant un ensemble de
règles destinées à favoriser la discipline budgétaire au moyen d’un
pacte budgétaire, à renforcer la coordination de leurs politiques
économiques et à améliorer la gouvernance de la zone euro, en soutenant
ainsi la réalisation des objectifs de l’Union européenne en matière de
croissance durable, d’emploi, de compétitivité et de cohésion sociale »
, stipule son premier article.
Le lamentable flop de l’euro qui a fait en une décennie de
l’euro-zone la région du monde avec la croissance la plus étique va
pouvoir se reproduire.
Croyez bien, d’ailleurs, que l’objectif du traité n’est pas de
relancer l’économie de l’Europe et de remettre celle-ci sur la voie de
la croissance, mais de « renforcer la coordination » des politiques
économiques et d’« améliorer la gouvernance de la zone euro », ce qui à
la lecture du traité se traduit par une tutelle très alourdie et des
pouvoirs de sanction effectifs sur les Etats membres, ainsi qu’un
contrôle a priori et a posteriori de leurs décisions et
plans économiques, notamment lorsqu’ils s’écartent des normes de déficit
mises en place. Il est beaucoup question de « coordination », mais ce
sont les institutions de l’Union européenne qui sont chargées de la
mener (article 11).
Et, cerise sur le gâteau, l’UE elle-même n’est pas liée par les dispositions du traité : « Le
présent traité s’applique dans la mesure où il est compatible avec les
traités sur lesquels l’Union européenne est fondée et avec le droit de
l’Union européenne. Il ne porte pas atteinte aux compétences conférées à
l’Union pour agir dans le domaine de l’union économique. »
Il faut distinguer deux choses dans cette affaire. Le principe d’une
saine gestion des budgets nationaux, évitant les endettements
excessifs, est une chose : qui peut le contester… sinon les
gouvernements successifs qui ont gonflé les dépenses de l’Etat, tout en
maintenant une gabegie que le traité n’empêchera pas, et une politique
de contraction de population qui est à la racine de la crise. Les moyens
pour contrôler, sinon empêcher le recours au déficit en sont une
autre : et là l’alignement comme à la parade des économies très
disparates de l’Union, doublé d’une confiscation planifiée des
indépendances et souverainetés nationales, sont pour le coup hautement
contestables, et pas seulement parce qu’ils se sont déjà révélés
inopérants.
Devant une Assemblée plus que clairsemée, lundi soir, Marion Le Pen
avait souligné ces faits, sous le regard volontairement goguenard des
rares députés présents.
Après le vote, Véronique Besse a commenté :
« L’Assemblée
nationale vient de se saborder ; elle vient de perdre un de ses derniers
pouvoirs. La France est désormais sous la tutelle financière des
technocrates de Bruxelles. Les Français, par la voix de leurs
représentants, ne pourront plus décider librement de leur destin. Par
ailleurs, le gouvernement s’est trompé de priorité : la priorité,
c’était l’équilibre des finances publiques par la lutte contre la
fraude, la lutte contre le gaspillage et une cure d’amaigrissement du
fonctionnement de l’Etat (…). Nous sommes définitivement liés à la
faillite grecque au sein d’une Europe passoire qui ne nous protège
pas. »
Devant des besoins en matière de pensions et de dépenses de soins
qui ne vont cesser d’augmenter avec le vieillissement des populations et
la contraction de la population active au sein de l’Union européenne et
spécialement dans la zone euro, l’effondrement se dresse devant nous,
et cette UE qui a systématiquement favorisé la réalité et la mentalité
du refus de la vie n’a de toute façon aucun crédit – sonnant, trébuchant
ou moral – pour nous en sortir.
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