TOUT EST DIT

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jeudi 14 février 2013

Comme Charles Quint

Il y a du stoïcisme dans cette abdication qui porte au plus haut la vertu de savoir se retirer du monde.


Quel que soit l’homme que le Sacré Collège donnera pour prochain pape à la catholicité, tout indique qu’il ne ressemblera pas à Benoît XVI, lequel restera peut-être dans l’Histoire comme le dernier pape européen. À l’aune de la période postconciliaire, il faisait déjà figure d’exception : après Jean-Paul II dont le pontificat, plus encore que celui de Paul VI, s’exerça en mondovision, Joseph Ratzinger aura placé son intelligence et son énergie au chevet de ce qui lui tenait le plus à coeur : l’Europe, berceau de l’Église universelle en même temps que coeur malade de la chrétienté.
Le choix de son prénom sonnait déjà comme un programme : Benoît, en souvenir du fondateur de l’ordre bénédictin, patron du continent européen. Mais aussi en communion avec Benoît XV, devenu pape alors qu’éclatait la Première Guerre mondiale, catastrophe qu’il tenta, en vain, de conjurer. Intellectuel de haut vol, cet « enfant prodige de la théologie contemporaine »(dixit Philippe Levillain) a tout fait, comme le pape de 1914, pour réparer l’irréparable : la division des chrétiens. Et plus encore, sans doute, l’extinction, chez ses contemporains, de tout sentiment de transcendance. Au-delà des anglicans, des luthériens, des calvinistes, des orthodoxes même, il n’a cessé, tout au long de presque huit années de pontificat, de s’adresser aux peuples d’Europe.
Et quand il a senti ses forces lui manquer, ce pape qui avait lu Épictète et savait séparer ce qui dépend de soi et ce qui n’en dépend pas, fût-ce avec l’aide de Dieu, a décidé de retourner à la foule. Il y a du Charles Quint, dans cette abdication qui porte au plus haut la vertu de savoir se retirer du monde. Nul doute que, comme le Don Carlo de l’opéra de Verdi qui croyait entendre parfois la voix du grand empereur, le successeur de Benoît XVI se souviendra de cet exemple.

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