le corrupteur, ex agent du KGB |
«On pourrait dire que Poutine a seulement été présent au bon moment, et que la Russie ne pouvait pas passer à côté de l'envolée des hydrocarbures sur les marchés internationaux», critiquent les économistes d'Exane BNP Paribas. Une preuve: la crise qui a ébranlé le monde ces dernières années a touché la Russie plus que tout autre grand pays émergent, comme la Chine ou le Brésil. Son économie a plongé de 7,9% en 2009, en parallèle de la dégringolade des prix du pétrole.
L'essor de la classe moyenne
Le boom pétrolier russe a malgré tout permis l'essor de la classe moyenne. Un signe: dans les métros de Moscou ou de Saint-Pétersbourg, on compte bien plus de tablettes tactiles et autres livres électroniques entre les mains des passagers qu'à Paris. Les revenus des ménages ont augmenté de 10% à 15% l'an entre 1999 et 2007. La consommation est devenue un des moteurs de l'économie, sans pour autant que cela profite à l'industrie nationale, trop peu compétitive et ne sachant pas répondre aux envies des consommateurs. Résultat, les importations ont été multipliées par cinq en 10 ans.Si la pauvreté absolue a régressé, revenant de 20% en 2003 à 16,1% en 2011, une bonne partie des Russes se sentent toujours laissés pour compte. «Certains sondages montrent que 40% des Russes se considèrent comme pauvres, soit à peu près le même niveau… qu'en 1990», rapporte Tania Sollogoub, économiste au Crédit agricole. La faute au creusement des inégalités, explique l'économiste: «Dix ans de croissance ont consolidé les revenus d'une oligarchie nourrie par la rente énergétique».
Pots de vin
Malgré cette nouvelle prospérité, les maux traditionnels de la Russie perdurent, comme la corruption. «Le montant des pots de vins s'ajuste au prix du pétrole!, lâche Olga Garanina, maitre de conférences à l'Université de Saint-Pétersbourg. Selon une étude, les dessous de table ont presque été multipliés par deux en cinq ans, passant de 90 dollars en 2005 à 176 dollars en 2010.» Cette tare accable aussi bien les citoyens que les entreprises. «Le climat des affaires qui prévaut en Russie reste un handicap persistant pour l'économie», reconnaissent même du bout des lèvres les experts très policés de l'influente Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE).S'il est réélu le 4 mars, ce qui ne fait guère de doute, Poutine n'aura pas seulement à s'occuper de corruption. Les Occidentaux l'appellent à privatiser les secteurs, comme l'énergie, qu'il avait en partie nationalisée au début des années 2000. La présence de l'État s'est traduite en effet par un manque d'investissements. L'usure des équipements dans le secteur électrique et gazier s'approche ainsi de 60%, et grimpe jusqu'à 80% environ dans le raffinage. Toutefois, nuance Olga Garanina, «si les privatisations sont réalisées dans un cadre institutionnel insuffisamment stabilisé, les risques de l'accaparation d'actifs sont très forts, ce que l'on a observé dans les années 1990».
Retrouvant le siège de président, Poutine devra faire face aux problèmes d'une transition inachevée. Avec une classe moyenne désormais vindicative, ce qui inquiète des investisseurs étrangers déjà échaudés par la crise de l'euro. Beaucoup de ces derniers ont d'ailleurs retiré leurs billes en 2011, provoquant la plus importante fuite de capitaux que la Russie n'ait jamais connue. Pour Poutine, c'est la rançon d'un demi-succès.
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