lundi 22 octobre 2012
Taxe d'habitation : l'exemple parfait de l'absurdité du système fiscal français
L'assiette sur laquelle est calculée
cet impôt, qui touche 33 millions de logements, repose sur des
estimations datant... de plus de 30 ans !
Les avis d'imposition pour la taxe d'habitation
viennent de parvenir à chacun d'entre nous il y a quelques jours, pour
un impôt payable, sauf exceptions, au 15 novembre. Depuis 2005, la
« contribution à l'audiovisuel public » (communément appelée « redevance
télé ») est réclamée conjointement, ce qui, pour l'année 2012, alourdit
encore la note de 125 euros par foyer fiscal. Elle est due par
l'occupant de chaque logement au 1er janvier, à la différence
de la taxe foncière dure par le seul propriétaire, occupant ou non, et
même si le logement était vide à cette date.
La
taxe d'habitation est l'un des quatre impôts locaux (les « quatre
vieilles »), perçus par les Communes et leurs regroupements, qui en
fixent librement le taux applicable sur leur territoire, ce qui entraîne
depuis quelques années de fréquents dérapages, dont la presse, locale
ou nationale, se fait régulièrement largement l'écho. Cet impôt
augmente fortement plus que le coût de la vie en général, sauf
naturellement et comme par « miracle », l'année juste avant les
élections municipales mais reprend de plus belle dès le scrutin passé !
Les
impôts locaux sont devenus au fur et à mesure particulièrement absurdes
ce qui nécessite une réforme, pour mettre fin à des des injustices qui
vont s'amplifiant au fil du temps. La réforme est intervenue en 2010
pour la « taxe professionnelle », on l'attend encore pour les trois
autres impôts locaux et notamment la taxe d'habitation. Elle a même été
appelée par le Conseil des prélèvements obligatoires, une émanation de
la Cour des Comptes, dans son rapport de mars 2010. Sans résultat pour
l'instant.
Son montant résulte d'un taux,
voté chaque année, qui s'applique à une « valeur locative cadastrale »
(VLC) qui, elle, n'a pas été revue depuis la fin des années soixante !
Cette VLC a été déterminée en fonction de différents facteurs, énumérés
sous forme de tableau par l'article 324 H de l'annexe 3 du Code général
des impôts. Il s'agit de classer chaque appartement, chaque immeuble en
fonction de son standing et son confort tel qu'existant en 1970, selon
les rubriques du tableau de cet article.
Il y a
bien eu une revalorisation en 1980 mais elle a été générale, et la
valeur locative est certes révisée par le parlement chaque année, mais
il s'agit d'une adaptation globale. Or, depuis 1970, les conditions de
confort des logements ont été souvent considérablement modifiées : les
centres-villes, autrefois particulièrement vétustes, ont été rénovés
sans que la valeur locative cadastrale suive, malgré une tentative par
une loi de juillet 1990, restée lettre morte. Par exemple nombre
d'appartements d'immeubles anciens n'étaient pas encore dotés de
toilettes intérieures en 1970, et le sont aujourd'hui pour la plupart.
Inversement, les immeubles HLM, quasi neufs en 1970 et dotés à leur
début de tout le confort moderne, se sont fortement dégradés parfois,
mais leur statut au regard des impôts fonciers n'a pas évolué non plus
depuis 40 ans.
De plus, la valeur locative cadastrale est calculée,
par référence aux seules caractéristiques de l'immeuble, pris en tant
que tel bien qu'un centre-ville, des quartiers excentrés, la banlieue,
la campagne, ne soient pourtant pas des conditions similaires de
logement.
De même, les boutiques de produits de
première nécessité ont quitté les centres-villes, remplacés par des
entreprises de services, le plus souvent affiliées à un réseau national
de franchises. Et sont arrivés à l'inverse les centres commerciaux,
super et hyper marchés, grandes surfaces spécialisées rarement implantés
en centre ville, le plus souvent en périphérie ou en banlieue.
En
toute justice fiscale, ces éléments et leur évolution devraient être
pris en considération, quitte aussi à dissocier la valeur locative
d'habitation de celle de la propriété foncière puisque pour l'instant
c'est la même pour les deux impôts. Dévaloriser fiscalement des
immeubles vétustes, c'est accorder un avantage fiscal à l'absence
d'entretien par le propriétaire. Est-ce vraiment ce que veut le
gouvernement, qui affiche sa volonté de lutter contre les logements
indignes ?
En réalité, il y a fort à parier que le
gouvernement actuel tarde à mettre en œuvre cette réforme nécessaire,
parce que les ajustements qui en résulteront seront contestés par ceux
qui seront frappés plus lourdement, et ceux qui bénéficieront de la
réforme ne lui en sauront pas nécessairement gré tant en France, il est
normal de payer le moins d'impôts possible. A moins bien sur qu'il
s'arrange pour que cette réforme favorise globalement « son » électorat
habituel au détriment de ceux qui ne votent pas ordinairement pour lui. Electoralisme et intérêt général font rarement bon ménage, surtout en matière de fiscalité.
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