lundi 7 mai 2012
Au lendemain de l'élection, comment financer l'économie ?
Les mesures proposées pendant la
campagne ne se révèlent pas à la hauteur des enjeux qui devraient
bouleverser l’épargne et l’investissement dans les années à venir.
Il est regrettable de constater que, dans cette
campagne présidentielle, la compétitivité de l’économie n’a été
essentiellement abordée que du point de vue du travail, alors que la
création de richesse résulte de la rencontre du travail et du capital. Bien
que le « financement de l’économie » soit rentré dans le lexique de la
campagne et s’est trouvé au cœur du volet productif de nombreux
programmes, les mesures proposées ne se révèlent pas à la hauteur des
enjeux qui devraient bouleverser l’épargne et l’investissement dans les
années à venir.
Le
bon système financier n’est pas celui qui va financer le plus de
projets en apportant le plus de capitaux mais celui qui va permettre
d’allouer les ressources financières disponibles aux investissements les
plus bénéfiques pour la suite. Or la France accuse un retard
important en termes d’investissements productifs. L’évolution du nombre
de robots industriels en est le parfait exemple. Le stock de robots
installés au 31 décembre 2010 était plus de quatre fois supérieur en
Allemagne et presque deux fois supérieur en Italie. Rapporté au nombre
de travailleurs dans le secteur manufacturier, les usines françaises
présentaient 104 robots pour 10 000 salariés quand ce rapport était de
161 en Italie et 253 en Allemagne, ces deux pays se classant
respectivement numéro trois et quatre mondiaux pour la densité de robots
industriels.
En
outre si la qualité des infrastructures en France est depuis longtemps
saluée par les experts mondiaux comme facteur d’attractivité du pays, -selon le World Economic Forum,
la France a obtenu le quatrième rang mondial en 2011 faisant suite à la
quatrième place en 2010, troisième en 2009 et deuxième en 2008 - le besoin de financement sera très important pour conserver à un haut niveau les externalités générées par ces infrastructures.
Les montants évoqués à l’échelle de l’Union européenne font état de
1 500 à 2 000 milliards d’euros d’investissements nécessaires d’ici
2020.
La France considérée globalement – sociétés financières, sociétés non financières, ménages et administrations publiques - a
un important besoin de financement externe, proche de 2 % de son PIB,
et doit donc attirer des investisseurs étrangers. Pourtant, la capacité
de financement des ménages reste très forte. Le taux d’épargne
des ménages français a atteint 16,7 % au troisième trimestre 2011, leur
endettement en hausse restant encore inférieur à la moyenne européenne à
82,6 % contre 92 %. Il s’agit de mobiliser cette épargne alors que le
retour à l’équilibre budgétaire des comptes publics devrait
s’accompagner d’un désengagement massif de capitaux aujourd’hui
consacrés au financement de l’économie.
Afin
de réaliser l’adéquation entre les capacités de financement, l’épargne,
et les besoins de financement, l’investissement, des acteurs prennent
la place d’intermédiaires. En Europe et en France, ce sont
principalement les banques qui jouent ce rôle. Or Nicolas Sarkozy avait
fait, lors de ses vœux aux forces économiques de la Nation, le 19
janvier, une allusion aux banques accusées « de ne pas faire leur
travail, de ne pas financer l’économie ». Force est de constater
que l’épargne des investisseurs particuliers s’oriente vers un nombre
assez réduit de produits très liquides et très sécurisés. En
conséquent, la tendance forte des quinze dernières années a été la
diminution du financement à destination des entreprises françaises, qui
captaient 43 % de l’épargne des ménages en 2000 contre moins de 38 % dix
ans plus tard.
L’impact des réformes prudentielles Bâle III pour les banques comme Solvabilité II pour les assureurs sera double :
en termes de qualité du crédit, les banques et assureurs vont de moins
en moins se sentir capable de financer les projets à moyen et long terme
et par là donc les infrastructures et l’automatisation industrielle ;
en termes de quantité du crédit, certains secteurs devraient souffrir
d’une raréfaction du crédit et des financements en fonds propre
auparavant intermédiés.
Aujourd’hui
l’épargne des Français est en effet très intermédiée, à hauteur de 83
%. Or les particuliers sont de plus en plus intéressés par savoir à quoi
est destinée leur épargne, aussi peut-on imaginer une relation plus
désintermédiée à l’avenir, en ouvrant le marché obligataire primaire aux
particuliers. C’est ainsi que la région Auvergne a lancé une
initiative inédite en émettant en octobre 2011 un emprunt obligataire de
20 millions d’euros auprès des Auvergnats pour alimenter le Fonds
d’investissement Auvergne durable (FIAD) assurant le financement des
projets innovants et créateurs d’emplois des TPE et PME auvergnates. De
la même manière, l’Etat italien a annoncé au début du mois de mars 2012
la création d’une obligation « BTP Italia » à destination des
particuliers qui pourront l’acheter directement sur Internet. Indexée
sur l'inflation italienne, donnant lieu à un coupon semestriel avec une
maturité de quatre ans cette obligation a été façonnée pour répondre aux
exigences des épargnants individuels. Le montant minimum de
souscription est 1.000 euros et une prime de fidélité de 4 pour mille du
montant investi sera versée en cas de détention des obligations jusqu’à
leur échéance.
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