Eric Woerth a annoncé hier le gel du point d'indice en 2011. Aucune augmentation n'est programmée pour 2012 et 2013, même si un nouveau rendez-vous aura lieu. La hausse de 0,5 % du 1 er juillet est maintenue. Les syndicats sont furieux.
Régime sec pour les fonctionnaires. Hier, lors de la seconde séance de négociations salariales 2011-2013, Eric Woerth, ministre de la Fonction publique, et Georges Tron, son secrétaire d'Etat, ont annoncé le gel du point d'indice (base de calcul du salaire des fonctionnaires) en 2011. Une telle stagnation constitue une première depuis 2003 (voir graphique). Et pour 2012 et 2013, aucune hausse n'est programmée à ce stade. « Pour les années ultérieures [à 2011], les rendez-vous annuels, prévus dans les accords de février 2008, permettront de déterminer l'évolution du point, compte tenu de la situation économique », indiquent simplement les ministres. Si la porte n'est pas formellement fermée, il faudrait une improbable reprise économique (plus rapide que ne le prévoit le gouvernement) ou une consolidation budgétaire spectaculaire pour que ces deux années ne soient pas marquées par un nouveau gel du point. L'intersyndicale ne se fait pas d'illusions. Dans une déclaration commune, elle estime que les discussions « 2012 et 2013 sont d'ores et déjà placées sous de sombres auspices ».
« Epreuve de force »
Concrètement, les 5,2 millions de fonctionnaires ne bénéficieront donc d'aucune augmentation générale l'année prochaine. Dans un contexte de rigueur budgétaire, cette ligne était pressentie depuis plusieurs semaines. Elle entraînera des économies importantes : une hausse de 0,8 % du point d'indice, comme consentie en 2007, 2008 et 2009, coûte environ 600 millions d'euros par an au seul Etat employeur. Seule « concession » : après avoir été tenté de revenir dessus, le gouvernement a maintenu la hausse de 0,5 % programmée depuis 2008 pour cette année. Elle entrera en vigueur, comme prévue, sur les salaires versés fin juillet.
Les syndicats sont furieux. « Le gouvernement choisit l'épreuve de force. La RGPP, la réforme des retraites, les départs non remplacés et maintenant les salaires ! Tout s'accumule et on est désormais sur un scénario d'affrontement majeur », prévient la CGT. Ils dénoncent des « pertes programmées de pouvoir d'achat », a fortiori avec la hausse des cotisations retraite de 2011 à 2020 (0,27 point par an) dans le cadre de la réforme des retraites. Selon les syndicats, qui s'appuient sur la différence d'évolution entre le point d'indice et l'inflation, le pouvoir d'achat des agents a déjà reculé de 9 % depuis 2000 et un gel triennal entraînerait un nouveau recul de 7 %.
Progression « naturelle »
Le gouvernement réfute cette grille de lecture. Il souligne que la progression « naturelle » des salaires (à l'ancienneté et par le jeu des promotions), estimée à 1,5 % à 2 % par an selon les ministères, garantit le maintien du pouvoir d'achat. Et promet en outre de reconduire le dispositif de garantie individuelle du pouvoir d'achat (Gipa), lancé en 2008, qui permet aux agents dont le traitement augmente moins vite que l'inflation de bénéficier d'une prime de rattrapage. La Gipa pourrait coûter cher en cas de dérapage de l'inflation. L'Etat employeur risque aussi d'être confronté à un problème de tassement des bas de grille salariale, qui, faute de revalorisation du point d'indice, ont de fortes chances de repasser sous le niveau du SMIC quand il sera revalorisé, chaque 1 er janvier.
Eric Woerth et Georges Tron ont par ailleurs confirmé le maintien des autres mesures salariales déjà en vigueur ou en cours de déploiement, comme le lancement l'an prochain de l'intéressement collectif et l'extension des primes individuelles au mérite, qui devraient bénéficier à 200.000 agents à l'horizon 2012. La plus importante de ces mesures reste le retour aux agents, sous forme de mesures catégorielles, de 50 % des économies réalisées grâce au non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux (500 millions par an). Au total, ce sont quelque 1,5 milliard d'euros qui devraient ainsi être reversés aux agents sur 2011-2013.
DEREK PERROTTE, Les Echos
jeudi 1 juillet 2010
Fonctionnaires : pas de hausse générale de salaires en 2011
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