vendredi 3 juin 2011
Le bon plan de la BCE pour sauver l'Europe
L'ex-trader Marc Fiorentino apporte son regard éclairé sur la stratégie de la Banque Centrale Européenne confronté à un problème majeur : le risque de la propagation de la crise grecque aux autres pays de la zone euro dans le collimateur des marchés : de l'Irlande au Portugal en passant par la Belgique, l'Espagne et même l'Italie.
La Banque centrale européenne (BCE) est montée au créneau dans les derniers jours. Avec une véhémence qu'on ne lui connaissait plus depuis longtemps. Qu'elle soit soft ou hard, la BCE ne veut pas de restructuration de la dette grecque. Jean-Claude Trichet l'avait affirmé haut et fort. Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France et vice-président de la BCE, a franchi un pas dans l'escalade verbale. Il a parlé d'un "scénario de l'horreur".
On se demande : "Pourquoi tant de haine ?" Pourquoi l'évocation d'une restructuration, même soft, de la dette grecque, une restructuration que tous, y compris la BCE, savent inéluctable provoque-t-elle une telle levée de boucliers ? Les Allemands veulent la restructuration, les Grecs veulent une restructuration pour bénéficier d'une bouffée d'oxygène, les pays de l'Union européenne veulent une restructuration mais la BCE n'en veut pas. En fait, ce n'est pas tout à fait exact. Si on lit entre les lignes, on s'aperçoit que la BCE ne veut plus d'une solution partielle.
Restructurer la dette grecque seulement serait une rustine de plus
Depuis l'annonce du plan d'aide à la Grèce, en février 2010, soit depuis près de seize mois, on passe notre temps à colmater les brèches. Les unes après les autres. Toujours avec un temps de retard. Toujours poussés par les marchés. Sans vision globale. Sans projet d'ensemble. D'où la propagation de la crise grecque à l'Irlande puis au Portugal et plus récemment à la Belgique, à l'Espagne et même à l'Italie.
Restructurer la dette grecque seulement serait une rustine de plus. Un pas supplémentaire franchi sous la pression et qui déclencherait une nouvelle onde de choc. Car si on restructure la dette grecque, pourquoi ne pas restructurer la dette irlandaise, la dette portugaise et même la dette espagnole ? Et la BCE pose une question essentielle : quid des banques ?
L'inévitable restructuration des dettes des pays "périphériques"
Certes, la restructuration de la dette grecque n'aurait qu'un impact limité sur le bilan des banques européennes mais on doit, pour une fois, tenter de prévoir le coup d'après. Les banques européennes peuvent-elles absorber toutes les restructurations en cascade que provoquera inexorablement la restructuration de la dette grecque ? Et pour la BCE, la réponse est non.
Je ne pense pas que la BCE soit opposée au principe de la restructuration des dettes périphériques. Elle est inévitable. Mais la BCE voudrait probablement qu'on envisage un vrai plan de sauvetage européen dans lequel on prévoirait déjà les mesures d'urgence nécessaires pour que le système bancaire européen résiste au choc. Comme un assouplissement des ratios de capitaux propres.
Cessons la politique des petits pas
On a bien fait sauter momentanément les critères de Maastricht pour les États, en raison de la crise, on peut très bien suspendre momentanément tous les Bâle et les Solvency le temps que les banques surmontent le réajustement des dettes européennes. Il est temps, et je pense que c'est le message de la BCE, qu'on arrête cette politique des petits pas... en arrière et qu'on adopte une véritable refonte en profondeur. Allongement des maturités des dettes, abaissement des taux d'intérêt sur 3 à 5 ans, émission d'eurobonds pour financer les besoins à court terme : la « road map » est claire. Il ne manque plus qu'une volonté européenne commune.
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