TOUT EST DIT

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jeudi 22 avril 2010

Voile intégral : l'interdiction générale est-elle applicable ?

A l'instar de Xavier Bertrand, la plupart des députés UMP se sont félicités de l'annonce gouvernementale d'un projet de loi d'interdiction générale du voile intégral dans tout l'espace public français. "Une interdiction claire, nette et lisible du port du voile intégral dans tout l'espace public et pas seulement dans les services publics est le meilleur choix", a déclaré le secrétaire général de l'UMP Xavier Bertrand, jugeant que la protection de "la dignité de la femme" est une "question primordiale".
Mais l'applicabilité de cette loi et sa conformité à la Constitution sont mises en doute par les opposants au projet. Pour Gérard Collomb, sénateur-maire PS de Lyon, une telle loi "sera inapplicable" ; l'interdiction ne serait possible que dans les lieux publics. "Je connais un certain nombre des policiers lyonnais qui me disent aujourd'hui : 'Nous, on va aller dire aux gens sur tel ou tel marché, par exemple à Vénissieux, vous allez enlever votre burqa. Difficile à faire appliquer !'"

Le médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, est lui aussi opposé à l'interdiction générale. "J'aime la loi, je n'aime pas l'interdiction générale", a déclaré sur RMC le médiateur, également maire UMP de Bapaume (Pas-de-Calais). "Je pense que le Conseil d'Etat a donné une notion assez intéressante qui consiste à dire qu'il conviendrait dans certains lieux, à certains moments, d'interdire le port du voile intégral", a-t-il ajouté. "Je ne sais pas comment on va faire avec les Saoudiennes qui viennent acheter sur les Champs-Elysées, par exemple", a encore fait valoir M. Delevoye, considéré comme proche de Jacques Chirac.

UNE PROCÉDURE "SEREINE"

Selon SOS Racisme, une loi d'interdiction totale serait "contraire à la Constitution et à la Convention européenne des droits de l'homme". "Lutter pour le droit des femmes, écrit encore SOS Racisme, est indissociable du combat antiraciste mais le présent projet de loi ne poursuit en aucune façon cette finalité […]. Il s'inscrit tout au contraire dans un contexte de stigmatisation dont les responsables politiques sont en tous points responsables."

Interrogé par l'AFP, le professeur de droit constitutionnel Dominique Rousseau estime en effet qu'une loi d'interdiction générale serait censurée par le Conseil constitutionnel. Selon lui, "Une interdiction générale est sans fondement juridique, disproportionnée et inapplicable [...]. Si la loi est votée, il y aura une saisine, et une censure, du Conseil constitutionnel. Car s'il applique sa jurisprudence traditionnelle, il constatera que l'interdiction, parce que générale, est disproportionnée par rapport à l'objectif recherché, n'a pas de fondement juridique et porte atteinte aux principes de la Déclaration des droits de l'homme."

En revanche la présidente de l'association Ni Putes ni Soumises s'est réjouie de l'annonce gouvernementale. "C'est la victoire des femmes, c'est le début d'une nouvelle page pour l'émancipation des femmes des quartiers populaires à qui on va proposer autre chose que l'enfermement ou la mort sociale", a déclaré Sihem Habchi, présidente de l'association qui revendique 6 000 adhérents dont 20 % d'hommes. Elle "demande du courage politique pour voter une loi de protection et d'émancipation des femmes".

"Je souhaite qu'on examine rapidement le projet de loi, sans perdre de temps, mais sans précipitation", a déclaré de son côté le président de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer (UMP). Interrogé sur France Info, il a fait part de son souhait d'une procédure "non accélérée", "sereine", pour l'examen du texte. "Prenons le temps du débat, recherchons le consensus républicain pour aboutir à ce que cette pratique cesse sur le territoire de la République."

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