TOUT EST DIT

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mardi 5 février 2013

Le Mali, loin de l'Amérique...

Le Mali, loin de l'Amérique...


La France est la seule grande puissance à intervenir au Mali. L'Amérique, si prompte à combattre le terrorisme, brille par sa discrétion. Réticences géopolitiques, une certaine forme d'avarice dans la fourniture (payante) de son aide : l'internationalisme « musclé » de Bush est-il en train de céder la place à un internationalisme prudent, sinon réticent, d'Obama ?

Certes, lors de son second discours d'investiture, le président américain n'a pas manqué de redire, parlant de la politique étrangère : « Nos intérêts et notre conscience nous font obligation d'agir. » Mais le coeur y était-il vraiment ? L'accent était ailleurs, comme si Obama avait décidé de laisser sa marque dans l'histoire par le biais de réformes internes (santé, immigration, contrôle des armes).
En éliminant physiquement Ben Laden, l'Amérique aurait-elle fermé la page du 11-Septembre, tout comme la défaite de Jimmy Carter, en 1980, et son remplacement par Ronald Reagan avaient, pour partie, permis aux États-Unis de clore l'épisode frustrant des guerres de Corée et du Vietnam ?
En 2013, le monde n'est plus tout à fait pour l'Amérique ce qu'il était hier. Il existe comme une tension entre l'internationalisme naturel d'un pays porteur d'un message universel et l'évolution de son rapport au monde. Non pas une pulsion isolationniste : l'univers de la mondialisation est trop interdépendant et transparent pour qu'il en soit ainsi. Mais une hiérarchie nouvelle des priorités, de l'extérieur vers l'intérieur et, à l'extérieur, en direction de l'Asie.
Cette double évolution est renforcée par plusieurs facteurs. De nombreux experts prédisent qu'à la fin de cette décennie, le gaz de schiste aura rendu l'Amérique totalement indépendante en énergie du Moyen-Orient. Dans un premier temps, elle continuera d'importer des énergies classiques d'Amérique Latine ou d'Afrique. Mais le moment où elle faisait « la guerre pour le pétrole » est désormais révolu.
Moins dépendante du monde extérieur en matière énergétique, elle est toutefois devenue plus vulnérable face aux menaces nouvelles. C'est le cas, en particulier, des risques de cyber-attaques. Au lendemain de l'ouragan Sandy, qui avait plongé dans le noir des quartiers entiers de New York, l'ancien chef d'état-major des Armées, le général Pace, avait alerté l'opinion publique américaine sur les risques d'interruption de toute forme de communication qu'une attaque via les réseaux informatiques pouvait faire courir aux États-Unis.
Sandy n'était rien par rapport à la menace du cyber-terrorisme. Cette analyse a pour autre avantage de répondre au souci de l'équilibre budgétaire, devenu la première priorité stratégique de l'Amérique d'aujourd'hui. N'est-il pas moins coûteux de se protéger du cyber-terrorisme que d'imposer la paix au Moyen-Orient ?
Conséquence : après avoir condamné l'hyper-interventionnisme des États-Unis dans le monde, une partie significative de la communauté internationale, tout particulièrement en Asie, face à la montée en puissance de la Chine, s'interroge presque avec inquiétude : « L'Amérique en ferait-elle trop peu, après en avoir fait trop ? »
Les conséquences pour l'Europe sont majeures. Elle n'est pas seule, certes, mais elle ne peut plus se reposer en deuxième ligne face aux menaces qui se rapprochent d'elles. La France, dans ses efforts au Mali, n'est pas anachronique. Elle est peut-être tout simplement à l'avant-garde d'un monde post-américain.

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