Ignorer ce qui est dérangeant reste le meilleur moyen pour poursuivre nos rêves doucereux de richesses collectives éternelles. Nous reproduisons ci-dessous la dépêche ayant survécu à la maîtrise médiatique gouvernementale. Remarquez, peut-on vraiment leur reprocher ce petit ménage entre amis ? Le sujet est grave. Il s’agit de la faillite de la France. Soyons honnêtes.
Le sujet est également stratégique pour notre pays. Qu’un membre du gouvernement parle de la situation désespérée de nos finances et les marchés pourraient sonner l’hallali pour achever la bête blessée gisant au sol. Alors il faut comprendre le silence gêné qui a entouré les dernières déclarations de Najat Vallaud-Belkacem.
Mais pour nous, c’est évidemment une perle à garder et à conserver. Cela doit nous renforcer dans les convictions qui animent nos anticipations et nos prises de décisions patrimoniales. Au-delà du bruit de fond traditionnel, et du « tout va très bien Madame la Marquise », nous savons que la situation est très grave, pour ne pas dire définitivement sans espoir. Dans les moments de doute, n’hésitez pas à relire ces quelques lignes.
« L'État français, dans un état de faillite aggravé »
Comme disait Juncker, le président de l’Eurogroupe, « c’est quand les choses deviennent vraiment graves qu’il faut mentir ». Ce temps est déjà venu. Après viendra celui de l’écueil de la réalité. Le problème avec la réalité, c’est qu’elle finit toujours par nous rattraper. Même si on n’en a pas envie. La dépêche a donc survécu, bien sûr pas en France mais à l’étranger, ce qui me fait dire que l’on en apprend plus sur nous-mêmes en écoutant les autres qu’en nous regardant nous-mêmes.La porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, a aujourd’hui déclaré que la précédente majorité avait laissé la France dans un « état de faillite aggravée ». Mme Najat Vallaud-Belkacem répliquait aujourd’hui à François Fillon, qui a accusé le président François Hollande « d’amateurisme », en le renvoyant au bilan de son action gouvernementale.
« M. Fillon est-il vraiment le mieux placé pour donner des leçons, lui qui a commencé son mandat de Premier ministre à la tête d’un État en faillite et l’a laissé en état de faillite aggravée ? », a déclaré à l’AFP Najat Vallaud-Belkacem. Suite à ces propos, certains commentateurs ne manquent pas de souligner qu’il est difficile de défendre avec crédibilité la note AAA de la France tout en déclarant que celle-ci est dans un état de faillite aggravée.
Dans une interview jeudi aux Echos, l’ex-Premier ministre a estimé que le projet de budget pour 2013 était « un monument d’amateurisme, d’irresponsabilité et de mauvaise foi ». « On se demande qui gouverne, François Hollande et le gouvernement, ou quelques nostalgiques de l’économie dirigée ? », a-t-il demandé.
Pendant ce temps, en Grèce, tout va bien. Il va bien falloir un peu plus d’austérité encore. Mais non, rassurez-vous, la Grèce va bien et va s’en sortir… Après quatre mois de négociation, le ministre grec des Finances a annoncé un accord avec la troïka sur un nouveau train de rigueur et un délai de deux ans pour assainir les comptes, mais qui reste suspendu au feu vert des créanciers et des trois partis de la coalition, ce qui dans le climat actuel fait tout de même beaucoup de raisons pour que finalement tout cela ne fonctionne pas à l’arrivée.
Après quatre ans de régime sec, le déficit grec est toujours proche des 10 % au prix d’une récession terrible
D’un autre côté, c’est une excellente manière encore une fois de gagner du temps pour « pas cher », et atteindre le mois de novembre. L’Europe ne pourra pas tenir indéfiniment sur des propos d’interventions illimitées de la BCE sans qu’il n’y ait aucune matérialisation dans les faits. D’après l’AFP, « la Grèce a obtenu mercredi deux ans supplémentaires pour mener à bien son ajustement budgétaire, a annoncé le ministre des Finances grec Yannis Stournaras au Parlement, en indiquant que le paquet de nouvelles mesures d’austérité lié à ce ballon d’oxygène avait été bouclé également ».« Aucun des acteurs concernés en Europe ou à Washington n’avait réagi mercredi soir à cette annonce, à l’exception du patron de la Banque centrale européenne Mario Draghi qui a indiqué que les négociations n’étaient pas terminées, tout en soulignant leur progression. » Ce qui est extraordinaire, c’est que l’AFP nous fasse un superbe papier au sujet de la Grèce qui obtient un accord sans à aucun moment n’obtenir une seule confirmation de la part d’autres intervenants au processus à part la Grèce.
