Officiellement, il évoque l'hypothèse de sa propre défaite. En privé, il n'en est rien.
Il ne faut surtout pas se fier aux récents propos - off - de Nicolas Sarkozy, qui évoquait l'hypothèse de sa propre défaite à la présidentielle de mai prochain. Avec promptitude, les commentateurs et nombre d'élus de gauche y ont vu un aveu d'échec ou le début d'une "tentation de Venise". Il serait donc bon de leur rappeler ce point essentiel : Nicolas Sarkozy est un animal politique, ivre d'ambitions, orgueilleux au point d'être candidat contre les pires augures et animé par un redoutable instinct de survie. Persuadé qu'il déjouera les pronostics, le président de la République croit sérieusement en ses chances. Pour mille raisons...
"Je suis plutôt bien placé, tout en n'étant pas candidat. Je me consolide à 24 %, malgré la campagne médiatique favorable à Hollande. Ceux qui sont sûrs de gagner ont toujours perdu", a-t-il clamé, mercredi soir, lors d'une réunion à l'Élysée, entouré de quadras de l'UMP. Ironie de l'histoire : le futur candidat se voit aujourd'hui tel Jacques Chirac contre Édouard Balladur - qu'il avait soutenu - en 1995. Ultrafavori des sondages et des médias, François Hollande incarnerait, lui, l'ancien Premier ministre-candidat, qui jouissait jadis d'une cote comparable à la sienne.
"Vote de raison"
Comme il y a dix-sept ans, Nicolas Sarkozy veut croire que les Français, "peuple frondeur et souverain", ne se laisseront pas influencer par les rafales de sondages. En outre, selon les conseillers du chef de l'État, les estimations de vote quasi quotidiennes publiées dans la presse ne prendraient pas en compte ce qu'ils appellent le "vote de raison", celui qui conduira les citoyens, in fine, une fois dans l'isoloir, à glisser dans l'urne un bulletin Nicolas Sarkozy plutôt qu'un Marine Le Pen. À les croire, beaucoup de Français interrogés par les instituts de sondage feraient mine de déclarer qu'ils voteront pour la candidate du Front national dans l'unique but d'envoyer un avertissement à l'exécutif. Théorie hasardeuse ? Reste que le président, qui considère le programme de Marine Le Pen "irréaliste et dangereux", parie lui aussi sur un sursaut citoyen.Pour lui, la crédibilité sera un facteur décisif dans le choix des Français. Fort de son quinquennat, il considère avoir une belle longueur d'avance sur ses principaux rivaux que sont François Hollande, Marine Le Pen et François Bayrou. Ce dernier est le seul qui a occupé une fonction ministérielle. C'était entre 1993 et 1997... Paradoxalement, la crise pourrait donc profiter au sortant. "Pour la première fois dans l'histoire de la Ve République, le bilan d'un président sortant peut être un argument électoral", affirme Henri Guaino, conseiller spécial du président, qui énumère les pays européens où la crise a été beaucoup plus dévastatrice qu'en France.
Hollande "largement surcoté"
Pour l'Élysée, le candidat du Parti socialiste, considéré comme "beaucoup trop sûr de lui", serait "largement surcoté" dans les sondages. "L'annonce de sa candidature lui a permis de gagner trois à quatre points. Aux États unis, lorsqu'un candidat est investi après une primaire, il fait un bond de dix points dans les sondages", analyse un autre conseiller, soulignant que Hollande "a déjà dévoilé son programme" et qu'il "n'a plus rien à dire d'ici l'échéance présidentielle, sinon commenter l'actualité et faire de l'anti-sarkozysme". La majorité mise en effet sur l'annonce de candidature de Nicolas Sarkozy, entre mi-février et mi-mars, pour voir enclencher une nouvelle dynamique autour de trois ou quatre idées fortes. "Une fois que Nicolas sera en campagne, nous verrons des images de ferveur, des salles pleines et des drapeaux flotter. Pour l'heure, on le voit plutôt sortir des conseils européens avec des valises sous les yeux", considère un ami.Afin d'inverser la tendance, le président-candidat envisage également d'écrire un livre "vérité" à l'adresse des Français, dans lequel il défendra son bilan et esquissera un mea culpa. L'idée est de recréer un lien entre les Français et lui, rompu depuis ses écarts de conduite (Fouquet's, "Casse-toi pov' con"...) et ses quelques promesses non tenues, telles la hausse du pouvoir d'achat ou l'accession à la propriété pour tous. Le mot de la fin revient à l'intéressé, qui défiait ainsi les journalistes lors de ses voeux : "Vous voulez de la passion, des surprises, des rebondissements ? (...) J'essaierai de ne pas vous décevoir, de continuer à vous surprendre... et peut-être, avec une certaine malice, de déjouer certains de vos commentaires, parfois de vos pronostics."
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