Même quand il n’y aura plus de kérosène, les hommes rêveront encore d’avions. Ce n’est pas une question de nécessité, mais de dimension. Que voulez-vous, les hommes, pauvres mortels, n’ont jamais renoncé au ciel, même s’ils n’auront jamais d’ailes. Peu importe la crise, rien ne les arrêtera! Ils parviendront à repousser toujours plus loin les défis lancés aux lois de la pesanteur... et de l’énergie.
Cette semaine, et comme tous les deux ans quand il vient planer au-dessus de Paris, Icare aura encore le vertige. Pouvait-il imaginer qu’une drôle de libellule viendrait narguer le 45 ème salon du Bourget. Que le Solar Impulse, pas plus lourd qu’une voiture mais avec l’envergure d’un Airbus, volerait la vedette à la flottille d’aéronefs qui se disputent des milliards de dollars? Il sera d’autant plus bienvenu qu’il apportera un peu de légèreté à un événement dont les enjeux sont si élevés qu’ils créent d’incroyables tensions au sol.
Comme d’habitude, l’argent des contrats et la rivalité au couteau entre Airbus et Boeing domineront le plus grand rendez-vous mondial de l’aéronautique. Si le spectacle sera sur les pistes de l’aéroport parisien, le vrai combat se jouera dans les hangars avec cette originalité propre à un secteur qui n’a jamais oublié la force de la démonstration. Certains ministres français ont même épicé ce moment toujours très attendu avec d’étranges tentations protectionnistes. Il faudrait qu’Air France renonce à s’équiper, en partie, avec des Boeing au prétexte de soutenir la production de l’avionneur européen. Faut-il que le pays soit si peu sûr de lui pour mettre des barbelés sur l’immense marché des airs, là où, précisément, la concurrence est une règle d’or précieuse pour assurer la fluidité des commandes. Et réussir? Certes, l’Amérique n’est pas en reste, qui a réussi à faire capoter la fourniture d’avions ravitailleurs européens à l’US Air Force, mais Airbus aurait plus à perdre qu’à gagner si le gouvernement intervenait pour lui réserver, d’emblée, la plus grosse part des commandes de la compagnie tricolore, l’une des plus importantes du monde.
Ce simple épisode, dont on a du mal à croire qu’il soit sérieux, montre à quel point certains esprits français peinent, contrairement à ceux de nos voisins allemands, à se placer dans la perspective d’une compétition internationale. Avec de telles logiques défensives, faudra-t-il s’étonner des résultats calamiteux de notre commerce extérieur?
Curieuse agitation tout de même, tellement décalée avec l’élan d’innovation qui caractérise cette édition. Le fragile Solar Impulse - dont les sorties dépendront du soleil les jours prochains - préfigure déjà une nouvelle génération d’appareils propres et encore plus performants qui excitent déjà notre imaginaire. Alors vole, mon ange, vole!
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