Heureusement, la langue française permet de se « couvrir » subtilement en utilisant rapidement le conditionnel… (J’adore la langue française pour ses raffinements.) « Si l’accord est confirmé, Athènes devrait donc avoir jusqu’à 2016 pour compresser son déficit budgétaire, qui s’élevait à 9,4 % du PIB fin 2011, au-dessous de la barre fatidique des 3 %. » Vous vous rendez compte comme ça marche bien l’austérité et la rigueur ? Après quatre ans de ce régime sec, le déficit est toujours proche des 10 % au prix d’une récession terrible pour la population grecque. Aucun intérêt. C’est absurde.
Le général de Gaulle disait que « toute politique qui ne donne pas à rêver est vouée à l’échec ». Il ne subsiste plus qu’un cauchemar grec. « En échange, M. Stournaras a négocié un projet de nouveau "mémorandum" d’accord avec ses créanciers, prévoyant 13,5 milliards d’euros d’économies budgétaires en deux ans ». Ce qui doit nous faire en moyenne un nouveau plan tous les 3 mois depuis 4 ans.
On s’oriente donc vers une nouvelle restructuration de la dette grecque
« La majorité de l’effort (9,2 milliards d’euros) est à réaliser dès 2013 via une nouvelle douloureuse cure de rigueur comprenant un recul de deux ans de l’âge de départ en retraite, des baisses de salaires et des suppressions de postes de fonctionnaires. » Les Grecs vont être contents. Les salaires ont été en moyenne divisés par deux depuis le début de la crise. La perte est encore plus importante pour les personnes qui avaient des salaires plus élevés. Les salaires vont encore baisser. Il faut être clair. En Grèce, ce n’est plus la récession le problème. C’est la déflation qui détruit tout sur son passage.« Pour financer les deux ans supplémentaires, la Grèce compte obtenir une "réduction des taux d’intérêt" qu’elle paie à ses créanciers et un allongement de la période de remboursement des prêts, a dit M. Stournaras sans donner de détail. Jusqu’à présent, aussi bien BCE qu’UE repoussaient toute perspective de restructuration de la dette publique grecque. » On s’oriente donc vers une nouvelle restructuration de la dette grecque. Sauf que cela va commencer à poser un léger problème à la BCE qui est détentrice de dettes grecques.
La BCE devra-t-elle constater des pertes comptables ? Dans ce cas, les États (actionnaires de la BCE) vont-ils accepter de verser les montants nécessaires à la recapitalisation de la BCE ? Et surtout, où trouveront-ils l’argent ? Pour la Grèce, pour l’euro et pour l’Europe, l’heure de vérité approche.
« Si nous n’avions pas obtenu ce délai, nous aurions dû prendre des mesures (d’économies) de 18,5 milliards d’euros au lieu de 13,5 milliards », a dit M. Stournaras. Le ministre pilote depuis juillet une double négociation avec, d’un côté la troïka des créanciers internationaux, et de l’autre les trois partis de la coalition gouvernementale. Il entend présenter deux projets de loi au Parlement formalisant les engagements grecs en vue de leur adoption avant la réunion des ministres des Finances de la zone euro du 12 novembre et la date fatidique du 16 novembre où les caisses du pays seront à sec, selon le Premier ministre.
« Le programme OMT de la BCE ne conduit pas à financement déguisé des États »
Lors de cette réunion, la Grèce attend le feu vert pour le versement de ses partenaires d’une tranche vitale de 31,5 milliards d’euros, destinée à recapitaliser ses banques et retardée depuis juin. Alors que la Grèce attend un nouveau chèque de 31 milliards, rien ne vient depuis juin. Heureusement, il y a la réunion du 16 novembre qui devrait tout régler. Elle tombe sacrément bien cette date du 16 novembre, car c’est 10 jours après l’élection américaine…On devrait donc pouvoir connaître un nouveau psychodrame européen à cette occasion. Finalement, je crois qu’il faut vraiment comprendre que nos « amis » allemands sont très très fâchés. L’inflation, ils n’en veulent toujours pas. À tel point que super Mario, qui ferait tout ce qu’il faudrait de façon illimitée et croyez-le ce sera assez, a tout de même besoin de justifier sa « politique » pour le moment de « petite » création monétaire.
