TOUT EST DIT

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mercredi 14 mars 2012

Civisme fiscal 

Nicolas Sarkozy a annoncé, lundi soir à la télévision, un renforcement de la lutte contre l'exil fiscal. Une mesure également préconisée par plusieurs autres candidats à la présidentielle. Ce relatif consensus s'appuie sur un fait établi : dans la perspective des prochaines élections, des détenteurs de fortunes, grandes et moins grandes, ont déjà expatrié une part, sinon la totalité, de leurs avoirs en lieu sûr, principalement au Royaume-Uni, en Belgique et en Suisse. Pas d'impôt sur la fortune, pas de taxes sur les revenus locatifs, un prélèvement sur les dividendes bien moins élevé qu'en France : vive l'hospitalité douillette de ces paradis de la finance où l'on peut jouir en paix des fruits de la liberté d'entreprendre, sans que l'État ne vous en « détrousse » honteusement...

Une autre annonce, celle de François Hollande proposant la création d'une tranche d'impôt à 75 % au-delà d'un million d'euros annuel, a convaincu ces grandes fortunes, s'il en était besoin, du bien-fondé et de l'urgence de l'exil vers des cieux plus cléments. On a vu des footballeurs des grands clubs sonner l'alarme et s'indigner d'une telle « spoliation », pendant que d'autres préparaient discrètement leurs bagages pour grossir les rangs de la diaspora des millionnaires en crampons. Selon l'Institut britannique de statistiques, la communauté française au Royaume-Uni serait passée de quelque 38 000 ressortissants en 2001 à 110 000 aujourd'hui. D'autres sources avancent le chiffre de près de 400 000. Et parmi eux, un nombre significatif d'expatriés pour motif financier.
Dizaines de milliards de manque à gagner
Des économistes, parmi les meilleurs experts de la fiscalité, attirent l'attention sur la « sécession fiscale » des plus riches. Sur le traitement de faveur dont ils bénéficient grâce au jeu des niches fiscales dont ils sont souvent les premiers bénéficiaires. On arrive ainsi à ce paradoxe : tous impôts confondus, les classes les plus modestes reversent un pourcentage plus élevé de leurs revenus que les plus aisées. Le manque à gagner pour l'État se chiffre en dizaines de milliards.
Dans le cas des fortunes « délocalisées », il ne s'agit plus simplement de sécession mais, appelons les choses par leur nom, de désertion au coeur de la bataille que mène notre pays pour retrouver la santé de ses finances publiques et maintenir son équilibre social compromis. Une désertion au demeurant fort bancale : en cas de maladie, les mêmes sauront retrouver sans retard le chemin des hôpitaux français et tirer le meilleur avantage de notre Sécurité sociale. Quant à leurs enfants et petits-enfants, ils ne manqueront pas de venir garnir les rangs de nos universités et grandes écoles d'un coût défiant toute concurrence internationale. Et que dire des caisses de retraite où ils n'oublieront pas d'émarger mois après mois ?
Il est urgent de s'interroger sur la citoyenneté effective de ces déserteurs fiscaux. De tirer les conséquences de leur absence de solidarité, de leur oubli de la « dette sociale », qui pèse sur eux comme sur tous les autres, spécialement en ces temps difficiles. C'est une question de civisme et pour tout dire de décence élémentaire.

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