Quoi de plus détesté par tous nos politiques pendant la
campagne présidentielle que « les riches », désignés en ennemis à la
vindicte populaire. Pour comprendre, nous avons interrogé Frédéric
George-Tudo, auteur de Salauds de Riches ! (Bourin, 2012), dans lequel il analyse les mythes sur les riches, les pauvres ou les inégalités.
Pourquoi avez-vous eu envie d’écrire un tel livre ?
Atterré par tout ce que j’entendais chaque jour dans les médias sur
les riches, l’idée m’est venue début 2011. J’ai été bien inspiré, car
depuis les choses n’ont fait que s’aggraver. À l’approche des élections
présidentielles, la stigmatisation a pris une ampleur inimaginable.
Dans notre pays, le riche est devenu pour l’extrême gauche – et hélas
pour une partie de plus en plus fournie de la gauche dite modérée – ce
que l’étranger est à l’extrême droite : un parfait bouc émissaire. Le
responsable de tous ses malheurs quels qu’ils soient.
Je ne défends pas les riches. Certains sont généreux d’autres égoïstes. Vénaux ou totalement désintéressés. Bref, ils sont comme tout le monde.
En revanche, ce que je défends, c’est le droit de s’enrichir. D’abord parce qu’il n’y a rien de moralement condamnable à s’enrichir. Ensuite, parce que c’est bon pour l’économie. Une société qui confisque les fruits de l’enrichissement est une société dans laquelle tout le monde est assuré de souffrir, en particulier les plus pauvres. Notamment à travers le chômage qui ne peut qu’exploser dès lors que l’on décourage l’entrepreneuriat.
Reste toutefois la question des inégalités qui sévissent dans notre pays…
D’abord, comme je le démontre dans mon livre, les inégalités sont d’une étonnante stabilité en France depuis 30 ans. Bien sûr qu’il convient de venir en aide aux vrais nécessiteux. Mais l’égalitarisme ce n’est pas du tout cela. C’est une logique qui revient à refuser les inégalités liées au mérite.
En outre, j’aimerais comprendre comment il est possible de réclamer plus d’égalité entre les Français tout en parvenant à trouver le sommeil face aux écarts monumentaux entre les pays du Nord et les pays du Sud. Nous sommes là dans un cas typique de générosité à géométrie variable. Oui, au partage des revenus imposé quand j’en suis le bénéficiaire, point trop n’en faut lorsque c’est à mon tour de mettre la main au porte monnaie. Bref, il est toujours plus facile d’être généreux avec l’argent des autres…
Mais surtout, je le proclame haut et fort : vive les inégalités ! Prenons l’exemple éloquent de la Chine. Depuis la libéralisation de Deng Xiaoping entamée en 1981, les disparités de revenus ont explosé. Dans le même temps, la population vivant avec 3 dollars par jour est passée de 95% à moins de 33%. Tout est dit.
Plus que les entrepreneurs, n’est ce pas avant tout les héritiers et les rentiers que les français montrent du doigt ?
C’est faux, les Français n’aiment pas davantage les entrepreneurs que les héritiers. Ou plutôt ils aiment uniquement les entrepreneurs en difficulté. Vive le petit patron qui trime 70 heures par semaine et qui ne s’en sort pas. Honte au capitaine d’industrie prospère. Ce sont pourtant les mêmes à la base. Le gros n’est rien d’autre qu’un petit qui a réussi. Qu’y a-t-il donc d’obscène à voir le compte en banque de celui qui a vendu 100 milliards de clous, mille fois plus garni que celui qui n’en a vendu que 100 millions ?
Revenons aux héritiers. Selon quel fondement vertueux un individu ne pourrait pas être autorisé à transmettre aux siens ce qu’il a mis toute une vie à acquérir ? Libre à chacun de tout donner à une fondation, bien sûr. Mais à condition de conserver la possibilité de choisir la trace que l’on souhaite laisser.
D’une manière générale, prenons garde à ce populisme qui consiste à décerner les bons et les mauvais points. Le bon riche qui crée des emplois et le mauvais qui n’en crée pas. Il est certes judicieux d’encourager l’entrepreneuriat, mais ce n’est pas une excuse pour punir les autres. En la matière, le seul distinguo concerne ceux qui se sont enrichis honnêtement et les autres.
Comment expliquez-vous que la France stigmatise à ce point ceux qui réussissent ?
Au-delà de raisons historiques et religieuses, notre pays reste profondément marquée par la tentation marxiste. À chaque nouveau sondage, nous apparaissons comme le peuple le plus anticapitaliste du monde. En outre, nous sommes de fervents adeptes de l’État providence chargé d’assurer notre bien être. Lorsque l’on compte sur une force supérieure pour s’occuper de soi, on finit par mépriser l’entrepreneuriat et par extension la richesse.
Ne sous-estimons pas non plus l’influence des grands médias publics. Leur parti pris idéologique plus ou moins larvé oriente les débats dans une direction grossièrement « anti-riches ». On le voit notamment avec leur empressement à nous relayer toutes les contre-vérités des égalitaristes sur le sujet. C’est pourquoi, chiffres incontestables à l’appui, mon livre s’attache à démonter les sept mensonges suivants :
- Il y a de plus en plus de pauvres,
- Les pauvres le sont de plus en plus,
- les inégalités explosent,
- les grandes fortunes paient proportionnellement moins d’impôts que les autres,
- le capital est moins imposé que le travail,
- toujours plus d’argent dans les poches des actionnaires et toujours moins dans celles des salariés,
- les entreprises sont de moins en moins imposées…
Tout n’est pas parfait, bien sûr. Notamment dans notre pays où les hauts fonctionnaires fricotent avec les dirigeants des grandes entreprises. Le capitalisme d’État à la française a créé une endogamie des énarques dans les hautes sphères. Je n’ai rien contre les énarques. Je dis juste qu’il y a un mélange des genres, un petit réseau d’amitiés fidèles qui perturbe le libre fonctionnement de l’économie.
A minima, notre pays n’a rien à gagner à cette consanguinité. Car le risque est grand de voir des renvois d’ascenseurs dans tous les sens. Le libéral que je suis est le dernier à défendre ce type d’enrichissement…
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