Cette année, deux épisodes marquants viennent de lever le voile sur l'entité de la menace intérieure. L'affaire Mohamed Merah, en mars, à Toulouse, dont les ressorts sont loin d'avoir été éclaircis, et celle de Jérémie Louis-Sidney mort, samedi, à Strasbourg durant un échange de coups de feu avec la police. Ces deux cas confirment, si besoin était, que le risque terroriste n'est plus seulement importé. « Il s'agit de réseaux qui sont dans nos quartiers, il s'agit de Français convertis, de Français musulmans », a déclaré, hier, Manuel Valls, le ministre de l'Intérieur. Les onze suspects mis en garde à vue dans la nuit de samedi à dimanche sont, effectivement, tous français.
Comme toujours avec le terrorisme, le pouvoir de nuisance est asymétrique. Inversement proportionnel au nombre d'individus directement impliqués. Les spécialistes chiffrent à environ deux cents le nombre de personnes susceptibles de passer à l'action terroriste. Les enquêteurs surveillent ces réseaux comme le lait sur le feu. Cela exige des moyens policiers, mais cela n'épuise pas toutes les questions soulevées par cette violence récurrente.
S'interroger
Comment les thèses salafistes trouvent-elles un terrain si perméable ? Comment expliquer que, le 15 septembre, des dizaines de manifestants aient pu scander des slogans antisémites sous les fenêtres de l'Élysée et de l'ambassade américaine ? Si, en mars, la campagne électorale avait étouffé, par crainte de dérives, un tel débat, le moment est sans doute venu de s'interroger plus activement. Notamment sur l'état de nos prisons (où le délinquant bascule irrémédiablement dans le terrorisme), de nos cités qui voient les quinquennats défiler sans réel changement, du système éducatif.
Depuis janvier, plus de cent actes violents à caractère antisémite ont été perpétrés sur le territoire, selon le Service de protection de la communauté juive. On comprend la colère et l'inquiétude de ses représentants. Tout comme l'incompréhension des musulmans de France qui se sentent en porte-à-faux. Avec, d'un côté, la conviction que leur religion est prise en otage par les terroristes, de l'autre, que les mots pour dénoncer cet amalgame sont durs à trouver dans un pays autant sécularisé. Surtout quand certains politiques jettent de l'huile sur le feu.
Opportunément, François Hollande a consulté, hier, les représentants juifs et musulmans pour oeuvrer de concert et faire tomber la fièvre. C'est d'autant plus nécessaire que cette menace de l'intérieur n'est pas vraiment coupée de celle qui vise, directement, les intérêts français à l'étranger. Avec cinq Français toujours retenus en otage au Sahel, Paris est une cible de choix pour Aqmi (Al-Qaida au Maghreb islamique). Et pour les réseaux salafistes qui propagent leurs thèses sur Internet, en quête d'âmes fragiles.
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