Il y a l’amour-propre des Américains piqué au vif par la dégradation de leur note souveraine. Il y a surtout un vrai risque : Washington, qui dépense déjà annuellement plus de 410 milliards de dollars pour la charge de sa dette, versera – si les taux d’intérêts ne grimpaient que d’un point – encore 100 milliards de plus à ses créanciers dans l’espoir de se refinancer. Avec des conséquences pour toute l’économie : hausse des taux à la consommation et dans l’immobilier, baisse des investissements avec regain du chômage et, peut-être, de nouveaux krachs dans les banques et assurances. Sans oublier le poids de la politique intérieure. Républicains et Démocrates se renvoient les responsabilités. À quinze mois de l’élection de 2012, l’avenir présidentiel de Barack Obama s’annonce bien sombre…
Évidemment, cette situation ne sera pas sans répercussions ailleurs. Un pilier de la mondialisation se fissure. Dès demain, les marchés donneront leur avis. Peut-être sous un nouveau vent de panique, peut-être avec lassitude : après tout, voilà dix jours que les places financières avalent couleuvre après couleuvre. Plus déterminants sont les moyens et longs termes. Le dollar vient de perdre sa superbe et, avec elle, un statut jusqu’à présent inébranlable de devise internationale, un statut garantissant plus que la puissance militaire le leadership américain. La réaction de la Chine est, à cet égard, aussi significative qu’inquiétante. Principal créancier des États-Unis avec plus de 1 100 milliards en bons du Trésor US, Pékin sermonne Washington, contribuant encore à affaiblir une confiance déjà ébranlée. Il est vrai que, dans l’affaire, la Chine risque de perdre au moins 100 milliards par la dépréciation des papiers américains. Néanmoins, une réaction qui est un comble quand on sait que la note de la Chine est inférieure de trois crans à celle des États-Unis, faute de transparence dans ses comptes sous un yuan dévalué et opaque…
Une autre conséquence devrait vite se faire sentir. Franchement, quand Standard & Poor’s s’en prend à la première puissance économique du monde, comment, sur des plans purement mathématiques, les autres agences de notation pourraient-elles ne pas suivre ? Avec les critères appliqués aux États-Unis, aucun pays de la zone euro ne pourra longtemps se targuer d’un triple A. À l’exception de quelques «moins grands» et de l’Allemagne qui, contrairement à la France qui accumule les déficits commerciaux, sait contrebalancer sa dette souveraine (la troisième du monde en volume) par un dynamisme économique et de formidables excédents. Si le système actuel devait perdurer, autant dire que les années à venir seront celles de la rigueur et des hausses fiscales, aux États-Unis et en Europe, France comprise malgré les promesses électorales à venir.
Incapable de résoudre sa crise interne, la zone euro claudique désormais en compagnie des États-Unis. Ce n’est pas une consolation. Tout le système financier et monétaire international nécessite une sérieuse refonte. Un G7 de plus n’y suffira pas. Encore faut-il une vraie volonté politique au niveau international, alors qu’elle n’existe déjà pas au niveau européen. Or tout cela paraît bien utopique quand on sait quel accueil a été réservé à l’idée d’un nouveau «Bretton Woods» lancée par Nicolas Sarkozy en 2007-2008…
Et maintenant, wait and see… En guettant aussi les bouleversements géopolitiques que ne manquera pas d’apporter ce «11-Septembre financier».
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