vendredi 21 décembre 2012
Conscience et politique
Conscience et politique
Ceux qui attachent une grande importance aux relations entre
conscience et politique avaient pu trouver dans l'intervention du
président François Hollande, au Congrès des maires de France, des
raisons d'espérer. Le Président avait reconnu le droit d'un maire
d'avoir un problème de conscience devant le bouleversement du mariage et
de la filiation qui se prépare. Hélas, par une incohérence inexpliquée
et peu digne de sa fonction, il faisait volte-face quelques jours plus
tard. Faut-il en conclure que dans la République, la conscience ne
ferait plus partie des références nécessaires à l'homme politique ?
Une autre possibilité se présente pour l'homme politique d'affirmer
son droit à avoir une conscience. Il s'agirait d'admettre
exceptionnellement une modification des modalités habituelles de vote de
la loi, quand celle-ci soulève de graves questions.
Pour prendre certaines décisions d'importance quant au sens même de
la société ou dont les implications anthropologiques sont certaines
-décisions qui du même coup divisent la plupart des familles
politiques-, ne faudrait-il pas adopter le principe que nos
représentants voteront en conscience, libérés pour l'occasion de la
discipline de leur groupe politique ? Je n'entends pas méconnaître en
démocratie l'utilité des groupes politiques et leur droit à demander la
discipline quand le groupe a décidé démocratiquement.
Pourtant, pour les décisions telles que ce profond changement du
mariage républicain, un vote où chaque député aurait à prendre position
en conscience, où l'on ne se serait pas limité aux rapports de forces
qui régissent l'exercice du pouvoir, aurait à mon sens une valeur
supérieure. Une telle modification exceptionnelle de la procédure du
vote démocratique pourrait être proposée par le président de la
République aux divers partis politiques.
Sur un sujet comme le mariage actuellement en débat, j'admettrais
volontiers la légitimité du choix de mon député, décidé en conscience.
Par contre, s'il me disait voter pour ou contre par simple discipline
partisane, excusez-moi, je trouverais cette position partisane
inacceptable. D'autant plus si cet élu reconnaît que sa position
personnelle est en contradiction avec celle qu'il adopte par discipline.
Même si vingt-sept députés PS viennent de faire entendre leurs réserves sur la question de la Procréation médicalement assistée (lire page 4),
la crispation actuelle des responsables socialistes sur leur conception
de la discipline de parti est choquante. Dans une démocratie laïque, le
politique ne saurait avoir la place d'un absolu. Le politique ne
saurait être radicalement indépendant d'impératifs éthiques et
spirituels. C'est seulement dans un parti totalitaire que la soumission à la discipline du groupe s'impose sans limites, comme un absolu.
Je suis inquiet quand j'entends dire, aujourd'hui, que certains élus
socialistes n'osent pas exprimer leur sentiment personnel sur le projet
de loi et se préparent en fait à voter contre leur conscience pour
sauver leur mandat. La décision récente des socialistes d'ajouter au
projet de loi un droit illimité à la PMA aggrave les enjeux. De quel
droit la majorité d'un groupe peut-elle contraindre sa minorité sur une
décision aussi lourde ? Se trouvera-t-il dans ce pays quelques
parlementaires d'appartenances diverses pour exiger de leurs partis la
reconnaissance de la limite d'une légitime discipline dans certains
votes ?
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