Elle fait ses adieux...bon vent, salope. |
lundi 17 mars 2014
Christiane Taubira, la fin d'une illusion ?
Le politologue Alexandre Vatimbella revient sur le parcours politique de la Garde des Sceaux, ancienne indépendantiste guyanaise devenue égérie du mariage gay. Et si Christiane Taubira n'était finalement qu'une bulle médiatique ?
Quand une ministre affirme n'avoir pas été mise au courant d'une affaire qui concerne son domaine d'intervention alors que des documents existent pour prouver le contraire, cela s'appelle, au mieux, une gaffe politique.
Quand une ministre brandit des documents pour prouver sa bonne foi devant une flopée de journalistes et une multitude de caméras et que ceux-ci démontrent le contraire de ce qu'elle est en train d'affirmer, cela s'appelle, au mieux, une gaffe politique.
Quand les deux gaffes sont commises par la même ministre sur une même affaire, cela s'appelle au mieux une faute politique, au pire un mensonge.
Que ce soit Christine Taubira qui en soit l'auteure ne semble pas, pour beaucoup d'observateurs de la politique, un plus grand étonnement que cela, elle qui est restée, pendant des années, un ovni politique multipliant les déclarations à l'emporte-pièce, les positionnements incongrus et qui a collectionné les échecs électoraux, obtenant 2,32% à la présidentielle de 2002, étant même accusée alors par les socialistes, au même titre que Jean-Pierre Chevènement, d'avoir fait perdre Lionel Jospin au premier tour et permis à Jean-Marie Le Pen d'accéder au second.
Pourtant, l'actuelle garde des Sceaux est depuis devenue un des «poids lourds» de l'équipe du socialiste Jean-Marc Ayrault alors même qu'elle à un bilan des plus controversés depuis 2012.
Ce «mystère» Taubira n'était-il qu'une simple illusion qui est en train de voler en éclats?
Déjà, son arrivée à la tête du ministère de la justice avait déjà été une réelle surprise pour ne pas dire comprise comme une erreur de casting de la part de François Hollande et qui étonna jusqu'à ses propres amis. Sans aucune référence à faire valoir pour ce poste, elle multiplia les bourdes et les déclarations à l'emporte-pièce se mettant à dos nombre de professionnels de la justice, jusqu'à ses collaborateurs de son cabinet où le turn-over fut particulièrement important.
D'ailleurs, les Français ne sont pas dupes puisque 59% d'entre eux, selon un sondage BVA pour Le Parisien-Aujourd'hui en France publié en février dernier, ont une mauvaise opinion de la ministre, 54% pensent que ses prédécesseurs étaient meilleurs qu'elle et 75% estime que la justice fonctionne mal.
Et puis vint son heure de gloire.
Envoyée au casse-pipe pour défendre la loi sur le mariage pour tous, elle fut égale à elle-même dans une sorte d'outrageuse-outragée, récitant de manière surréaliste des vers à la tribune de l'Assemblée nationale tout en réussissant (ce qui n'était guère difficile au vu de la large majorité de gauche en faveur de ce texte avant même sa discussion) à le faire voter alors que des centaines de milliers de personnes descendaient chaque semaine dans les rues pour demander son retrait.
Louée voire magnifiée par beaucoup qui, dans son propre camp, la critiquait vertement quelques semaines auparavant, elle devint le symbole, que dis-je, une sorte de Jeanne d'Arc de cette frange de la population gaucho-bobo qui s'était mobilisée en faveur de cette loi.
Tous les (mauvais) coups dont elle est depuis victime avec des attaques racistes inqualifiables de la part de l'extrême-droite renforcent çà chaque son aura et font d'elle une sorte d'égérie intouchable.
Qu'on se rappelle, par exemple, cette déclaration d'un député socialiste dans Le Monde la qualifiant de «dernier phare de la gauche dans la brume» (sic). Ou de la défense lyrique de l'écrivaine Christine Angot dans Libération demandant à François Hollande de la nommer premier ministre…
Quelle étonnante transfiguration pour cette ancienne militant extrémiste qui prônait la lutte armée pour l'indépendance de la Guyane avant de devenir une notable molle d'un des partis les plus transparents de l'échiquier politique, les Radicaux de gauche, dont beaucoup de ses membres semblent être là seulement en attente de quelques strapontins ministériels que l'on donne aux micro-formations qui permettent de faire l'appoint lors des élections et qui sont souvent surreprésentées dans les gouvernements par rapport à leur réalité électorale et militante.
Du «vilain petit canard», elle devenait «la meilleure d'entre nous»!
Dès lors, c'est à bon escient que l'on peut parler d'une illusion Taubira dont les errements actuels l'ont fait voler en éclats.
Sans doute, dans de nombreux pays, ceux-ci devraient la conduire à démissionner (ou à être démissionnée). D'autant qu'elle est ministre d'un département où la vérité et l'honnêteté sont théoriquement deux principes de base…
Mais, en France, nombre de ministres de gauche et de droite ayant commis des errements identiques voire pires n'ont jamais connu la disgrâce.
Christine Taubira interrogée par les journalistes à ce sujet a répété qu'elle se sentait très bien et qu'elle n'avait aucunement intention de s'en aller et le premier ministre lui a renouvelé sa confiance.
Car, politiquement parlant (et si aucune nouvelle révélation ne la fragilise), son départ serait un coup dur pour Hollande.
D'une part parce que Taubira est ce poids lourd évoqué plus haut mais aussi elle est ce symbole que nous avons expliqué pour de nombreux électeurs de gauche.
Son renvoi serait perçu par ceux-ci comme le lâchage inadmissible de celle qui a affronté face à face la droite et l'extrême-droite ainsi que tous les populismes fascisants.
Une reculade quasi-impossible en ces temps de tensions politiques et d'échéances électorales où l'on doit envoyer des gages à son propre camp.
Sans parler de ce que cet électron libre de la politique pourrait faire comme dégât si elle s'estimait lâcher en rase campagne.
Et puis, si Christine Taubira était sacrifiée, ne serait-ce pas, aussi, la fin définitive des illusions du gouvernement Ayrault?!
Reste que ces gaffes à répétitions ne sont peut-être pas des affaires d'une extrême gravité mais elles démontrent une nouvelle fois l'amateurisme extrême d'une partie de l'équipe au pouvoir, ce qui jette un doute raisonnable sur ses capacités à réellement gérer les affaires du pays…
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