TOUT EST DIT

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samedi 10 novembre 2012

Comment les Anglais empêchent l'Europe d'avancer

Le Royaume-Uni menace d'utiliser son veto lors du prochain sommet sur le budget de l'Union. Il s'oppose aussi vivement à l'Union bancaire qui consoliderait pourtant la zone euro. Explications.
Angela Merkel n'est pas très optimiste sur la sortie de crise. Et pour cause: non seulement le cas grec n'est toujours pas réglé, mais les réformes destinées à consolider la zone euro et l'Union européenne n'avancent pas. La faute aux Français? Eh bien non. Cette fois-ci, ce sont les Anglais qui menacent de faire capoter deux réformes majeures : le budget commun et l'Union bancaire.
Un double discours sur l'Union bancaireOfficiellement, le Royaume-Uni est satisfait de voir qu'une supervision bancaire unique se mette en place dans la zone euro. Cette réforme va diminuer les risques de crise au sein de l'Union monétaire. C'est la condition pour que le futur fonds de sauvetage permanent de la zone euro, le MES, puisse prêter directement aux banques sans passer par les Etats, évitant ainsi d'alourdir leur dette.
Mais officieusement, le Royaume-Uni semble prêt à torpiller le projet, soucieux des conséquences potentielles de ce grand remue-ménage pour son industrie des services financiers, dénoncent les journaux anglo-saxons. Les craintes de Londres portent sur la potentielle mainmise de la Banque centrale européenne (BCE) au sein de l'Autorité bancaire européenne, l'EBA, l'organisme en charge de la régulation bancaire dans toute l'UE. Si la BCE, en tant que superviseur unique de la zone euro, vote au nom des 17 au sein des instances de décision de l'EBA, les 10 autres risquent de se retrouver automatiquement mis en minorité. Le Royaume-Uni s'y oppose farouchement.
Dans l'idéal, Londres souhaite un double vote - les pays de l'union bancaire d'un côté, et les pays hors zone euro de l'autre - avant toute décision finale sur une régulation européenne. Mais cela compliquerait le système et cela reviendrait surtout, selon certains analystes à donner un droit de veto au Royaume-Uni et à ses alliés. Il faut trouver "une articulation intelligente avec l'EBA pour ne pas l'affaiblir", sinon les Britanniques demanderont une dérogation sur la supervision bancaire, conclut un diplomate. Une situation d'autant plus inacceptable que la place financière de Londres a été touchée récemment par plusieurs scandales, et notamment celui du Libor.
Un blocage qui persiste sur le budgetCette situation commence à exaspérer les Allemands. Selon le magazine Der Spiegel, la chancelière Angela Merkel compare en privé le Premier ministre britannique et les membres de son cabinet à des poupées du "Muppet Show" qui grommellent depuis les loges. Il faut dire que les Britanniques trainent aussi les pieds sur le budget de l'Union. Doit-on y voir une coïncidence avec les négociations sur l'Union bancaire? Sans doute. Cependant, comme l'explique un expert : le Royaume-Uni est résolu depuis longtemps à contribuer le moins possible aux dépenses de l'UE. Le gouvernement britannique a d'ailleurs annoncé récemment son intention de se désengager de mesures européennes en matière de coopération policière et judiciaire. Il a aussi menacé d'utiliser son veto si les négociations n'aboutissent pas à un gel des dépenses.
Sans surprise, la dernière entrevue sur le sujet entre les pays européens a vite tourné au vinaigre. Le locataire du 10 Downing Street s'en est pris à certains hauts fonctionnaires européens payés plus de 10.000 euros, laissant entendre que des coupes salariales pouvaient être faites. La France, de son coté, a dénoncé le rabais britannique: un chèque compensatoire (3,5 milliards d'euros en 2011) que reçoit le Royaume-Uni chaque année depuis 1985 sous prétexte qu'il bénéficie beaucoup moins des aides de la PAC que les autres pays.
Le camp des durs, c'est à dire ceux qui veulent comprimer le budget européen, s'est délité depuis quelques semaines, note cependant un observateur. Les "talibans", selon l'expression d'un haut responsable européen, ne sont plus que quatre: Royaume-Uni, Suède, Finlande et Pays-Bas. Mais le temps commence à manquer pour trouver un accord. Officiellement, le budget doit être entériné lors du Sommet des 22 et 23 novembre. Par ailleurs, la France et l'Espagne ont réclamé mercredi que des décisions soient prises pour l'Union bancaire avant la fin de l'année, lors du conseil européen des 13 et 14 décembre.
Or un échec des négociations aurait un effet dévastateur sur la confiance des marchés et des investisseurs, explique un expert. Cela signifierait que l'Union européenne est incapable de s'entendre sur la redistribution de ses ressources ou l'activation de mécanismes de secours en période de crise.

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