vendredi 25 avril 2014
Et si Valls l’emportait…
Le Premier ministre consulte et compose, dans les mots, mais ne rompt pas
La France est-elle réformable ? Le trouble provoqué par la nomination d’un gouvernement baroque, né pour dissoner, dirigé par un authentique réformiste contesté dans son propre camp, relance la sempiternelle question de l’exception française. Surtout à l’heure où le libéral-conservateur Cameron, le social-libéral Renzi et le libéral-libéral (!) Rutte ont engagé, en Angleterre, en Italie et aux Pays-Bas, un tournant plus assumé et plus largement reconnu.
En apparence, l’inquiétude est fondée. Onze abstentions lors du vote de confiance dans les rangs d’un PS habituellement godillot, la fronde bruyante d’une poignée de députés plaidant pour un plan de réduction des dépenses publiques limité à 35 milliards, le recul possible sur le gel des pensions de retraite, l’ambition affichée de rassembler à gauche et de ne pas bâillonner les grognements des forces conservatrices françaises (syndicats, administrations, partis – c’est un comble – de moins en moins représentatifs) : les planètes du stagnisme semblent s’aligner.
Pourtant, dans ce flou stochastique balayé par les vents brouillons d’une majorité composite, Manuel Valls paraît réaliser, sans pouvoir le claironner, une percée historique. Assumant et prenant à bras-le-corps le plan de 50 milliards, accélérant même son calendrier, le Premier ministre consulte et compose, dans les mots, mais ne rompt pas. Il agit en sachant qu’il doit faire rapidement ses preuves, pour se donner la chance et le temps de préserver sa crédibilité et d’ouvrir d’autres chantiers réformistes dans la foulée du pacte de responsabilité. S’il y parvient, il aura fait ce qu’aucun gouvernement, de droite comme de gauche, n’a osé entreprendre depuis trente ans. Cela ne sera évidemment pas suffisant pour ramener nos dépenses publiques (57 % du PIB) au niveau de l’Allemagne (45 %). Mais il pourra s’honorer d’avoir été, alors même que le champ est incroyablement miné, précurseur dans l’inversion de tendance. Au sortir de cette ligne de crête, c’est un boulevard qui s’ouvrira à lui : un deuxième plan de réduction des dépenses, mais surtout une vraie relance par l’offre, sans laquelle aucun rebond n’est possible. Comme l’ont dit Jean-Baptiste Say et François Hollande, c’est en effet « l’offre qui crée la demande ».
Optimisme naïf ? Confiance et erreur de jeunesse (si l’approche de la quarantaine justifie encore cette qualification abusive) ? Cette chronique pourra faire sourire. Le déclinisme pessimiste domine et nourrit les rangs d’un scepticisme compréhensible et d’un Front national plus archaïque encore que ses opposants. L’hypothèse malheureusement plausible d’un FN en tête dans deux voire trois régions et potentiellement premier en nombre de députés européens en France métropolitaine (on parle de 20 pour le FN, dont Jean-Marie et Marine Le Pen, 18 pour l’UMP et 15 pour le PS), devra pourtant bien être interprétée comme la conséquence désespérée d’un manque de réformisme plus que comme une envie de fermeture et de démondialisation nationaliste.
Voilà pourquoi l’UDI et l’UMP doivent, sans retenue politicienne, voter les futurs budgets réduisant les dépenses publiques et, espérons-le, les impôts. En libérant ainsi Valls de la paralysie menaçante de la gauche de la gauche, l’union des réformistes deviendrait une réalité politique. Un doux rêve… réaliste ?
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