mercredi 27 août 2014
Gouvernement Valls II ou le triomphe de Terra Nova
Pour Louis Manaranche, la composition du nouveau gouvernement achève la mue de la gauche que le think-tank Terra Nova avait appelée de ses vœux en 2011.
Il est dans la vie politique des événements profondément ambivalents.
Une sortie médiatique de deux puis trois ministres contre la politique économique du gouvernement, trop inféodée à leurs yeux aux objectifs d'austérité fixés outre-Rhin, a entraîné un remaniement mineur. En soi, cela n'a rien de remarquable. Pourtant, à y regarder de plus près, ce qui s'est passé n'est pas insignifiant. Les ministres qui ont été poussés vers la porte l'ont été pour des prises de position qui sont historiquement marquées à gauche. Il ne serait venu à l'idée de personne, il y a quelques années, par exemple pendant la campagne de l'élection présidentielle, d'envisager que l'on puisse, à gauche, reprocher haut et fort à un homme de gauche de donner la priorité à la relance de l'activité productive sur la réduction des déficits budgétaires. On aimerait se réjouir d'une forme de sain consentement au réel ou d'une redécouverte de la vertu de prudence, qui inviterait à ne pas entreprendre d'action publique dont on n'ait pas les moyens. Néanmoins, il semblerait plutôt que nous assistions à une redéfinition au sommet de l'État de ce qui constitue l'ADN de la gauche. On remplace des ministres dont l'identité de gauche reposait essentiellement sur l'économique, le social et l'institutionnel, par des ministres dont la ligne en la matière consiste manifestement en un consentement aux règles de la gouvernance libérale mondiales. Le seul novice y consent même avec enthousiasme.
En revanche, l'Éducation nationale échoit à une ministre dynamique et décidée qui s'est fait le héraut de la lutte pour de nouvelles émancipations individuelles, pour une refonte des rôles et des images attribués à l'un et à l'autre genre, allant jusqu'à un affranchissement à l'égard des données invariants de l'incarnation et de la sexuation. Ainsi, l'Éducation nationale, que l'on confiait jadis volontiers à des amoureux de l'émancipation par la transmission des savoirs, semble se présenter aujourd'hui comme l'aboutissement et le champ d'essais de ces luttes nouvelles et expérimentales. Le deuil des derniers représentants gouvernementaux de la gauche vieille école se veut compensé par la promotion de celle qui mieux que quiconque symbolise le primat de l'émancipation libertaire. Ainsi, la mue annoncée et préconisée par le think-tank Terra Nova en 2011 est accomplie. À la droite de ne pas la singer, si elle veut un jour retrouver non pas le pouvoir mais avant tout le peuple.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire