La réalité est vertigineuse. Elle tient en trois chiffres : nous avons plus de 90 milliards de déficits. Pour commencer à s'exonérer du fardeau de la dette, il conviendrait donc d'en rembourser au moins autant chaque année. Dans l'idéal, le pouvoir devrait trouver environ 200 milliards de dépenses en moins et/ou de recettes en plus, pour retrouver toute sa marge de manoeuvre.
La solution est compliquée. Pour tous les présidentiables. Minimiser le passif ou s'acharner contre les prétendues faiblesses de François Hollande n'est d'aucune utilité. Noircir le bilan ne ferait que déprimer un peu plus les Français. Disserter sur la responsabilité respective de la crise, des pouvoirs précédents et de la gestion Sarkozy n'offre pas de travail à nos 2,8 millions de chômeurs.
La solution est économiquement lourde. Sabrer la dépense ou alourdir les prélèvements peut plonger le pays dans la récession et tuer le malade que l'on prétend guérir. Elle est politiquement périlleuse et risque de faire voler en éclats tout pouvoir qui tenterait de gouverner seul contre tous et sur des critères injustes.
François Hollande proposera, ce matin, de stabiliser la dépense publique - pas de politique nouvelle qui ne soit pas financée - et de prélever 30 milliards de charges et impôts nouveaux. À ce niveau d'effort, supporté essentiellement par les hauts revenus, il évite la récession. Mais sans croissance, sans relance européenne, ce chiffre n'est pas à la hauteur des besoins.
Sans projet présidentiel connu pour l'instant, on ignore l'ampleur de ce qu'imagine Nicolas Sarkozy. L'addition des budgets supplémentaires et des plans de rigueur récemment votés rend déjà la facture salée. Dimanche, il annoncera des mesures d'urgence, entre autres l'impopulaire transfert vers la TVA de 35 milliards de charges. Mais la compétitivité est une plante à croissance lente, qu'il aurait fallu arroser hier pour qu'elle rapporte quelques fruits au moment où le pays manque de vitamines.
François Bayrou propose de baisser la dépense de 50 milliards et d'accroître la recette d'autant. Encore imprécis dans la déclinaison de son projet et incertain dans sa capacité politique à le mettre en oeuvre, il offre une perspective - beaucoup de rigueur et un peu de relance - proportionnée à l'enjeu.
Quel que soit le... malheureux élu, la solution est à haut risque politique. L'ampleur des remises en cause permet d'anticiper qu'il ne suffira pas de décréter, en haut lieu, un plan d'énarque pour que les Français s'y conforment docilement. De convoquer un sommet social de deux heures ou de faire payer les riches pour que tout soit réglé. Ni de lâcher, au Bourget, des déclarations qui ne se transformeraient pas en preuves d'amour.
Sans méthode, le courage serait synonyme de suicide politique. Pour offrir le meilleur service public au moindre coût, pour trouver un juste équilibre contributif entre la production, la rente et la spéculation, pour fluidifier le marché du travail, il faudra avoir l'humilité d'écouter, l'intelligence de coopérer et la force d'arbitrer. Pour que de la contrainte naisse l'innovation !
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