TOUT EST DIT

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vendredi 9 décembre 2011

Tant d'attentes

Une monnaie unique au bord du gouffre. Une Union européenne qui flirte avec l'éclatement. Jamais avant cette année, malgré les nombreuses crises du passé, le vocabulaire accompagnant les sommets européens n'avait pris un tour si apocalyptique. La gravité de la crise économique justifie en partie la dramatisation du sommet en cours à Bruxelles. Les postures, propres aux négociations ardues, ont aussi leur part. Mais cette surenchère verbale aide-t-elle à une meilleure compréhension du problème, ou à sa solution ? On peut en douter.

Et pourtant, des attentes considérables accompagnent ce sommet des dirigeants de l'Union européenne, appelés par les circonstances à trouver un accord politique. La plus pressante de ces attentes, parce que potentiellement la plus immédiatement néfaste pour l'ensemble de l'Union en cas d'échec, c'est celle des marchés financiers. Quelle que soit l'architecture institutionnelle que les dirigeants vont pouvoir dessiner pour faire naître une union budgétaire renforcée, c'est l'autorité politique de l'Europe qui sera testée.

Trop d'exemples, des États-Unis à la toute proche Grande-Bretagne, montrent que la spéculation ne s'acharne pas uniquement sur la zone en raison de la dette ou des déficits, au demeurant légèrement moins mauvais que ceux de Londres ou de Washington. Sa cible est le manque d'autorité politique qui caractérise le club des dix-sept pays partageant la monnaie unique. Si, comme on le souhaite, le sommet accouche d'une plus grande cohésion entre pays membres de l'Union européenne ou, à défaut, de la zone euro, cela ne pourra pas reposer uniquement sur le volet purement budgétaire.

Car l'autre grande attente, moins médiatisée mais tout aussi diffuse et sans doute plus profonde, c'est celle des opinions publiques européennes, beaucoup plus proches certainement les unes des autres que les responsables politiques nationaux ne veulent bien l'avouer. À Paris comme à Madrid, Berlin, Rome ou Varsovie, la rigueur n'est plus attendue. C'est une certitude. Ce qui est attendu en revanche, c'est que cette rigueur soit équitable, qu'elle ait un sens et une utilité. Surtout pour les jeunes générations, déjà particulièrement touchées par le chômage.

Si l'euro doit redevenir crédible sur les marchés, comme l'a rappelé la Chancelière allemande hier, les Vingt-sept doivent, eux, être crédibles dans l'opinion. Bâtir une Europe à reculons sans autre sens que celui dicté par la crainte de la noyade collective ne laisse rien présager de bon. On a vu les clichés nationaux resurgir, antigermaniques aujourd'hui comme anti-grecs hier. On voit les thèses populistes, parfois extrémistes, se banaliser sur le continent. On voit pointer les effets sociaux de la crise, les seuls qui, au fond, devraient justifier les tons alarmés.

Le sursaut qui est attendu aujourd'hui à Bruxelles n'est pas celui d'un club de vingt-sept ingénieurs penchés, à huis clos, sur une tuyauterie institutionnelle alambiquée. C'est celui des représentants légitimes de cinq cents millions d'Européens pressés, certes, par une crise financière et économique d'une grande gravité, mais menacés peut-être plus encore par leurs ataviques rivalités nationales. De triste mémoire.

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