vendredi 21 décembre 2012
Fronde contre la PMA : un trompe-l’œil
Fronde contre la PMA : un trompe-l’œil
On s’y attendait. La PMA sera bien discutée
en janvier, lors de l’examen du projet de loi sur le mariage
homosexuel. Mercredi matin, sous l’égide de Bruno Le Roux, le groupe
socialiste a voté pour le dépôt d’un amendement sur la Procréation
médicalement assistée à destination des couples de lesbiennes. La PMA
est aujourd’hui encore réservée aux couples d’hétérosexuels,
bénéficiant de raisons médicales. Alors que le sujet n’a jamais fait
partie des « engagements » de François Hollande, alors que Jean-Marc
Ayrault le voyait davantage débattu dans le cadre de la révision des
lois de bioéthique, « c’est dans ce texte qu’il sera le mieux mis en
œuvre » a affirmé le président du groupe socialiste.
Sans exclure l’intégration de cette mesure dans une autre loi. Car
si majorité « pour » il y a eu dans ce vote matinal – 126 voix contre
61, et 9 abstentions – le groupe compte 277 membres et 18 apparentés. Et
ils ne sont pas unanimes sur le sujet, à l’intérieur même de leur
famille politique. En fin d’après-midi, Bruno Le Roux recevait une
pétition signée par 27 députés lui demandant de retirer leur nom du
texte. Ils y invoquent également leur liberté de conscience pour refuser
de voter l’amendement PMA.
Déjà, mardi matin, la réunion du groupe socialiste qui recevait les
deux ministres en charge du dossier, Christiane Taubira (Justice) et
Dominique Bertinotti (Famille), a donné lieu à des débats houleux sur
cette question épineuse de la PMA. Comme l’a fait remarquer Taubira sur RTL,
aucun pays ayant adopté le mariage homosexuel n’a adopté dans la même
loi, cette dernière. Traduction : la couleuvre peut devenir trop grosse à
avaler pour les opposants au « mariage » gay. Et risquerait de mettre à
mal le beau projet socialo-sociétal.
C’est pourtant pour beaucoup une question de cohérence. Pour la
présidente du groupe de travail, Corinne Narassiguin, ce « n’était pas
logique de permettre à une femme mariée d’adopter l’enfant de son
conjoint, sans se préoccuper de la façon dont il a été conçu » – on ne
s’est jamais autant préoccupé d’un embryon ! A l’inverse, des gens comme
Jean-Christophe Cambadélis, également député PS, dénoncent une impasse
flagrante : « L’adoption, oui, mais la PMA,
c’est agir non sur la famille, non sur la morale, mais sur la réalité
humaine, voire psychique, de notre société. » Il y a aussi ceux qui
remettent en cause une proposition qui s’éloigne du sujet sociétal pour
glisser dans le domaine purement médical. « Ce projet ne concernait que
le Code civil. Là, il relèvera aussi du Code de la santé publique », a
dénoncé le député PS, Gérard Bapt. Pour Alain Claeys, spécialiste des
questions de bioéthique au PS, « il aurait fallu traiter ce sujet de
façon plus approfondie, dans le cadre des lois bioéthiques ».
C’est surtout une crainte toute politique. « Par excès de
précipitation, on risque de jeter la confusion », nous dit aussi Alain
Claeys… Et Olivier Faure, proche du Premier ministre, le crie plus fort
encore : « On est en train de se mettre une épine dans le pied. On avait
l’ensemble de la gauche rassemblée sur le mariage et l’adoption pour
les couples homosexuels. Si on introduit la PMA,
on divise la gauche, et l’opposition se réunifie contre le texte. » « A
ce stade », pas de débat encore possible : « les esprits ne sont pas
suffisamment mûrs ». Il faut encore comprendre, en ce sens, l’opposition
des radicaux de gauche ainsi que celle des communistes. Comme l’a
précisé le chef de file des députés du Front de gauche, André
Chassaigne, « on risque de créer un clivage plutôt que d’avancer ». Ce
« droit à l’enfant » est un « cavalier » qui peut leur jouer un tour
pendable sur un échiquier politique branlant.
Quant à l’UMP, elle a réitéré sa « très
grande inquiétude » quant à ce futur amendement. « Au début, François
Hollande parlait benoîtement de mariage pour tous, puis est venue la
question de l’adoption, et maintenant voilà la PMA.
La gauche donne le sentiment d’avoir un plan caché qui consiste en une
remise en cause sans précédent du Code Civil, de l’identité parentale,
de la filiation et de l’altérité sexuelle », a déclaré Jean-François
Copé. Le plan caché de la gauche, il est pourtant connu comme le loup
blanc : la progression, palier par palier, en vilipendant le suivant
pour accéder au précédent. Elisabeth Badinter, dans Le Monde de mercredi, a déjà demandé une reconnaissance de la filiation des enfants nés par GPA
(gestation pour autrui) à l’étranger… quand la gauche met toute son
ardeur à dénoncer ce moyen odieux qui instaure un « droit à l’enfant »
inacceptable. La PMA, elle, pourrait servir de repoussoir en faveur du mariage homosexuel.
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