mardi 29 novembre 2011
Mais où les riches Grecs cachent-ils leur argent ?
Alors que leur fortune est menacée par les réformes fiscales et la perspective d'un retour à la drachme, les riches Grecs rivalisent d'imagination pour trouver des solutions pour préserver leurs économies, et le taux "d'évaporation" des euros du circuit officiel ne cesse de s'accélérer
La Grèce, un pays de pauvres ? Pas seulement ! Un certain nombre d'ultra-riches ont profité des années de vaches grasses pour se bâtir une fortune qu'ils aimeraient préserver en dépit de la crise.
Ils craignent en effet un nouveau tour de vis fiscal du gouvernement, ou une hyperinflation causée par une éventuelle sortie de l'euro ce qui dévaluerait considérablement leurs avoirs. Ils cherchent donc à placer leurs économies en lieu sûr et le montant des transferts d'argent vers l'étranger s'est accéléré ces derniers mois.
Si un secteur se porte bien en Grèce, c'est bien celui des coffres-forts. Les achats ont bondi de 40% cette année, et ce malgré les avertissements de vendeurs comme Dimitris Andreadakis, cité par le Global Post : "Ne faites pas ça, c'est dangereux. Des voleurs peuvent venir chez vous et vous menacer avec une arme à feu". Selon Pétros Doukas, à la fois conseiller financier et ancien ministre délégué aux finances, un certain nombre de Grecs de sa connaissance conserveraient ainsi jusqu'à 100 000 euros en liquide chez eux.
Anticipant un possible retour à la drachme, et la dévaluation inévitable qui s'ensuivrait, les Grecs préfèrent garder leurs économies sous le matelas, au risque d'aggraver la situation déjà délicate de banques grecques qui manquent cruellement de liquidités.
Depuis début 2010, 75 milliards de dollars ont ainsi été retirés, ce qui représente 23% du total des actifs. Et la tendance s'accélère, puisque pas moins de 7,6 milliards de dollars ont quitté les caisses des banques grecques en septembre dernier.
Il faut dire qu'il vaut mieux avoir du cash si l'on a des problèmes de santé en Grèce : comme le rapporte le Wall Street Journal, il est en effet désormais quasi-impossible de se faire opérer sans donner un pôt-de-vin au chirurgien, dans un système de santé socialisé mais criblé de dettes.
Pour les ultra-riches, cette thésaurisation pourrait rapporter gros en cas de sortie de l'euro : ils pourraient alors investir leurs euros dans un marché de l'immobilier au plus bas à cause de la dévaluation de la drachme. Les prix de l'immobilier ont d'ailleurs déjà baissé de près de 7% en un an à Athènes...
Les riches Grecs menacés par la crise trouvent également refuge dans des placements immobiliers hors zone euro, comme par exemple à Londres, où ils auraient déjà investi cette année plus de 250 millions de livres, selon l'agence Knight Frank. Une ruée vers l'or qui aurait provoqué une flambée de 10% de l'immobilier au centre de la capitale britannique.
Cette solution plait également aux riches Italiens, confrontés aux mêmes problèmes dans leurs pays. Ensemble, les Italiens et les Grecs auraient investi au total plus de 406 millions de livres dans la capitale britannique, soit deux fois plus qu'en 2010. Certains acheteurs se seraient d'ailleurs également tourné -dans des proportions moindres- vers la France.
Le rapatriement de capitaux en Suisse pourrait bientôt perdre la faveur des ultra-riches. Le gouvernement grec est en effet en train d'étudier avec ses homologues suisses un système de taxation des avoirs grecs issus de revenus non-déclarés dans les comptes en Suisse, sur le modèle des récents accords de la confédération avec le Royaume-Uni et l'Allemagne.
L'entreprise suisse Helvea a évalué en 2009 le montant total des avoirs grecs en Suisse à 26 milliards de dollars, dont seul 1% serait déclaré. Les autorités grecques estiment pour leur part qu'entre 4 et 5 milliards de dollars auraient été rapatriés en Suisse depuis deux ans.
L'évasion fiscale coûte chaque année à l'Etat grec 30 milliards de dollars, soit 10% de son PIB. Pour beaucoup, elle est l'unique source des difficultés actuelles du pays.
Pour beaucoup de Grecs, même les plus fortunés, les dépenses les plus banales de la vie quotidiennes peuvent devenir un véritable casse-tête. C'est par exemple le cas du chauffage central, devenu inaccessible à beaucoup du fait de la flambée de 40% des prix du fioul depuis la surtaxe de l'énergie du dernier plan d'austérité.
Selon le vendeur de poêles à bois Costas Mitsionis, la demande pour ce mode ancestral de chauffage a doublé dans les derniers mois, alors que les gens arrêtent de payer leur chauffage central : "Tout le monde veut en acheter, les riches comme les pauvres".
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