Après tout ce que les Français ont déjà vécu et en attendant la suite, voici qu'un vendredi 13 -signe des temps ?- la France aura appris, en effet, qu'elle avait perdu son triple A. Et, à la clé, on peut déjà parler d'une quadruple leçon, plutôt rude. Que cela plaise ou non, les patrons des agences de notation, dont on ignorait jusqu'à l'existence en 2007, sont devenus des acteurs-clés de la campagne présidentielle. D'une certaine manière, ne vont-ils pas être en mesure de choisir, le moment venu, le vainqueur ? On peut au moins se poser la question.
La France voit surgir pour de bon l'heure des additions: depuis vingt ans au moins, trop de déficits, trop de laisser-aller, un pays riche mais qui vit au-dessus de ses moyens. Le rafistolage n'est plus possible. Une époque se termine. C'est un tournant historique. L'Europe, déjà mal en point, est, elle aussi, à un tournant: ou bien elle se recompose, ou elle explose. Car la situation des pays de l'union au regard des agences de notation est extrêmement variable. Et peut devenir désormais franchement explosive. Sauver ou non l'euro ? That is the question.
Giscard dénonce une "agence Tartempion"
Cette situation dessert bien évidemment la « cause » de Nicolas Sarkozy (à qui Marine Le Pen a décidé de retirer le titre de « président protecteur »). Elle peut surtout, objectivement, servir les intérêts du Front national. D'où l'appel très politique du ministre de l'Agriculture Bruno Le Maire dans « Le Figaro » à l'adresse du président du MoDem: « J'ai toujours considéré que François Bayrou appartenait de plein droit à notre famille politique ». A l'UMP, c'est clair, on n'exclut plus un second tour PS-FN, et on veut tout faire pour l'éviter.Avant même que l'agence Standard & Poors ait officialisé la perte par la France de son triple A, plusieurs ténors politiques, au risque de la précipitation, auront réagi. Des réactions contrastées, donc très révélatrices. L'écologiste Cécile Duflot met en cause Nicolas Sarkozy, et le cible. Candidat du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon adopte un autre ton: il veut, lui, « résister à la guerre de la finance contre la France ». Le centriste François Bayrou tient, pour sa part, la droite et la gauche pour co-responsables des « dérives » du pays, et appelle à « un changement de politique ». Comme en écho, Dominique de Villepin estime que la France « paie le prix cher d'un enlisement de longue date ».
Alors que l'UMP dénonce « l'indécence de l'opposition à se réjouir » (de cette perte du triple A), il y a donc un vrai clivage, et il est sans surprise: pour les uns (à gauche mais aussi à l'extrême-droite), Sarkozy est sinon le seul « coupable », en tout cas le principal; pour les autres (la droite, mais aussi les centres), personne ne saurait être exempté d'une responsabilité qui est -ou serait- collective. « Cette perte du triple A, ce n'est pas une bonne nouvelle, mais ce n'est pas une catastrophe », a estimé vendredi soir sur France 2 François Baroin. Et le ministre de Finances d'ajouter, plus politique: « Ce ne sont pas les agences de notation qui vont dicter sa politique à la France ». Et Giscard, d'ordinaire plus réservé, de pourfendre, de son côté, « l'agence Tartempion » dont il ne faudrait pas, à l'en croire, surestimer le jugement et les pouvoirs. CQFD.
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