Rarement décision de l’Union européenne aura eu des conséquences aussi palpables sur le quotidien des citoyens. En Suède comme dans d’autres pays membres proches du Cercle polaire, son impact sera particulièrement ressenti quand les soirées seront encore plus lugubres que d’habitude, éclairées par la lumière blafarde des ampoules à faible consommation d’énergie.
De plus, on est en droit de se demander s’il était judicieux d’ordonner la disparition des ampoules classiques pour commercialiser à la place des ampoules qui consomment moins d’énergie mais qui peuvent contenir du mercure, un élément chimique dangereux ? Nul besoin d’être un expert pour voir que cette décision risque de poser de nouveaux problèmes sur le plan environnemental. On s’étonne donc que ces décisions de première importance soient prises sans aucun débat public. Car le sort des ampoules classiques n’a pas été scellé par les politiques – mais par les fonctionnaires de Bruxelles. Voici comment cela s’est passé.
A la fin de l’été 2003, Margot Wallström, qui était alors commissaire européenne à l’Environnement, a présenté une nouvelle directive sur l’"écoconception". Elle appelait de ses vœux une loi imposant la mise en place d’éclairages moins énergivores dans l’ensemble de l’UE, mais la directive ne divulguait aucun détail. A l’époque, la proposition de Margot Wallström a reçu un accueil plutôt favorable. Après des négociations en conseil des ministres et le vote du Parlement européen, la législation communautaire sur l’écoconception a été adoptée (en 2005) avant d’être transposée dans le droit suédois (en 2008) et le droit des autres pays membres.
Une question d'experts
Jusque-là, les politiques étaient donc parties prenantes et ont donné leur accord. Mais c’est toujours sur les petites choses que cela coince. Quel flux lumineux, quelle puissance et quels seuils l’Union européenne devait-elle fixer pour les ampoules et comment devait-elle organiser l’éventuelle disparition des produits défendus ? Toutes ces questions en apparence techniques mais en réalité hautement politiques ont été confiées à un comité composé de fonctionnaires nationaux, qui s’est réuni à Bruxelles.Quelques années plus tard, les fonctionnaires sont tombés d’accord. Un règlement (N°244/2009), qui régit dans les moindres détails les normes applicables aux ampoules au sein de l’Union, a été approuvé, avec effet immédiat dans l’ensemble de l’UE. Pendant les négociations à Bruxelles, l’autorité de l’énergie a convoqué une série de réunions, de séminaires et d’auditions.
La prise de décision n'a donc pas été fermée jusqu'au bout. La question des ampoules semble ne concerner que les experts, les entreprises et les groupes de pression. Il n’y a eu aucun débat public qui aurait permis d’évoquer et de soupeser les avantages et les inconvénients de ce changement.
Une multitude de lois ont vu le jour de la sorte en Europe. La "comitologie", qui implique que ce sont les fonctionnaires qui gèrent l’Union, a fait l’objet de vives critiques cette année. Espérons que le processus législatif s’ouvre davantage à l’avenir. Le traité de Lisbonne prévoit certaines évolutions qui vont dans le bon sens – il n’est que temps !
Car après les ampoules, d’autres réglementations sont en attente. Désormais, les aspirateurs, les ventilateurs, les cafetières, les sèche-linges et toute une ribambelle d’autres produits doivent recevoir le label "écoconception" de l’UE.
Si l’on ne veut pas que la flamme de la démocratie vacille à son tour dans l’UE, il faut que les citoyens prennent part aux décisions qui ont une incidence sur leur quotidien et sur l’avenir de l’Union.
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