L’autocélébration du courage au 20 heures de TF1 était un incontournable de la communication gouvernementale, mais cette figure imposée mise à part, François Fillon n’était pas apparu aussi détendu depuis longtemps. C’est qu’il est délivré d’un interdit qui pèse sur lui depuis cinq ans. Enfin, le voilà libre de parler de «risque de faillite» sans craindre l’abstraction conceptuelle ni le courroux présidentiel. La noirceur de la séquence va même plutôt bien à celui qui la prédit très tôt et faillit bien démissionner parce qu’on ne voulait pas l’entendre.
Churchill, dites-vous ? N’exagérons rien, tout de même. Il suffit de réécouter le discours de «Sir Winston» pour constater que les deux hommes ne jouent ni dans la même catégorie, ni sur le même registre. La dramatisation excessive a succédé trop vite au déni de crise dans les mêmes bouches. Quant à la comparaison à la Grèce ou même à l’Italie, pays étalons du péril, elle n’est guère flatteuse: est-ce là le point d’aboutissement d’un quinquennat qui voulait inventer «la France d’après» pour finir par la mesurer modestement au voisin transalpin d’à côté. L’un des plus mauvais élèves de l’Europe...
«L’effort juste» n’en est pas moins un bon thème. Est-il suffisamment musclé pour donner au pays l’envie de retrousser ses manches pour le bien collectif? On en doute. Présenté comme un gage d’exemplarité (on ne rit pas) le «gel», effectivement symbolique (au 1 er ou au second degré?) des salaires des ministres et du président de la République donne toute la mesure de la détermination personnelle de l’équipe gouvernementale. Renoncer à s’augmenter, en pleine crise, quand on touche respectivement 14 000 et 21 000 euros par mois (sans les frais), quel héroïsme! À peu près aussi généreux et élégant qu’un pourboire de 5 centimes après un repas dans un grand restaurant. Une baisse? On a préféré éviter la démagogie, sûrement.
Le plan austérité a tout calculé avec la même précision épicière, boulier de rigueur d’un premier ministre qui prend garde à ne pas briser une croissance déjà chancelante. Attendues et relativement modérées, les mesures annoncées ne sont ni scandaleuses, ni vraiment sacrificielles. Elles risquent simplement d’être inefficaces et impopulaires pour rien, et c’est peut-être pire encore. Quant à l’accélération de la réforme des retraites, mathématiquement rentable, elle fera rentrer le doute dans l’esprit des Français en même temps que l’argent dans les caisses de l’État. À ce rythme de renoncements, la parole politique se déprécie plus vite que l’euro.
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