Les notes de crédit attribuées par les agences de notation sont sous les projecteurs. Le gouvernement français redoute une perte imminente de son triple A, tout comme les régions et grandes villes françaises, ainsi que plusieurs autres pays et entreprises européennes. Dans l'affolement de la crise de la dette européenne, on en aurait presque oublié à quoi ces fameuses notes sont censées servir.
Lorsqu'une entreprise, une banque, un assureur ou bien un Etat s'endette sur les marchés, il peut payer une agence de notation afin qu'elle lui délivre une note qui aidera les investisseurs à lui prêter en toute connaissance de cause. Ce principe de l'emetteur-payeur a fait l'objet de nombreuses critiques dénonçant un flagrant conflit d'intérêts depuis le début de la crise.
Un suivi permanent
Pour chaque émetteur, une équipe de deux analystes attribuent la note et suivent tous les événements susceptibles de la faire évoluer. Parfois, ce sont les entreprises elles-mêmes qui décrochent leur téléphone pour informer les agences d'une évolution de leur situation, comme ce fut le cas pour le directeur général de Groupama cette semaine, pour éviter, sans succès, une dégradation à BBB-.
S'il y a lieu, les analystes en charge convoquent un comité de notation. Composé d'au moins cinq analystes, d'expérience et de spécialité sectorielle différentes, celui-ci doit parvenir à un consensus pour dégrader, relever ou laisser inchangée une note.
Douze heures de préavis en Europe
"En cas de modification de la note, nous envoyons un projet de communiqué de presse à l'émetteur, qui dispose de douze heures pour nous signaler si certains faits que nous y énonçons sont faux ou si nous y avons mentionné par mégarde des informations confidentielles", détaille un cadre de Fitch, l'une des trois agences qui dominent le marché avec Standard & Poors (S&P) et Moody's. "Ensuite, nous rendons notre décision publique. En aucun cas, l'émetteur ne peut commenter le bien-fondé de la note". Ce qui est aisément compréhensible, puisque ce sont les emetteurs qui paient pour cette évaluation indépendante.
Le délai de douze heures est imposé par la réglementation européenne de 2009 à tous les analystes exerçant dans l'Union européenne. Mais si Fitch affirme le respecter dans le monde entier, les analystes de S&P ou de Moody's situés hors d'Europe laissent parfois des délais bien plus courts.
"La plupart des analystes travaillant sur les notes européennes sont établis en Europe et surtout, sauf extraordinaire, un changement de note ne se manifeste pas d'un jour à l'autre", minimise l'un d'entre eux, sous couvert d'anonymat. "Notre travail n'est pas de surprendre les émetteurs, mais plus le délai est court, plus nous limitons les risques de fuite et de potentiels délits d'initiés".
L'heure de publication de la nouvelle note n'est pas soumise à un quelconque réglementation, mais tient généralement compte des horaire d'ouverture des marchés concernés. Si l'émetteur est une société française cotée à Paris, l'agence attendra la clôture de la Bourse pour lancer son communiqué de presse afin de ne pas susciter de réactions exagérées des marchés au moment de l'annonce.
Plus que la dégradation de leur note, c'est la hausse de la rémunération demandée par les investisseurs qui en découle que redoutent les émetteurs. Il faut cependant signaler que cette conséquence, pour logique qu'elle paraisse, n'a rien d'automatique. Ainsi, les Etats-Unis, qui ont vu leur note dégradée le 5 août dernier de AAA à AA+ par S&P, une première historique, n'ont pour l'instant pas souffert d'un renchérissement conséquent de leur dette. Le 14 décembre, le Trésor américain affichait des taux d'emprunt à dix ans sous la barre des 2% tandis que la France, du haut de son triple A, paye plus de 3,2%.
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