Malgré l'absence d'une politique étrangère commune de l'Europe sur la Syrie, la France se trouve remarquablement seule à proposer une intervention militaire.
À Saint-Pétersbourg, les dissensions européennes ont éclaté au grand jour quand les représentants des institutions européennes se sont clairement ralliés à la ligne non-interventionniste de l'Allemagne. Et depuis que le veto parlementaire britannique a coupé le sifflet de David Cameron, la voix de la "France guerrière" s'est trouvée à peine audible dans la cacophonie ambiante de cet événement. Ce fiasco européen du G-20 a entraîné un exercice de rétropédalage prévisible, les 27 exigeant de concert une "réponse claire et forte".
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On peut débattre de ce que leur logorrhée puisse être prise pour un soutien politique à des frappes militaires, et c'est d'ailleurs ce que les commentateurs français, plutôt à gauche, affirment. Unis derrière un président "normal" marginalisé, la presse subventionnée par l’État fait ce qu'elle peut pour relayer l'opinion présidentielle à un public sceptique. "Mais non !" scandent-ils à l'unisson, "le président n'est pas seul."
Le président US Barack Obama a dû sentir que sa fragile coalition risquait de perdre son plus puissant allié à l'Ouest. Le secrétaire d’État John Kerry a lancé son opération séduction. "La France est le plus vieil allié de l'Amérique" a-t-il dit. En effet, la victoire navale de l'Amiral de Grasse à la bataille de Chesapeake (en 1781) et l'envoi d'une force pour rejoindre l'armée de George Washington ont été décisives pour renverser le cours de la guerre d'indépendance américaine.
Mais l'intervention de Louis XVI aux côtés des insurgés contre la perfide Albion fournit peu d'indices quant à l'utilité d'une nouvelle intervention militaire au Moyen-Orient. Par contre l'histoire française en Syrie peut en offrir.
Par ironie de l'histoire, le grand-père de Bashar al-Assad (Ali Suleyman) s'était distingué, recevant en récompense le surnom "al-assad", "le lion", en combattant pour la même armée française qui s'apprête aujourd'hui à bombarder des cibles syriennes.
La domination française s'est terminée dans l'opprobre par le bombardement de Damas (en 1945) destiné à "punir" une faction rebelle de plus, au prix de centaines de vies innocentes. Une fois les dernières troupes évacuées sous la pression britannique (en 1946), la Syrie s'est enfoncée dans un ressentiment sectaire. L'ingérence française en Syrie est restée comme une illustration des limites des manœuvres étrangères à manipuler cet environnement hautement complexe, tant ethniquement que religieusement.
Le conflit en cours est une tragédie mais il n'y a pas lieu de croire qu'une petite série de frappes mettrait fin à l'horreur quotidienne. Cela pourrait même propager le conflit par delà les frontières du pays et déstabiliser la région.
Alors que le président Hollande persiste à vouloir "punir" le régime d'al-Assad pour son usage supposé de gaz Sarin, il serait peut-être temps pour lui de réfléchir à une autre leçon de l'Histoire.
Isolé de son propre peuple (64% des Français désapprouvent une intervention militaire), il pourrait s'exposer localement à des conséquences politiques imprévues. Les aventures de Louis XVI à l'étranger avaient meurtri les finances du royaume, accélérant sa chute et la Révolution de 1789. En 2013, la France croule sous les dettes et la politique économique socialiste de son gouvernement se révèle être un franc désastre, dans la même veine.
Cette incursion militaire en Syrie pourrait-elle être l'intervention de trop pour l'impopulaire président français ?
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