Connu pour être depuis dix ans l'infatigable commissaire politique aux comptes de l'Elysée, le député apparenté socialiste René Dosière va devoir se trouver une autre spécialité. Dans son deuxième rapport sur la gestion du palais présidentiel, la Cour des comptes délivre un prix d'excellence au chef de l'Etat et à ses services. Peut-être n'est-ce pas le message que l'opinion, encline à vilipender les élites, souhaite entendre en ce moment, mais c'est ainsi. Et cette preuve de vertu vaut d'être versée au procès de l'éthique républicaine, au moins autant que les soupçons de vice qui pèsent sur le gouvernement de la nation.
La haute juridiction financière relève certes que l'Elysée peut mieux faire, encore, dans deux matières : les déplacements du président et les repas de ses services. Encore faut-il comparer pour bien évaluer. Nicolas Sarkozy arrive-t-il à New York pour l'assemblée générale de l'ONU avec une délégation d'une centaine de personnes ? Lorsque Barack Obama débarque à Strasbourg pour le sommet de l'Otan, c'est accompagné de plus de huit cents personnes. Les critiques de la Cour ne portent plus que sur le superflu, pas sur l'essentiel. Or l'essentiel est d'abord que les dépenses de la présidence soient contrôlées et maîtrisées. Elles le sont dans la forme car les appels d'offres sont désormais la règle, notamment en matière d'études et de sondages. Elles le sont sur le fond, puisque l'enveloppe allouée par le Parlement pour 2009 a été scrupuleusement tenue.
L'essentiel est aussi que le budget soit sincère et ouvert. De l'achat d'un journal à la location d'un avion, rien n'échappe plus au regard de magistrats qui ont presque une chambre au palais. Par la volonté de Nicolas Sarkozy, l'Elysée est devenu une maison de verre. Les Français se souviennent-ils qu'elle fut une boîte noire pendant plus de deux siècles de République ? Lorsqu'ils réprouvent le jeu de l'argent et du pouvoir, se souviennent-ils que, si près d'eux, le train de vie de la présidence était assuré pour partie par des fonds secrets utilisés de manière parfaitement discrétionnaire ? Bien des parangons de vertu d'aujourd'hui ont été ministres sous ce régime ancien de l'obscurantisme financier, où des enveloppes de billets se distribuaient dans l'ombre des cabinets.
Loin de régresser, la lumière gagne du terrain au sommet de l'Etat. Que le président n'en soit plus à l'abri est forcément souhaitable, s'agissant de fonds publics. Il ne faudrait pas cependant qu'à pointer ici les effectifs de telle délégation, là les budgets de communication, la Cour et, derrière elle, le Parlement, ne finissent par se prononcer sur des choix dont l'opportunité doit demeurer du seul ressort de l'exécutif suprême. S'il devait se traduire par un abandon de souveraineté budgétaire, le prix de la transparence serait alors élevé.
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