La météo économique, elle aussi, aime bien les mois d'août. C'est dans l'une des deux semaines les plus calmes de l'année pour l'actualité politique hexagonale que la Banque de France dévoilera ce matin ses prévisions de croissance pour le troisième trimestre, et que l'Insee révélera, vendredi, les résultats du second. Une information très importante, tant elle comptera pour orienter la vision budgétaire du gouvernement à l'automne. Or, avant même la publication de ces deux indicateurs, les entreprises du CAC 40 saluent déjà la « sortie de crise ».
Enfin, cette formule magique, tant attendue, tant espérée, tant psalmodiée sur le mode incantatoire, pourrait être prononcée sur la foi d'un bulletin de santé prometteur. Les 28 plus grands groupes français, qui ont publié leurs résultats semestriels, peuvent se féliciter, en effet, d'une amélioration conséquente de leurs profits, en hausse de 225 % par rapport à la même période de 2009. L'activité (chiffre d'affaires cumulé) progresse de son côté de 12 %, et il ne reste plus qu'Alcatel Lucent pour afficher des pertes.
Cette embellie plus précoce que prévu, qui doit beaucoup à une reprise générale dans le monde - et en particulier au dynamisme des pays émergents - est-elle suffisante pour qu'on mette les drapeaux aux fenêtres ? Hélas, non. Le réveil de l'économie européenne reste poussif et le redémarrage de l'Amérique, moteur traditionnel des sursauts de croissance, connaît déjà un coup de frein avec une rechute du chômage.
La bonne forme des géants français - fort relative au demeurant (on n'a pas encore retrouvé les niveaux de 2008) - risque de faire contraste avec la déprime d'une société française à qui l'on promet des mois et sans doute des années difficiles. Le discours optimiste des chefs des très grandes entreprises sera inévitablement dissonant avec celui, inquiet, des patrons de PME, qui restent en situation très périlleuse.
Pour les politiques, ce décalage dans la lecture de l'économie sera une donnée psychologique délicate à gérer. Comment demander des efforts au nom de la crise, et justifier des réductions d'effectifs un peu partout pour prix de la rentabilité, au moment où des bénéfices spectaculaires sont présentés comme les témoins de... la fin de la crise ? Cette contradiction estivale hantera l'automne social.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire