lundi 14 novembre 2011
Le ver est dans le fruit
Pour la gauche, c’est déjà l’épreuve de vérité. La voilà contrainte de sortir de la si confortable opposition, ce territoire hospitalier où les contestations les plus hétéroclites peuvent cohabiter sans rien partager. La conquête du pouvoir met tout à coup en pleine lumière des contradictions si profondes entre le PS et les Verts, mais aussi entre les socialistes eux-mêmes, qu’elles font douter de leur aptitude à construire ensemble un destin commun.
La faiblesse de Nicolas Sarkozy est, paradoxalement, un poison hautement corrosif qui depuis plusieurs mois dissout lentement et sûrement les rivets de… l’antisarkozysme. Désolidarisée, la gauche se retrouve aujourd’hui seule face à elle-même, obligée de recoller les morceaux d’une introuvable cohérence à moins de six mois de la présidentielle. Comment pourra-t-elle y parvenir de façon satisfaisante à chaud quand elle n’a pas été capable de le faire à froid quand le calendrier lui était encore aimable ?
Comme prévu, le dossier du nucléaire s’avère hautement contaminant pour disséminer les divisions tant sa densité idéologique est élevée. La réflexion de civilisation qu’il suppose supporte mal les accommodements : soit on accepte (en le maîtrisant) le risque que fait peser l’atome sur les générations futures au nom du réalisme imposé par la crise, soit on le refuse catégoriquement au nom d’une certaine idée de l’avenir de l’humanité. Le choix du court terme contre le long terme. Mais de moyen terme, point. La question du nucléaire est indivisible, chacun le sent bien, et plus encore depuis Fukushima. Aucune coalition politique sérieuse ne peut prétendre la soumettre à un compromis sans donner le sentiment de tromper les électeurs en masquant un désaccord fondamental.
Les négociations EELV-PS sur le sujet ont toutes les chances de pourrir les relations entre les deux formations jusqu’à l’échéance. Elles renvoient une image désespérante de l’affrontement entre deux cultures difficiles à fusionner, et un instantané dérisoire et si peu durable des marchandages pour les investitures. Le ver est dans le fruit avant même que la pomme soit croquée.
L’intransigeance personnelle d’Eva Joly n’arrange rien mais la certitude catégorique de François Hollande non plus. Les amis de l’une et les camarades de l’autre peinent à dessiner le futur énergétique de la France dans un demi-siècle. Quant à la droite, elle a moins d’états d’âmes mais pas davantage de vision. Un désert angoissant dans lequel les peurs de la crise rôdent plus que jamais en maîtresses des lieux.
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