mardi 15 octobre 2013
L'Europe en débat
L'Europe en débat
Les sondages sont unanimes, les élections intermédiaires le confirment, les élites le redoutent : un vent nationaliste souffle en Europe. En France comme en Autriche. Au Royaume-Uni comme en Finlande. En Hongrie comme en Grèce. Un vent hostile à la construction européenne, coupable d'être trop compliquée, inefficace, bureaucratique.
Il faut dire que l'objet « Europe » se prête admirablement bien au bulldozer anti-système actuellement à l'oeuvre à tous les étages. Les institutions européennes ne sont pas les seules à être minées par la crise de crédibilité qui frappe les élus. Loin de là. Toutes les enquêtes montrent que le manque de confiance dans les classes politiques nationales est encore plus marqué. Mais l'Europe ajoute une particularité redoutable. Sa complexité, incontournable.
Non pas que le fonctionnement de Bercy ou d'un conseil régional soit un monstre de simplicité. Mais les dirigeants européens n'ont pas trouvé mieux comme paratonnerre que de parler de « Bruxelles ». Dès lors, c'est l'administration, « Bruxelles », qui communique. Fiasco annoncé. Comme si on demandait à un directeur général d'administration centrale de se faire tribun. De parler au peuple. De forger un sens politique.
Même les partisans les plus fervents de la construction européenne en conviennent. Cette Europe-là doit être réformée. La demande de simplicité des électeurs est légitime. Ne pas y répondre, c'est faire le lit des simplismes. Or, le propre du simplisme (mot plus utile que populisme car le peuple n'est pas en cause dans tout cela), c'est de tuer le débat. Liquider l'affaire. Donner pour entendu, sous le coup de l'émotion, ce qui ne l'est pas nécessairement. Profiter de l'exaspération légitime des électeurs frappés par la crise ou par le désintérêt ancien des pouvoirs publics pour injecter une dose de politique pulsionnelle. De colère. De peur.
Instaurer le débat est pourtant le fondement de toute démocratie. C'était le sens des Journées de l'Europe organisées à Bruxelles, la semaine passée, par le Nouvel Observateur. On n'y a pas vu seulement quelques grands anciens ou quelques technocrates. économistes, écrivains, artistes, entrepreneurs, ministres... une centaine d'invités venus de nombreux pays ont débattu. Devant un public plus jeune et plus nombreux que prévu. Exigeant et inquiet.
L'inquiétude vient des signaux qui affluent de toute l'Europe. Beaucoup redoutent que le prochain parlement européen ne soit composé, à 30 ou 40%, de députés essentiellement désireux de saborder le système. En somme, que l'élection européenne soit davantage l'occasion d'une sorte de référendum contre l'Europe, que d'un choix politique.
Quant à l'exigence exprimée durant ces journées, c'est celle d'une plus grande clarté. Faut-il se résigner au simplisme ou débattre point par point des enjeux ? De finance ? De droits ? De travail ? De lutte contre la criminalité ou l'illégalité ? Sur ces points, et de nombreux autres, les solutions nationales sont-elles pertinentes ? Le magistrat, sans mandat d'arrêt européen, sera-t-il plus efficace ? L'étudiant, sans une année Erasmus, mieux préparé ? Le trader, sans les 28 résolutions adoptées par « Bruxelles » depuis quatre ans, mieux encadré ?
L'Europe, dans ce débat, n'est qu'un échelon. Ni plus ni moins essentiel que la collectivité locale ou l'Etat national. C'est sur ce que l'on veut en faire que doit porter le débat. Il est encore temps.
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