mercredi 25 juillet 2012
Les 10 leçons à tirer de la bonne réaction de PSA face aux attaques d'Arnaud Montebourg
Au-delà des stratégies, ce qui compte
avant tout, c’est la sincérité et la justesse du discours chez les
dirigeants d'entreprises.
Les entreprises, surtout « les grandes », sont,
et seront sans doute encore, malmenées. L’actualité récente du groupe
PSA nous apporte quelques enseignements intéressants sur la gestion de
telles situations.
Il
faut montrer que ce n’est pas une décision prise « à la légère »,
montrer qu’une vaste étude des différents scenarii possibles a été
réalisée, que plusieurs hypothèses étaient envisageables. Rappeler ces
autres hypothèses et le temps pris pour la réflexion, montrer que la
décision prise n’est pas conjoncturelle ou opportuniste, « boursière »
comme on dit aujourd’hui. C'est une décision responsable, en pleine
connaissance de cause des impacts sociaux, gérés du mieux possible. Dès
lors, si l’hypothèse retenue, longuement mûrie, est la moins mauvaise,
de fait elle n’est pas négociable. Au mieux certains ajustements peuvent
être discutés, mais toute modification significative du plan remettrait
en cause le fait qu’il ait fait l’objet de toutes les attentions au
préalable.
Il
s’agit ici d’évoquer avec subtilité les éléments tangibles du
contexte : la mondialisation, la concurrence, le coût du travail, la
crise … tous ces éléments sont des facteurs pris en compte, en partie
explicatifs, mais ce ne sont pas des bouc-émissaires, des refuges
déresponsabilisants. L’entreprise vit dans un environnement
contraignant, difficile, c’est son lot quotidien, ce ne sont pas des
excuses. Sa part de responsabilité, c’est aussi montrer que l’entreprise
n’est pas restée inerte face à la conjoncture de son marché (sans pour
autant ré-argumenter par le menu les choix stratégiques des années
passées). Sa responsabilité, c’est montrer également que les décisions,
même difficiles, sont toujours prises en perspective, pour construire ou
pour préserver l’avenir.
Comme
les attaques plus ou moins masquées à l’encontre de la marque, de la
gestion hasardeuse, peu professionnelle ou peu stratégique de
l’entreprise. Humilité et modestie certes, mais orgueil et fierté
aussi !
Ne
pas laisser les autres parler pour vous. Faire face et monter au
créneau, au plus haut niveau de l’entreprise. Ne pas laisser un
secrétaire général ou un directeur de la communication (tout talentueux
qu’ils soient) s’exposer, ou alors, en plus pour relayer les messages,
mais pas à la place. Ne pas non plus laisser un syndicat sectoriel ou
patronal parler pour vous, ce qui reviendrait d’une part à créer un
doute sur la marque (qui se protégerait derrière des barricades), et
d’autre part créerait une ambiance de lutte corporatiste, de gang des
« puissants ». Incarner l’entreprise, c’est aussi montrer qu’elle est
humaine, qu’elle peut-être faillible comme tout le monde, mais qu’elle
fait face et tente de faire au mieux. C’est aussi montrer que
l’entreprise peut avoir des émotions, que les décisions ne sont pas
nécessairement froides et mathématiques comme beaucoup voudraient le
laisser penser.
S'appuyer
sur l'ancrage de la marque dans l’opinion publique, son histoire, y
compris son histoire industrielle familiale (qui dans des cas comme
Peugeot ou Michelin sont des points d’appui possibles, lorsque c’est
plus compliqué pour des Bolloré ou des Wendel). Il s’agit là, non pas de
révéler des informations nouvelles, mais de s’appuyer sur des socles
qui ne nécessitent pas d’être démontrés : gestion raisonnable et
responsable, côté no show off des dirigeants, une marque qui
n’est pas une « marque boursière », des produits au cœur du quotidien
des familles françaises depuis des décennies (« mon mari est Peugeot à
mort » cf « Les Bronzés » !), etc.
Montrer
que l’on ne se laisse pas attaquer, « salir » impunément, mais laisser
« les autres » livrer leurs armes pour pouvoir les reprendre point à
point sans y répondre au coup pour coup. Il est en effet important de ne
surtout pas s’inscrire dans le même rythme. Il s’agit alors d’être à
contre-rythme et à contre-tonalité, en acceptant l’échange, sur la base
de données objectives et dans un esprit certes combatif, mais surtout
constructif. Tout en essayant de maitriser l’agenda, de ne pas être trop
en réaction, pour réagir lorsque l’on se sent prêt, éventuellement
lorsque l’autre a vidé son chargeur.
Ne rentrer ni dans l’argumentation dogmatique (de type « de quoi se mêle l’Etat ? »), ni dans les sous-entendus personnels (de type « ministre incompétent »,
« besoin de projecteurs médiatiques »), ni dans le refuge juridique (de
type « de toute façon l’Etat ne peut rien imposer »). Mais pour autant,
s’offusquer des attaques, des inepties, des approximations, des
jugements de valeurs … sans jamais se positionner dans un rôle de
victime, que la « grande entreprise » ne sera jamais aux yeux de
l’opinion. S’étonner de la sur-exposition et sur-exploitation médiatique
… sans jamais laisser penser que de tels sujets sociaux ne méritent pas
toutes les Unes.
Faire
aussi preuve de concertation, d’esprit d’équipe, comme a pu le
témoigner le soutien de Christian Peugeot envers Philippe Varin. La
crise ne doit pas être l’occasion de règlements de compte ou de signes
de dissensions qui seront autant d’aspérités crédibilisant et légitimant
les critiques.
Trop
souvent dans ce type de situation on cherche à répondre à l’externe,
aux médias, aux cabinets et aux ministres en oubliant un peu l’interne,
qui se retrouve informé après les autres, ce qui est très dommageable et
de plus en plus souvent critiqué par les collaborateurs. Lorsqu’une
marque est attaquée (dans sa bonne gestion, dans la qualité de son
offre, etc.), lorsqu’une certaine fierté d’appartenance existe, et que
le discours « officiel » est ressenti comme sincère et « vrai », c’est
en effet tout l’interne qui se sent attaqué, en plus d’être concerné.
Les dirigeants qui s’expriment ne sont alors que les « représentants »
du collectif. La « réplique » est alors attendue, cela peut même devenir
un vecteur de mobilisation, et une « opportunité » médiatique pour
refaire passer des messages liés à l’actualité de la marque.
Préserver
de « bonnes nouvelles » venant nourrir le fil de l’actualité du
dossier, pour compenser les effets négatifs et montrer que tout ne doit
pas être noirci et caricaturé sous l’angle de la gestion désastreuse.
C’est par exemple le rappel des non-licenciements secs, les projets de
ré-industrialisation du site, les « rapatriements » sur le site voisin
de Poissy, le partenariat avec Toyota, important pour le site de
Sevelnord près de Valenciennes, etc.
Alors
bien sûr, ce ne sont que quelques réflexions et enseignements, et
d’aucune manière un mode d’emploi ou une « recette ». Surtout, cela ne
minimise en rien l’actualité sociale bien réelle. Mais ces réalités
sociales peuvent, dans certains cas, être gérées de façon plus apaisées.
Au-delà des stratégies, ce qui compte avant tout, c’est la sincérité et
la justesse du discours. Tout comme aucune publicité ne peut longtemps
vendre un mauvais produit, aucune stratégie de communication dans de
telles situations ne peut être efficace si elle n’est pas authentique.
Authentique, mais ni naïf ni passif, pour réagir de façon naturelle et
instinctive, avec le cœur, mais aussi réfléchie et stratégique, avec la
tête. Le cœur peut de temps en temps avoir des raisons que la raison
n’ignore pas.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire