jeudi 9 août 2012
Retour sur un dessin imbécile de Plantu
Comme le MRG dans ses communiqués, dans son dessin en une du Monde
daté du 7 août, Plantu s’est voulu paradoxalement et ridiculement
apôtre de la laïcité (l’allahïcité !) en se faisant l’avocat de la
Saoudienne contre le Jamaïcain, comprenez du voile contre le signe de
croix.
Son dessin montre Wodjan Shaherkani d’un côté (avec son fameux
bonnet) et Usain Bolt (faisant le signe de croix en quatre plans) avec
cette légende : « La Saoudienne arrive “voilée” sur le tatami, tout le monde en parle. Le Jamaïcain fait le signe de croix… » Et ce commentaire sensé être humoristique : « Les J.O., j’y crois ! »
Rappelons les faits avec Rue 89 : « Shaherkani s’est présentée vêtue
d’un kimono blanc et d’un bonnet noir. Pas de foulard donc, interdit
par la Fédération internationale de Judo (pour des raisons de sécurité
[car il est par ailleurs permis dans d’autres sports où il ne gêne
pas]), mais un couvre-chef masquait intégralement sa chevelure… La
judokate avait créé la première polémique de ces jeux, en refusant de
participer au tournoi olympique si elle n’était pas autorisée à porter
le foulard islamique. Panique au CIO… Quelques jours plus tard, un
compromis est trouvé… Compromis qui “garantit un bon équilibre entre la
sécurité et les considérations culturelles”… Un accord un peu
surréaliste : si le bonnet de Shaherkani tombe pendant le combat,
interdiction de le remettre en place… Beaucoup de bruit pour rien. La
jeune Saoudienne n’a pas résisté longtemps… : un petit ippon et puis
s’en va… »
Certains diront que cette pauvre jeune fille a été
« instrumentalisée » par l’islamisme, envoyée là pour « montrer au monde
que l’islam va où il veut, quand il veut »… D’autres objecteront c’est
le Comité olympique international qui aurait menacé d’exclure le pays
des JO si aucune femme n’était présente dans leur délégation. L’Arabie
Saoudite a donc dû inclure une jeune fille d’un niveau très médiocre
dans un sport de combat, non pas pour « médiatiser » quoi que ce soit,
mais pour que l’équipe du pays puisse concourir.
Quoiqu’il en soit, ce « conflit d’intérêts » entre deux extrémismes
– l’idéologie féministe et le prosélytisme musulman – a eu pour
résultat de mettre cette jeune fille en situation d’humiliation, par un
traitement déplorable de l’image de la femme, surtout quand on sait
jusqu’où il peut aller dans les pays musulmans. Le voile obligatoire (en
terre occidentale) signifiait en l’occurrence plutôt un symbole d’enfermement que d’ouverture, contredisant quelque peu l’adage sportif : « Mens sana in corpore sano » (« Une âme saine dans un corps sain »).
En faisant même abstraction du résultat de Bolt, cela rend d’autant
plus ridicule l’odieuse comparaison de Plantu. Car le voile, à la
différence du signe de croix, n’est pas à proprement parler un signe
religieux universel. Il n’est même pas une obligation absolue de
l’islam, mais seulement un signe politique de cette religion
théocratique et hégémonique, comme le minaret : un symbole de présence
islamique, de marquage territorial, un outil de propagande qui fait
marcher la communauté musulmane au pas !
On saisit alors la stupidité du dessin de Plantu mettant sur le même
plan, dans sa propre croyance laïciste et obscurantiste, deux
comportements qui n’ont rien à voir. On pourrait peut-être en revanche
associer idéologie laïciste et islamiste dans cette critique célèbre que
faisait Soljenitsyne du slogan intrinsèquement contradictoire de la
Révolution (« Liberté, égalité, fraternité ») :
« Quant à la fraternité, elle n’est pas de leur famille… La vraie fraternité, elle est d’ordre spirituelle. »
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