mardi 17 septembre 2013
Hollande ose nous expliquer que sa « stratégie a payé »…
Hollande ose nous expliquer que sa « stratégie a payé »…
« Je maintiens toujours la pression », confiait l’autre jour le président normal qui, depuis la réussite de l’armée française au Mali où il devrait se rendre jeudi prochain pour l’investiture du nouveau président malien élu en août, Ibrahim Boubacar Keïta, se prend pour un grand chef de guerre et rêve toujours d’une nouvelle campagne éclair en Syrie. Une belle guerre qui redorerait un peu son image, sérieusement ternie en France en cette rentrée de septembre.
« L’option militaire doit demeurer, sinon il n’y aura pas la contrainte » pour que le régime de Bachar Al-Assad respecte ses nouveaux engagements liés au démantèlement de son arsenal d’armes chimiques, a donc redit dimanche soir François Hollande sur TF-1, en nous expliquant en long et en large que c’est sa détermination – et celle bien sûr de Barack Obama – qui avait contraint le président syrien à céder.
« Nous étions prêts à envisager des frappes pour faire bouger la Syrie et faire évoluer la Russie. Cette stratégie a payé », s’est félicité le président de la République, en soulignant que les frappes françaises envisagées auraient été « efficaces, graduées et proportionnées » sans devoir survoler le territoire syrien.
A l’en croire, c’est l’agitation de cette seule menace qui aurait permis d’arriver à « une solution diplomatique » comme le souhaitait la majorité des Français. Alléluia ! C’est ce qui s’appelle savoir habilement « tirer la couverture » à soi, mais il est vrai qu’en politique c’est de bonne guerre et que, dans cette crise, chacun cherche avant tout à sauver la face. Et le président français campe donc désormais ce rôle : celui de l’homme qui aura réussi à faire reculer Assad !
Après le massacre chimique du 21 août, « une réaction était nécessaire », a confirmé Hollande, en soulignant que la crise syrienne, qualifiée au passage de « tragédie la plus grave de ce début du XXIe siècle », « n’avait que trop duré et prenait un tour qui ne pouvait plus être accepté ». Comme si les victimes qu’il avait longuement énumérées juste auparavant (parlant de 120 000 morts, la moitié de la population syrienne déplacée et plus de 2 millions de réfugiés) n’avaient pas largement suffi à émouvoir la communauté internationale et à condamner définitivement le régime d’Assad !
Reste que la crise syrienne est loin d’être réglée par le seul accord conclu samedi à Genève entre Russes et Américains et curieusement accepté aussitôt par le président syrien. Ce dernier peut parfaitement crier victoire lui aussi, puisqu’il pressent à juste titre qu’il vient de remporter une nouvelle manche et surtout de gagner du temps. Car toutes ses armes chimiques seront loin d’être démantelées d’ici au début de 2014…
« La menace de la force
est toujours bien réelle »
Si l’option militaire à l’encontre de Damas est donc provisoirement mise de côté, elle n’est pas totalement abandonnée pour autant. La France, déjà, veut faire voter d’ici à la fin de cette semaine une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies incluant un recours à la force sous chapitre 7, à laquelle la Russie de Poutine pourrait bien s’opposer. « La prochaine étape sera de résoudre la crise syrienne », a d’ailleurs reconnu à l’antenne le président français, bien conscient que rien n’est encore vraiment réglé. La tentation est donc grande pour les Français de rejouer bientôt à se faire peur.
« Au Mali, nous pouvons être fiers d’une opération pleinement réussie » et, en Syrie aussi, « nous pouvons être fiers » car la pression exercée par la seule menace d’avoir recours à la force « a payé », a conclu le président français qui, dimanche soir, a bien eu besoin de Claire Chazal pour mieux retomber sur ses pattes.
En souhaitant lancer notre pays dans une nouvelle aventure militaire, le président de la République, qui est également le chef des armées, voulait nous faire oublier – tout comme son compère Jean-Yves Le Drian qui est à la manœuvre dans cette affaire – la prochaine loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019 qui arrive ces jours-ci en discussion devant les deux chambres du Parlement. Car cette LPM nous réserve de nouvelles surprises dans le budget de la Défense qui – maintenu à valeur constante – masque mal les coupes claires qui s’annoncent dans les programmes d’équipement et de modernisation du matériel.
C’est là une réalité que nos trois armées (Terre, Air et marine) vont bientôt découvrir à leurs dépens avec la maigre consolation, bien sûr, d’avoir évité le pire…
En attendant ces mauvaises nouvelles, le président Hollande devait recevoir ce lundi à l’Elysée le secrétaire d’Etat américain John Kerry, qui a redit dimanche que « la menace de la force est toujours bien réelle » à l’encontre du régime syrien. Destinée à reprendre la main après l’accord conclu samedi à Genève entre Kerry précisément et son homologue russe Sergueï Lavrov, cette rencontre devait se dérouler en présence de Laurent Fabius et de son homologue britannique du Foreign Office. Faute d’initiative diplomatique importante la France, qui a pris fait et cause depuis longtemps pour la rébellion, était depuis trop longtemps hors course.
Très en pointe dans ce dossier depuis qu’il est arrivé au Quai d’Orsay en mai 2012 Fabius, qui recevait encore jeudi dernier Al Jarba, le président de la Coalition nationale syrienne, n’était en effet plus crédible. « Faute d’arriver un jour à l’Elysée, Fabius voulait, grâce à une intervention en Syrie, entrer dans l’Histoire comme Villepin en 2003, il y a dix ans, avec son discours contre la guerre en Irak », me confiait l’autre jour un diplomate socialiste qui ne doit pas être de la même chapelle ou du même courant que l’actuel locataire du Quai d’Orsay.
Mais Hollande et Fabius – parfaitement sur la même longueur d’ondes – n’ont, semble-t-il, pas encore dit leur dernier mot. L’accord de Genève et l’annonce spectaculaire de la recension et du démantèlement acceptés des armes chimiques du régime syrien seront « étudiés » au regard du rapport des experts de l’ONU qui devait être remis et rendu public ce lundi, ont-ils l’un et l’autre tenu à rappeler. Un rapport accablant pour le régime de Damas et sur lequel la France devrait s’appuyer pour arracher une résolution contraignante du Conseil de sécurité.
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