jeudi 23 juin 2011
Le Bourget, salon de la reprise
Le contraste est saisissant. Alors que les idéologues du déclin et les chantres du repli sur soi font feu de tout bois, le salon du Bourget leur inflige un démenti cinglant. Les industriels et leurs clients y affichent un moral d'acier. Les commandes décollent en formations serrées sur tous les continents, chez tous les constructeurs : la compagnie indienne IndiGo a signé, hier, pour 180 Airbus A 320. La plus grosse commande de l'histoire en nombre d'avions.
Le principal salon aéronautique mondial donne le signal d'une reprise économique quasi généralisée et d'une relance de la mondialisation. Mieux, le Bourget signe une sorte de nouveau pacte de confiance en l'avenir, en faisant redécoller les projets futuristes. Papy Concorde aura une descendance. Intéressant, non ?
Les excellentes nouvelles volent, elles aussi, en escadrilles. Primo, le rebond aéronautique, c'est tout bon pour Airbus. Ce qui rappelle à ceux qui auraient la mémoire courte ou l'esprit critique un peu systématique que l'avion le plus vendu dans le monde est le fruit du volontarisme européen. L'Europe ne se résume pas à des querelles paralysantes, c'est aussi une entreprise industrielle qui réussit.
Secundo, ce qui est bon pour Airbus est bon pour l'industrie française, bon pour les usines de Nantes-Saint-Nazaire et la myriade de sous-traitants qui ont embarqué dans l'aventure, et bon in fine pour l'emploi. Qui s'en plaindrait dans un pays qui peine à descendre sous la barre des 10 % de chômeurs ? Tertio : il est symptomatique et rassurant que l'Airbus A320 neo, qui consomme 15 % de moins que ses aînés, soit aujourd'hui la vedette. Les avionneurs auront appris au moins une chose utile durant la crise : la tempérance. On le sait, quand les jets picolent de trop ¯ comme les voitures ¯ c'est la planète qui trinque.
Cet effort écologique, réalisé le dos au mur d'une montée incontrôlable du prix du pétrole, ne doit pas être surestimé. C'est un service minimum sur la seule variable du carburant. Les défis environnementaux sont encore devant nous. Ils exigeront une révolution culturelle qu'on ne décèle que timidement dans la remotorisation de l'A320 par exemple. Et qui semble emprunter parfois des voies glissantes, comme celle des agrocarburants.
Ces défis peuvent certes rimer avec le meilleur de la recherche, du côté des algues éventuellement ¯ une ressource dont la France est bien pourvue ¯ mais aussi avec le pire d'une déforestation incontrôlée et contradictoire avec la nécessité de nourrir la planète.
Le second grand danger, plus prosaïque, qui guette l'aéronautique tout particulièrement européenne, est celui de la concurrence. Il est évident que la Chine veut sa part du gâteau de constructeur-fournisseur, au moment où elle devient le principal acheteur-consommateur mondial, civil et peut-être demain militaire.
Face à une puissance qui ne s'embarrasse pas toujours du respect des règles des vieilles nations industrielles, l'Europe n'a d'autre choix que de s'unir davantage, quitte à retrouver l'esprit pionnier de la création de l'Airbus. Et là, ce n'est pas gagné. Quand on voit comment chacun construit, aujourd'hui, son drone dans son jardin ¯ Dassault, EADS - on ne peut s'empêcher de craindre un remake du combat fratricide dans le domaine militaire entre le Rafale et l'Eurofighter dans les années 1990. À cette différence près qu'entre-temps, la concurrence s'est démultipliée. Et le risque d'autant.
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