La vie de la gauche au pouvoir passée au laser de Serge
Federbusch. Cette semaine : la charte de déontologie, les énarques du
gouvernement, la pudeur de Médiapart à l'égard de Lionel Jospin...
jeudi 24 mai 2012
Le personnel de la "République hollandaise" est-il vraiment calibré pour faire face à une crise financière majeure ?
La sclérose de la classe dirigeante française a deux origines. D’une part, le système des grands corps administratifs,
qui verrouille les carrières, crée des chasses-gardées pour les uns et
des plafonds de verre pour les autres. D’autre part, celui des élus à vie
qui portent les serviettes de leurs aînés en débutant comme assistants
parlementaires puis élus locaux et nationaux. N’ayant connu d’autre
métier que celui de la politique, ils sont hautement fragiles en cas de
perte de leurs mandats et peu enclins à prendre des décisions difficiles
ou à s’opposer aux consignes venues d’en haut.
Certains
individus appartiennent aux deux groupes : fonctionnaires très peu de
temps, élus professionnels ensuite ; François Hollande en est un parfait
exemple, comme Laurent Fabius ou Pierre Moscovici.
Quand
on observe dans le détail la composition du cabinet du nouveau
président et celle du gouvernement, on se rend compte que ces deux
filières trustent quasiment 100 % des emplois de direction - politiques
et administratifs - de l’Etat : à l’Elysée, que des énarques ou presque ; au gouvernement, que des élus à vie ou presque.
On confie à Emmanuel Macron, un inspecteur des finances de 34 ans qui a
pantouflé deux ans dans une banque d’affaires, le suivi névralgique des
questions économiques et financières quand, dans l’entourage d’Obama
par exemple, des universitaires et banquiers chevronnés assument ou ont
assumé le rôle de conseiller sur ces sujets. Que pèse-t-on face à un
ancien président d’Harvard comme Lawrence Summers ou un ancien président
de la Fed, comme Paul Volcker, quand on quitte à peine les langes de
Bercy ?
Bref, la république «hollandaise» va
devoir lutter contre un virus avec l’instrument même qui l’a inoculé.
Bon courage la France !
Ainsi
donc, président, Premier ministre, ministres et quasi-ministres ont
signé une «charte de déontologie» et se voient soumis à une baisse de
leurs traitements de 30%. Inutile de rappeler que, du fait de la
disparition des secrétaires d’Etat, les économies budgétaires
seront infinitésimales au regard des dépenses publiques : un
six-centième environ du seul coût de l’augmentation de l’allocation de
rentrée scolaire. Ces mesures ont essentiellement un objectif
de communication. Quant à la charte de déontologie, elle ne peut que
rappeler des règles qui existent déjà dans les textes, sauf à être
illégale.
Ne négligeons pas pour autant ces
effets d’annonce. Car qu’est-ce qu’un «exemple» s’il n’est pas destiné à
être suivi par d’autres et à caler les comportements de tous sur une
norme forgée pour quelques uns ? Bref, dans la panade budgétaire
actuelle, il sera plus facile dans quelques années, si ce n’est même
quelques mois, de demander aux hauts fonctionnaires d’abord, puis aux
autres, de suivre ce fameux exemple. Pourquoi refuseraient-ils
ce qu’en haut lieu les dirigeants se sont imposés à eux-mêmes ? Ce
serait bien égoïste. Fonctionnaires socialistes, gare à vos primes !
Ferdinand Lop voulait prolonger le boulevard Saint Michel jusqu’à la mer. François Hollande est plus modeste : la composition du gouvernement Ayrault prouve qu’il entend simplement prolonger la rue de Solférino jusqu’à Matignon. Mais, à la différence de Lop, il est parvenu à ses fins.
Après
avoir, des mois durant, fait des gorges et des tribunes chaudes de
l’affaire Karachi, où la responsabilité de Nicolas Sarkozy était
quasiment établie - aux dires de ces parangons de vertu journalistique -
par le seul fait qu’il était porte-parole d’Edouard Balladur et
ministre du Budget, voilà soudain, consternation, que les enquêteurs de ce site nous apprennent que Lionel Jospin avait validé, en avril 1998, : « la poursuite de l’exécution du contrat » malgré l’existence de « circuits de financement suspects » et que «la justice ne sera (donc) jamais saisie». Bref,
la responsabilité du «grand frisé de l’île de Ré» ne paraît, de prime
abord, en aucun cas moindre que l’éventuelle implication de Sarkozy dans
l’enterrement de cette affaire. Pourtant, c’est un petit
article, au contenu payant, perdu en fin de page d’accueil qui nous
l’apprend. Cette pudeur fait chaud au cœur.
Candidate
à la fonction de présidente de la République, Eva Joly, toute de
lucidité, avait déjà rabattu ses ambitions sur celle de Garde des
Sceaux, à la faveur d’une pétition opportune. Puis elle a fait savoir
qu’elle se verrait bien siéger au Conseil constitutionnel. Voilà
maintenant qu’elle dit son intérêt pour un rôle de «Haut commissaire à
la réforme financière». La fin d’une errance professionnelle douloureuse ?
Banquiers et hommes d’affaires bientôt réformés par ce juge condamné
pour diffamation n’ont qu’à bien se tenir. La France prépare l’avenir.
On
a déjà entendu cette antienne après la Première Guerre mondiale, sans
grand succès. On la réécoute aujourd’hui, emballée dans le vocabulaire
technique des euro-bonds, project bonds et autres «mobilisation de fonds
structurels». La question est en réalité simple : après s’être saignés
aux quatre veines pour renflouer les länder de l’Est, les Allemands
prendront-ils le risque de flamber leur épargne pour aider sans fin les
Grecs et les Espagnols et permettre à François Hollande de ne pas
réformer sa république pléthorique ? Mon petit doigt me dit : «nein».
Les
folliculaires journalistico-socialistes qui prennent leurs désirs pour
des réalités en annonçant qu’une Angela Merkel fragilisée politiquement
va devoir se rapprocher des demandes françaises vont vers de graves
déconvenues. Tout comme Sarkozy en France, la candidate
libérale-conservatrice qui prépare les élections de septembre 2013 au
Bundestag a au contraire intérêt à se démarquer des thèses dépensières
de la «gauche» française.
L’échec d’Hollande servirait de contre-exemple à son opinion publique.
L’économie allemande se portant mieux que celle de la France, Angela a
des chances sérieuses de continuer à chagriner notre président quelques
années.
François
Hollande est un garçon intelligent et madré ainsi qu’un fin manœuvrier.
Il se doute bien que les Allemands ne lui feront aucun cadeau. Et il a
intérêt à préparer d’urgence le scénario d’un éclatement de la zone euro
dont il éviterait de porter la responsabilité. Ce sera le rôle de l’opposition de bien montrer que ses esquives et ses subterfuges seront l’une des causes majeures de la débâcle.
Taubira, celle par qui Jospin a en partie chu en 2002 ?
Fabius, celui par qui le «non» l’a emporté en 2005 ?
Les voilà spectaculairement réhabilités. Il
faut dire que le premier secrétaire du PS de l’époque avait réussi à
échapper à toute sanction politique après ces deux gamelles
retentissantes. Comment s’appelait-il déjà ?
Quelle
meilleure épreuve sportive au programme de réinsertion voulu par la
nouvelle Garde des Sceaux que le jet de poudre d’escampette ?
Le détenu qui s’est carapaté lors d'un challenge de basket réunissant
détenus et personnel pénitentiaire à Paris-Bercy en présence de
Christine Taubira était membre de l’UMP ou quoi ?
Pour finir sur une note légère, grivoise et bien française, ce
«redressement productif» confié à Montebourg, n’est-il pas une tâche
tellement importante qu’il eût plutôt fallu la donner à un personnage de
premier plan qui a fait ses preuves en ce domaine jusqu’aux États-Unis ? Devinez : son prénom commence par D ...
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