Certains considèrent que la BCE pourrait être en train
d’essayer de pousser la Grèce en dehors de l’euro en réduisant son
soutien en liquidités à ses banques. Est-ce vraiment le cas ?
Il y a une nouvelle qui semble avoir pris
depuis mercredi dernier, qui suggère que la BCE pourrait être
indirectement en train d’essayer de pousser la Grèce en dehors de l’euro
en réduisant son soutien en liquidités à ses banques, ce qui, selon la
théorie, causerait une menace d’effondrement bancaire, et une sortie de
la Grèce de la zone euro afin de pouvoir utiliser sa propre banque
centrale pour soutenir ses banques. Nombre de gros titres circulent en
ce moment en ce sens, mais après un peu plus d’analyse, nous ne sommes
pas certains qu’une quelconque baisse peut réellement être perçue comme
une tentative de la BCE de forcer la Grèce à sortir.
Cette histoire a commencé par un compte rendu, dans la nuit de mardi à mercredi, du quotidien néerlandais Het Financiele Dagblad
qui prétendait que, d’après des banquiers centraux non identifiés, la
BCE était en train de réduire ses prêts aux banques grecques à cause de
soucis sur leurs niveaux de capitaux. D’après cet article,
l’approvisionnement en liquidités de la BCE pour les banques grecques a
chuté presque de moitié depuis la dernière fois que leur niveau a été
enregistré publiquement, à 73 milliards d’euros, en janvier .
Certes, ce compte rendu pourrait s’avérer exact, mais il y a ici des éléments qui méritent d’être relevés.
Tout d’abord, les prêts de la BCE à la Grèce devaient dans tous les cas baisser suite à la restructuration.
Le gros de l’emprunt de 73 milliards d’euros par les banques grecques use d’obligations grecques comme garanties,
et quand celles-ci on été dépréciées de moitié, il était inévitable que
les banques allaient avoir bien moins d’actifs à mettre en avant comme
garantie. Ce problème a aussi été exacerbé par la chute de la valeur des
nouvelles obligations grecques, qui auraient assuré qu’elles étaient
soumises à d’énormes tailles dans leur valeur pour les opérations de
liquidités de la BCE.
Donc, les banques grecques auraient dû, dans tous les cas, couper
leurs emprunts auprès de la BCE, simplement du fait de contraintes de
garanties.
Le mou sera naturellement pris en charge par « l’assistance en
urgence en liquidités » (ELA, fournie par la banque centrale grecque
sous conditions de capital moins strictes, voir ici
pour une discussion complète) avec comme résultat une baisse du niveau
de prêts de la BCE en direct aux banques grecques. Une partie des prêts
aurait été maintenue par les 35 milliards d’euros de garantie fournis
par le FESF pour aider à isoler la BCE contre des risques
supplémentaires. Cependant, tout cela n’arrive pas à hauteur pour
couvrir la totalité des 73 milliards d’emprunts par les banques grecques
auprès de la BCE, contre lesquels elles auraient dû présenter environ
100 milliards d’euros en garantie, du fait des grandes « haircuts » qu’applique la BCE.
Une des motivations de la réduction supposée des prêts de la BCE est
le lent progrès de la recapitalisation des banques. Cela pourrait bien
être vrai, néanmoins, le fait est que, sans nouveau capital, les banques
continueront à être à court de garanties à utiliser auprès de la BCE,
ce qui signifie que les prêts doivent avoir lieu sous l’ombrelle de
l’ELA entretemps.
Enfin, la taille des bilans auxquels les banques grecques doivent
faire face auront aussi été réduits par la restructuration, ce qui veut
dire qu’elles pourraient avoir besoin de moins de liquidités qu’avant.
Pour résumer, une réduction assez importante des prêts de la BCE aux
banques grecques aurait pu être attendue à la suite de la
restructuration, mêmes s’ils étaient juste transférés à l’ELA. Elle
pouvait en fait très bien être motivée par les contraintes pesant sur
les banques elles-mêmes plutôt que sur la BCE.
Maintenant, tout ceci ne revient pas à dire que la BCE n’est pas
agacée par le manque de progrès dans la recapitalisation des banques
grecques, mais nous savons tous que la corrélation de ces évènements ne
signifie pas causalité. Les choses seront plus claires quand les
chiffres complets seront publiés, mais jusqu’alors nous resterons très
prudents à l’égard de tout soupçon que la BCE essaie de forcer la Grèce à
sortir de l’euro. Ce n’est pas comme s’il y avait un manque de gros
titres alarmants sur la zone euro, de toutes façons.
samedi 19 mai 2012
La BCE tente-t-elle de pousser la Grèce hors de l’euro ?
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