La fête évoque le ciel mais en ce jeudi de l’Ascension les préoccupations des mortels restent particulièrement terre-à-terre. Le doute rôde sur la route, voie de l’évasion mais aussi des périls automobiles, où la tentation de la vitesse ne décélère pas.
La polémique sur «les panneaux» - surréaliste, quand on y songe à tête reposée - donne une indication de la sensibilité aussi épidermique que nationale sur cette question. Les hésitations gouvernementales, qui prêteraient à sourire si des vies n’étaient pas en jeu, reflètent l’embarras du pouvoir devant un sujet aussi irrationnel.
Quels dieux des transports invoquer quand le bon sens est battu en brèche par l’autopersuasion ? Comment imposer une discipline élémentaire validée par toutes les enquêtes - moins on va vite, et moins on s’expose à un risque d’accident sérieux - quand tant de conducteurs trouvent encore des vertus civiques aux détecteurs de radars ? Et font preuve de tant de force de conviction pour démontrer qu’ils sont utiles à la prévention routière ?
Un constat, tout de même : devant un tel obstacle, le gouvernement, parti pied au plancher pour effacer tout repère aussi salvateur que rassurant de «contrôle automatique», a bel et bien freiné. Voire pilé net. Chacun pourra le constater au cours de ce week-end : nos bons vieux «panneaux», devenus si familiers, sont toujours là ! Les démontages, commencés gaillardement dès l’annonce de la mesure, ont été stoppés du jour au lendemain. Le Premier ministre a vaillamment, courageusement et sincèrement juré qu’ils seraient poursuivis, mais chacun sait qu’entre la parole politique et les actes des services de l’État, l’inertie est un outil précieux pour ramollir une fermeté impopulaire avant qu’elle ne se dilue dans le temps.
De la place Beauvau, siège du ministère de l’intérieur, à Matignon en passant par l’Assemblée nationale le discours a été si sinueux à travers des nappes de brouillard - qui ne se dissipent pas - que dans tout ce flou cotonneux chacun aura entendu ce qu’il voulait entendre.
La peur du retrait de points intempestif est donc un peu retombée. C’est toujours ça de pris, songent certains communicants gouvernementaux, dans une séquence particulièrement anxiogène où l’on craint tout à la fois le concombre et le téléphone portable... Même le beau temps persistant et la sécheresse historique qui va avec - la plus importante depuis cinquante ans - diffusent de l’inquiétude !
L’unique pont d’un printemps pas comme les autres voudrait enjamber ce fleuve tumultueux qui charrie tant d’interrogations. Un peu de légèreté dans l’air ? Ah, mais, c’est vrai, il n’a jamais été aussi pollué, l’air. Tant pis, on fera avec. On trouvera bien quelques fragrances d’espérance dans la nuée bleue.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire