La nomination du nouveau Défenseur des droits est a priori un progrès pour notre démocratie. A priori seulement. Cette nouvelle institution souligne en creux, en effet, les insuffisances de la France dans un domaine où elle s’est toujours flattée d’être une experte.
C’est douloureux mais il faut bien l’admettre : le pays qui a inventé les droits de l’Homme et les a même placés en préambule de sa Constitution n’est pas – n’est plus – le champion des droits de l’Homme. À force de considérer qu’il était un modèle, il a fini par admettre un certain nombre de compromis avec ce que ses principes auraient dû considérer comme inacceptable. Ce n’est pas être sceptique que de l’énoncer mais au contraire faire preuve d’une lucidité salutaire digne des élans du siècle des Lumières et de 1789.
Sur les discriminations de toutes sortes, sur l’égalité des sexes, sur les abus de pouvoir de l’administration, trop de dysfonctionnements minent le socle qui devrait donner au citoyen sa véritable dimension. Il était temps, sûrement, de remédier à ces dérives invisibles en donnant à la défense des droits une véritable incarnation.
La centralisation de l’ancienne médiature de la République, et de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, entre autres, sous une tête unique, pourrait être un gage de reconnaissance et d’efficacité. Encore faudrait-il que l’énorme machine que la réforme a fabriquée ne soit pas si lourde et si tentaculaire qu’elle y perde sa mobilité et sa force de réaction. Malgré toutes ses limites, la Halde, par exemple, avait su se montrer particulièrement combative parce que son mode de saisine était simple, direct, et facilement identifiable. Une structure plus large pourra-t-elle avoir le même degré de réactivité ? Pour affaiblir un contre-pouvoir, rien n’est plus tentant que de le rendre impotent… Ce risque est aujourd’hui d’autant plus grand que ce quinquennat a été marqué par l’affaiblissement systématique de tous les corps intermédiaires.
La personne de Dominique Baudis, elle-même, pose problème. La qualité de l’homme n’est évidemment pas en cause. Mais le chef de l’État a-t-il été bien inspiré en choisissant une personnalité qui a été, elle-même, victime d’une injustice ? Le symbole est tout de même un peu lourd pour une institution neuve qui méritait sans doute un souffle nouveau.
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