L'été, saison du dépaysement : le nombre des touristes internationaux a quasi doublé depuis quinze ans. Pour ces millions de terriens que leur curiosité pousse à franchir les frontières, les musées font souvent partie des escales obligées : de plus en plus d'admirateurs pour le buste de Néfertiti au Neues Museum, pour la frise des Panathénées au British Museum. Mais pourquoi le premier se trouve-t-il à Berlin et non au Caire, la seconde à Londres et non à Athènes - où une place lui est d'ailleurs réservée dans le nouveau musée construit au pied de l'Acropole ? La restitution des oeuvres à leur pays d'origine, réclamée par un nombre croissant d'Etats, de la Chine à l'Amérique latine, devient une source d'affrontements diplomatiques parfois virulents. Pour beaucoup de peuples qui ont une revanche à prendre sur l'histoire, le retour au bercail de ces prestigieux témoins de leur passé met en jeu la fierté nationale. Il soulève deux questions.
La première tient au statut même des oeuvres : les grands musées européens ou américains font valoir qu'elles appartiennent au « patrimoine universel », et que c'est entre leurs murs qu'elles sont le mieux protégées et entretenues. Ce dernier argument est recevable quand on pense aux ravages commis en Chine par la révolution culturelle, au Cambodge par les Khmers rouges (et encore aujourd'hui par les pilleurs de sites), ou bien en Afghanistan par les talibans. Mais il ne peut plus être opposé à la Chine actuelle ni à d'autres pays émergents.
La deuxième question est celle de la régularité des acquisitions, de plus en plus épineuse à mesure qu'on remonte dans le temps : la Grèce réclame la frise du Parthénon, « achetée » par Lord Elgin -mais à l'époque où le pays appartenait à l'empire ottoman…
Quoi qu'il en soit, les restitutions se multiplient à travers la planète, ce qui fait monter encore la pression des pays demandeurs. Leurs revendications sont certes compréhensibles - mais que serait un monde où chaque culture se replierait jalousement sur son propre patrimoine ?
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