Nous ne saurons jamais avec exactitude ce qui s'est passé au Sofitel de New York. Seuls les protagonistes le savent, mais ils en donnent deux versions différentes. Même après s'être donné un délai supplémentaire, la justice américaine ne parviendra pas à établir sans équivoque la réalité des faits.
Aussi surprenant cela soit-il, la fonction principale de la Justice n'est pas d'établir la vérité absolue des faits. Elle est de mettre un terme à un conflit entre deux parties, en édictant un « jugement » satisfaisant la victime présumée sans être injuste avec le présumé coupable. Son but ultime est d'éviter l'engrenage de la vengeance qui menace dès lors qu'on se rend justice soi-même. Si bien que la seule « vérité véritable » qu'elle établit, c'est la parole finale ¯ proclamation d'un non-lieu ou d'une peine ¯ par laquelle elle éteint le conflit. Une décision à laquelle tous ¯ après épuisement des procédures d'appels ¯ doivent se tenir. Tel est le « contrat » passé entre la justice et les justiciables.
Une fois cette justice « rendue » ¯ tant bien que mal ¯ une ombre continuera de planer sur l'affaire de New York et ses protagonistes. Sur le Net, dans les bistrots, dans la rue, dans les dîners en ville, etc., on en discutera encore longtemps. Des rumeurs ne cesseront de courir, puisque « la chambre du Sofitel » offre le terreau idéal pour toutes les spéculations. Tous ces « commentaires » seront un vertigineux miroir des préoccupations, des ressentiments, des fantasmes de ceux qui les formuleront ou s'en délecteront. On pourra aussi y voir un reflet singulier, sans doute inquiétant, de l'état de notre société.
Inspirer confiance
La mise en cause d'une personne publique, exerçant de très hautes responsabilités, pose de façon aiguë la question du lien entre vie publique et vie privée, entre ambition politique et éthique personnelle. Avec les aléas de la vie politique contemporaine, on est loin de l'ascétisme d'un De Gaulle !
Certes, l'impeccabilité morale ¯ dont la définition n'est pas simple ¯ ne fait pas nécessairement un grand leader politique. Il ne suffit pas d'être « un bon apôtre » pour conduire un pays, surtout en temps de crise. Churchill, par exemple, n'en était pas un. Néanmoins, puisque nous allons élire (ou réélire), dans moins d'un an, un nouveau Président et une nouvelle représentation populaire, la question se pose de savoir quels sont les candidats à même de dominer leurs passions ¯ quelles qu'elles soient, y compris idéologiques ¯ pour servir l'intérêt général. Elle sera déterminante.
Au moment où l'avenir nous semble un océan de périls à traverser, seuls pourront prétendre tenir la barre du navire français des hommes ou des femmes capables d'inspirer confiance. Cela suppose de réunir à la fois des compétences adéquates aux défis du moment, un projet politique clair et juste, et une éthique solide. Et ce qui vaut pour la personnalité des candidats s'impose tout autant pour les équipes susceptibles d'être ensuite mobilisées pour gouverner. C'est dire que la barre est maintenant placée très haut.
(*) Éditeur et écrivain.
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