« Le président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, a défendu mercredi devant des députés du Bundestag le rachat de dettes publiques par la BCE en soutien aux pays de la zone euro en crise, un plan d’action vivement contesté par certains élus allemands. » « La plupart des questions ont porté sur le programme de la BCE appelé OMT. (…) Ces actions sont pleinement en accord avec notre mandat », a déclaré le président de la BCE lors d’une courte conférence de presse à l’issue de la rencontre.
Début septembre, M. Draghi avait dévoilé le programme OMT, nouveau plan de rachats illimités de dettes à court et moyen termes, destiné à soutenir les pays de la zone euro en difficulté. Face aux élus allemands, il a nié que ce programme soit une forme de financement indirect des États ou puisse alimenter un risque d’inflation, comme certains économistes et responsables politiques l’affirment en Allemagne. « Le programme OMT ne conduit pas à un financement déguisé des gouvernements. Nous avons spécialement conçu nos interventions pour éviter ceci », a affirmé le président de la BCE devant les parlementaires.
En outre, « le programme OMT ne conduit pas à de l’inflation. Nous avons conçu nos opérations pour que leur effet soit neutre sur les conditions monétaires ». « De notre point de vue, le risque principal pour la stabilité des prix est la déflation actuelle des prix dans certains pays de la zone euro », a-t-il ajouté. S’il s’exprime régulièrement devant le Parlement européen, M. Draghi n’a pas coutume de rencontrer des élus nationaux et il n’était jamais venu s’expliquer au Bundestag, même à titre informel.
Le principal danger pour Mario Draghi, ce n’est pas l’inflation mais le risque désormais avéré de déflation
Face à la levée de boucliers suscitée par ce plan en Allemagne, le grand argentier européen avait lui-même souhaité mi-septembre venir s’expliquer devant le Bundestag sur la politique de la BCE. « Cet échange est un élément important pour créer de la confiance entre ce que fait la BCE et la façon dont son action est perçue par l’opinion publique allemande », a-t-il souligné mercredi devant les journalistes. De son côté, le président du Bundestag, Norbert Lammert, s’est félicité de cette initiative qui a constitué « une étape importante pour dissiper les inquiétudes des deux côtés ».L’institution de Francfort avait notamment fait l’objet de virulentes critiques de la part du président de la Banque centrale allemande, Jens Weidmann, et de plusieurs économistes allemands. « Si ce programme conduit les États à repousser les réformes nécessaires, cela va de nouveau saper la confiance dans la capacité des responsables politiques à résoudre la crise », avait averti M. Weidmann. Jusqu’à présent, M. Draghi a toujours pu compter sur le soutien de la chancelière Angela Merkel et de son gouvernement.
Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, l’a d’ailleurs assuré une fois de plus de son soutien mercredi, estimant que la BCE agissait « dans le cadre de son mandat », dans un entretien à l’hebdomadaire allemand Die Zeit. « Soupçonner la BCE de ne pas s’intéresser à la stabilité (de l’euro, ndlr), c’est ignorer la réalité », a souligné M. Schäuble. M. Draghi a rappelé que les efforts de la BCE ne devaient pas détourner les États de la zone euro d’une politique de « sérieux budgétaire ».
« La BCE ne peut s’engager dans du financement monétaire et ne peut pas remplacer l’action des États membres. Il est trop facile de penser que la BCE peut remplacer l’action des gouvernements ou leur manque d’action en imprimant de la monnaie. Cela n’arrivera pas », avait-il martelé lors d’une audition au Parlement européen début octobre. Il y a donc deux choses à retenir de l’intervention de Super Mario devant les députés allemands.
La première, c’est que bien que la France ne soit officiellement pas en faillite et que tout aille bien en Europe, le principal danger pour Mario Draghi, ce n’est bien sûr pas l’inflation mais bien le risque désormais avéré de déflation. Elle est en cours, dans plusieurs pays européens. La déflation, c’est la baisse de la valeur des actifs. Au bout du chemin, il y aura l’insolvabilité car, dans un monde de dettes, la déflation laisse les dettes constantes mais érode la valeur des actifs financés par ces dettes…
À l’arrivée, il est impossible de les rembourser. C’est ce qui se passe en Grèce, au Portugal, en Espagne, en Italie dans une moindre mesure, et c’est ce qui vient de démarrer depuis la rentrée de septembre en France et va s’amplifier en 2013. La deuxième chose, c’est que le gouverneur de la BCE a indiqué qu’il n’imprimerait pas tant de monnaie que ça. Que cela n’arrivera pas.
Nous avons le choix entre un effondrement déflationniste rapide et socialement dramatique, ou une mort légèrement plus lente et moins douloureuse à base d’inflation. Pour le moment, nous semblons choisir le chemin de la souffrance.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire