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mercredi 30 janvier 2013

La vraie guerre qui attend François Hollande

La vraie guerre qui attend François Hollande


Vainqueur au Mali, le président de la République va-t-il imposer avec la même ardeur les réformes économiques indispensables au pays ?

La guerre - justifiée - du Mali va-t-elle transformer François Hollande? Muer l'homme des éternels compromis, des motions chèvre-chou et des subtils atermoiements tactiques en un téméraire général en chef chargeant sabre au clair ? La victoire de Tombouctou peut, sait-on jamais, lui donner le goût des vastes espaces, des charges audacieuses, des mouvements décisifs. C'est le moment.
Hollande bénéficie en effet d'une fenêtre d'opportunités. Ses succès au Mali lui valent un frémissement inespéré de popularité. L'affaire du mariage pour tous - dont nous soupçonnons qu'il se fiche en réalité éperdument - lui permet de mobiliser son camp. Par le truchement de Jean-Marc Ayrault, il vient même de réveiller la vieille lune du vote des étrangers non communautaires aux élections locales. Histoire, là encore, de rassembler ses troupes.

L'amère potion du réalisme

Car il faudra bien faire avaler un jour ou l'autre à celles-ci l'amère potion du réalisme. François Hollande n'est pas inconscient. Il sait que le temps presse pour éviter la faillite du pays. Il sait aussi qu'il lui faudra bousculer les tabous, les vaches sacrées de la gaucheJurrassic ParkL'accord sur la flexibilité de l'emploi signé par trois syndicats (mais pas la CGT) est un premier pas dans la bonne direction. Mais un pas insuffisant. Il faudra s'attaquer aussi et très vite aux vaches sacrées : les 35 heures, les retraites, les dépenses publiques (et donc les effectifs de la fonction publique), la durée et le montant des indemnités chômage. Des mesures drastiques sont indispensables pour réduire la charge de la dette, rétablir les équilibres financiers et remettre le pays sur les rails de la compétitivité.
Face à ses interlocuteurs étrangers, François Hollande tient un langage pragmatique et met régulièrement en avant ce souci de restaurer la compétitivité de l'appareil industriel français. Angela Merkel a publiquement salué cet aggiornamento. Mais dans les milieux patronaux d'outre-Rhin, on doute encore de la volonté présidentielle d'enclencher des réformes de fond. Il est vrai que François Hollande et les socialistes traînent un encombrant retard historique.
C'est en novembre 1959, dans la station thermale de Bad Godesberg (dans la périphérie de Bonn), qu'un congrès extraordinaire du SPD décida d'abandonner le marxisme et la notion de lutte des classes pour opter pour une social-démocratie moderne et l'économie de marché. Il fallut 24 ans aux socialistes français pour amorcer la même démarche - et encore, sans le dire ouvertement -, quand François Mitterrand choisit en 1983 de prendre le virage de la rigueur et de rester dans le système monétaire européen.

L'agenda 2010 de Schröder

C'est dès 2003 que les sociaux-démocrates allemands, alors au pouvoir avec Gerhard Schröder, mirent, eux, en chantier les réformes connues sous le nom d'agenda 2010 : marché du travail, révision de l'indemnisation du chômage (un an maximum jusqu'à 55 ans, dix-huit mois maximum au-delà), dépenses de santé, fiscalité, formation professionnelle, incitation à la création d'entreprises. Tout fut mis sur la table. Et négocié avec l'opposition chrétienne-démocrate, majoritaire à la chambre haute (Bundesrat). Et c'est sous un gouvernement de grande coalition CDU-SPD que fut réformé en profondeur le système des retraites. À l'horizon de 2030, les Allemands devront attendre l'âge de 67 ans pour aller pêcher à la ligne, sauf s'ils ont 45 ans de cotisation et ou s'ils acceptent une décote.
François Hollande, méhariste intrépide des déserts maliens, peut-il faire montre de la même audace dans la guerre moins dangereuse mais plus ingrate du front des réformes ? L'enjeu est sans doute beaucoup plus important, à long terme, pour la France.

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